Chaque jour, Vincent Hervouet traite d’un sujet international.
Donald Trump a suggéré à un ministre espagnol qui lui parlait des migrants, de construire un mur pour leur barrer la route, un mur au Sahara.
C’est le ministre des Affaires étrangères, Josef Borrel, qui a raconté la scène et le plus frappant, c’est les réactions que cette idée provocante suscite. Il y a ceux qui s’indignent, quel manque d’humanité ! Ceux qui préfèrent en rire, ce Trump a des idées fixes. Ceux qui haussent les épaules et s’interrogent sur sa santé mentale.
Josef Borrel est diplomate, il a fait remarquer au président américain que le Sahara s’étalait sur presque toute la largeur de l’Afrique, 5.000 kilomètres. L’autre lui a répondu que cela ne valait pas la frontière mexicaine qui fait pourtant moitié moins ! Les intuitions du Donald ne s’embarrassent pas des détails.
Mais le plus absurde, c’est de croire que l’idée est absurde. Car il y a de plus en plus de murs dans le monde. On peut en compter soixante-dix. Cinq fois plus qu’il y a trente ans. Le mur, c’est moderne. Le mur va de pair avec la mondialisation. Il paraît qu’ils courent sur 40.000 kilomètres, de quoi faire le tour de la terre. Pour se défendre des contrebandiers, comme au Brésil, de la violence dans la zone verte de Bagdad, du terrorisme avec la clôture israélienne et cela marche, 80% d’attentats en moins. Un mur pour se protéger d’un retour de la guerre, comme la grande muraille de sable des Marocains au Sahara occidental. Un mur pour stopper les migrants comme l’Inde le long du Bengladesh.
Les murs poussent partout, en Asie, en Amérique latine, en Afrique mais pas en Europe.
Depuis 2015, il y en a des bouts en Hongrie, dans les Balkans. Ils font honte.
Parce que les Européens pensent que le mur, c’est mal. C’est rance. C’est péché. Le mur, c’est Berlin. Autrement dit, une prison qu’il faut abattre. Sauf que ce mur-là n’était pas fait pour protéger les Allemands mais pour les empêcher de s’enfuir du paradis communiste.
Le mur, c’est honteux. Les Espagnols ne parlent pas de mur, mais d’une clôture à Ceuta et à Melia, leurs deux enclaves sur la cote du Maroc, alors que les barbelés à six mètres de haut sont aussi étanches qu’une muraille de château-fort. Et les Africains tentent de prendre d’assaut le donjon, en masse et avec des échelles comme au Moyen-Âge.
En fait, la question que s’interdisent de se poser les dirigeants européens, c’est de savoir si les murs seraient efficaces. Pour filtrer les migrants. Pour répondre à l’angoisse des peuples. On peut en douter. Mais on peut aussi douter des centres contrôlés et des plateformes de débarquement annoncés à chaque conseil européen.
En fait, l’Europe ne peut supporter les murs parce qu’elle a été fondée sur l’évaporation des frontières, le refus de la guerre et l’effacement des Nations. Et elle ne peut renoncer à ce rêve, même si la mondialisation l’a condamné.