L'ouillade, le plat paysan qui réchauffe après une journée de ski dans les Pyrénées-Orientales

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Chaque dimanche, Vanessa Zha et Marion Sauveur nous emmènent en week-end gourmand et livrent leurs adresses coups de cœur. 

Skis aux pieds après avoir dévalé les pentes enneigées des Pyrénées orientales, Vanessa Zha et Marion Sauveur viennent nous raconter leur périple dans les Pyrénées-Orientales.  

Nous étions au cœur du Domaine des Neiges Catalanes, à seulement une heure de Perpignan. Font-Romeu est la plus connue et la plus grosse station du domaine. Elle naît en 1913 quand la Société des Chemins de Fer construit simultanément le Grand Hôtel et la ligne du mythique petit Train Jaune pour acheminer la clientèle. Mais il n’y a pas que Font-Romeu, il y aussi Les Angles, et surtout quatre autres petites stations-villages dont Formiguères (cela veut dire fourmilière en catalan) qui a un certain petit cachet.

L’avantage des Pyrénées, c’est que ce sont des stations de ski alpin, mais sans la foule des Alpes, à taille humaine, et avec de la neige. Il y en a particulièrement cette année, Gloria est passée par là. Autre avantage, on peut aussi faire du ski de fond, de la randonnée en raquettes juste à côté sur un plateau. C’est plat comme la Norvège, c’est pour cette raison qu’on l’appelle l’espace nordique du Capcir. Et ce coin là c’est un petit bout du monde tout blanc, paisible, sauvage, avec uniquement des petits villages et des fermes, qui vous accueillent pour déguster de bons fromages.

Et c’est dans ce coin qu’on trouve les fameuses eaux chaudes sulfureuses ?

En effet, on trouve des eaux chaudes dans lesquelles on peut se baigner, se déstresser. Au choix : les bains de Llo, les bains Dorres, mais mes préférés ce sont les bains de Saint-Thomas à Fontpédrouse. C’est la que l’eau est la plus chaude (elle jaillit à 58 degrés) et le cadre est exceptionnel. On barbote au pied d’un amphithéâtre, ce qui n'arrive pas tous les jours. En parlant de monuments, de pierres, allez jeter un œil à la citadelle de Mont-Louis qui date de 1659, quand les Pyrénées-Orientales sont devenues Françaises grâce au traité des Pyrénées, Louis XIV et Vauban voulant protéger sa frontière avec l’Espagne. Et puis tant qu’on est à Mont-Louis, on en profite pour sauter dans le petit Train jaune, il nous emmène jusqu’à la station ferroviaire la plus haute et la plus petite du monde : Latour-de-Carol.

Quels hébergements conseillez-vous ?

Les chalets secrets a Bolquère : de vieux greniers d’alpage transformés en chalets bien cosy. Et aux Angles : des chambres d’hôtes dans un boutique-hôtel très design du nom de "4youlodge". Le petit déjeuner est à tomber par terre : les produits du terroir sont bios et on a vue sur le lac.

Quelle est la spécialité qu’il faut goûter après avoir profité des sommets pyrénéens ?  

Il s'agit d'une spécialité que l’on peut goûter dans tout le département : l’Ouillade. C’est la potée catalane qu’on va retrouver sous le nom de garbure dans le Béarn ou la rouzole en Ariège. C’est un plat de paysan qui cuit dans une grande marmite en fonte : l’ouille sur la cheminée. 

La recette est née dans les mas. Elle se faisait au fur et à mesure de la semaine. On y mettait les bas morceaux du cochon puis les légumes du jardin avant de rajoutert le bouillon et de faire cuire le tout. Aujourd’hui, on le fait dans des cocottes en fonte sur le feu. C’est un plat de famille. 

C’est quoi la recette ? 

Il n’y a pas vraiment de recette type, mais il existe plein de variante. Chaque famille a sa propre recette et ses astuces. La base est toujours composée de morceaux de cochon, avec des pommes de terre et du chou. Ensuite vous pouvez rajouter les légumes de saison pour réaliser un bouillon goûtu, comme les carottes, le poireau ou le céleri. Près de la frontière espagnole, on met des haricots blancs et des pois chiches. C’est ce qui va apporter du liant à cette soupe. Mais il faut bien les avoir laissé tremper au moins une nuit avant. En Espagne, ce sont carrément des pâtes ou du riz que l’on cuisine. D’autres, dans la vallée, y ajoutent de l’orge perlé. 

On commence par faire cuire la viande, avant de rajouter les légumes avec du bouillon. Il faut laisser cuire tout doucement pour que la viande soit confite, qu’elle se délite dans le bouillon, que ce soit bien savoureux. On y ajoute un morceau de jambon à l’os, ou un peu de lard rance, le sagi. On n’oublie pas les oreilles et le pied de cochon. Il faut que ça cuise bien trois heures. Et un quart d’heure avant la fin de cuisson : on rajoute le boudin noir. On couvre, et c’est prêt. Il n’y a plus qu’à servir dans une assiette creuse, pour surtout avoir de la viande, des légumes et du bouillon. C’est entre la soupe et le pot-au-feu. Le mélange de toutes ces saveurs en fait vraiment un plat gourmand et exceptionnel, mais vraiment roboratif. Et comme tous les plats de ce type, c’est meilleur réchauffé. 

Est-ce que vous avez de bonnes adresses pour déguster cette ouillade ? 

Si vous passez du côté de Font-Romeu, je vous conseille de vous rendre chez le chef François Will à La chaumière. Il cuisine la recette familiale, que lui ont transmis sa grand-mère et sa mère. Il la cuisine également dans son restaurant sur les pistes : Le bistrot de la Calme. Si vous êtes là, le jour où il la cuisine, vous verrez sa grosse marmite, son ouille, dehors, au milieu de la neige sur un feu de bois. Ça vaut le détour.