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Alors que des fortes précipitations sont prévues sur une partie du territoire, Fanny Agostini nous explique pourquoi elles détériorent la perméabilité des sols.

Le sol, bien que d’apparence immobile, est en constante évolution. Il est façonné par les animaux qui le foulent, les végétaux qui y poussent, le vent qui le balaye, et la pluie qui le martèle. Cette pluie est essentielle à l’hydratation de la terre, la régénération des nappes phréatiques, et crée des conditions favorables au développement de la vie. On aurait donc tendance à croire que la pluie est bénéfique ; ce n’est pourtant pas toujours le cas !

Cela dépend avant tout de la perméabilité du sol : si cette dernière est faible et que la pluie est intense, l’eau ne pourra pas s’infiltrer dans la terre et va ruisseler à la surface sans pénétrer dans les couches profondes. Le ruissellement va au contraire fermer les pores par lesquels l’eau s’infiltre et rendre le sol de plus en plus imperméable.

Ce phénomène est renforcé par l’effet "splash". Quand une goutte frappe le sol, elle dégage l’énergie liée a sa chute, comme une onde de choc. Plus la goutte est grosse, plus sa chute est rapide et plus l’énergie dégagée est importante. Cet impact va réarranger les molécules d’argile et les limons contenus dans le sol, qui vont former une "croûte de battance", diminuant encore plus l’infiltration de l’eau. Lorsque les pluies sont fortes, l’effet splash va entièrement modifier la couche supérieure de la terre et participer à la fermeture des pores, comme si un film plastique était tendu à sa surface. Le ruissellement va donc creuser des sillons dans la terre et emporter les premiers millimètres du sol, qui va s’appauvrir.

Au-delà d’un certain point, le sol n’est plus en mesure d’absorber l’eau

Néanmoins, pas besoin de l’effet splash pour observer un ruissellement… Imaginez une éponge. Lorsque vous la passez sous un filet d’eau, elle va absorber le flux, à tel point que pendant un certain temps, aucun écoulement ne la traversera. Pourtant, si vous la laissez sous l’eau suffisamment longtemps, l’éponge va se gorger entièrement de liquide et ne sera plus en mesure de l’absorber ; l’eau coulera à nouveau au travers. C’est exactement le même principe avec le sol. Au-delà d’un certain point, il n’est plus en mesure d’absorber l’eau, qui se met alors à ruisseler. Une longue période de fine pluie peut ainsi produire le même résultat qu’une pluie courte et intense.

Cependant, dans la Nature, rien n’est laissé au hasard. Afin de limiter l’appauvrissement des sols lié au ruissellement, rien de tel que la matière organique issue de la décomposition des végétaux ou des déjections animales, qui vont rendre les sols plus grumeleux, plus poreux et donc plus aptes à absorber l’eau. Les arbres sont aussi capables de capter une partie de cette eau de pluie grâce à leurs feuilles, et amortissent la chute des gouttes. Les racines, quant à elles, ralentissent le ruissellement et augmentent la perméabilité du sol en l’asséchant.

Malheureusement, la déforestation conduit à une augmentation accrue des ruissellements, et c’est tout un équilibre qui se retrouve bouleversé. Les activités agricoles telles que le labourage réduisent les apports en matière organique et détruisent la biodiversité nécessaire à la dégradation de cette dernière ; et les élevages augmentent l’imperméabilisation des sols liée au piétinement des animaux dans les champs. Nos activités accélèrent ainsi l’appauvrissement des sols et les empêchent de se régénérer. Nous devons donc impérativement changer nos méthodes de production, car de la fertilité du sol dépend notre survie.