Post-vérité : la définition d’un État ou une époque où les faits comptent moins que l’émotion

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SAISON 2016 - 2017

Alors que Donald Trump a empilé les mensonges durant sa campagne, les électeurs ont tout de même voté pour lui en connaissance de cause.

Dans la presse internationale, le mot "post-vérité", consacré mot de l’année par le très prestigieux dictionnaire d’Oxford. 

Oui, post-vérité, pillier 2016 du commentaire politique. Le mot désigne des circonstances dans lesquelles les faits ont moins d’influence pour modeler l’opinion, que les appels à l’émotion. On l’a beaucoup utilisé cette année, pour décrire la campagne de Trump aux États-Unis ou celle du Brexit en Grande-Bretagne. Le Républicain a empilé les mensonges, on le savait, pareil pour les partisans du Brexit, et pourtant les gens ont quand même voté pour eux. Ils sont donc entrés dans une ère post-factuelle, post-vérité. Ils n’écoutent que leurs instinct et la réalité ne comptent plus. Ce mot a été employé 2000% de plus que l’année précédente. C’est intéressant, parce que qu’il n’explique pas grand-chose finalement, sinon le désarroi de ceux qui l’utilisent.

Parce qu’on se déchire aussi sur ce qu’il définit ?

Oui c’est un mot, fourre-tout et un mot-miroir. Les rares personnes qui avaient prédit l’issue des deux votes se sont insurgées hier sur la toile : "post-vérité mais, de quelle vérité parlent-ils ?" Écrit le magazine conservateur The Spectator. De celle des experts, qui ne cessent de se tromper ? De celle des économistes dont aucun n’a vu venir la crise de 2008 ? Ou de la vérité de ces élites qui pensent que le libéralisme, c’est un horizon indépassable, que les inégalités ne se sont pas tellement aggravées dans le monde occidental. Les électeurs, écrit le journal, ne font pas que ressentir les mensonges que leurs servent les politiques ou les médias depuis plus de 30 ans. Ils savent, ils mesurent dans leur vie de tous les jours que quelque chose cloche et ils n’ont plus confiance. Peu leur importe dès lors, que l’un des candidats mente: même effrontément. C’est vu comme un outil pour renverser le système. Les plus irrationnels, écrit la britannique Claire Fox, sont peut-être cette brigade de partisans du vrai, enfermés dans des multitudes de faits auxquels ils ne parviennent plus à donner du sens. Aujourd’hui, comme hier finalement, la vérité c’est aussi une question de perspective.