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Dans Historiquement Vôtre, Clémentine Portier-Kaltenbach revient sur les vols commis dans les demeures royales de Sa Majesté Louis XIV. Jadis, chacun pouvait aller et venir dans les châteaux du roi, à condition de porter une épée et un chapeau. De nombreux voleurs en profitaient alors pour commettre des larcins. En 1699, le roi se vit ainsi dérober... son pot de chambre en argent !

Jadis, il était possible d’aller et de venir librement dans les châteaux du Roi, à Versailles aussi bien qu’à Marly ou à Fontainebleau. Tous avaient accès à la demeure royale à la seule condition d’être convenablement vêtu, c’est-à-dire a minima avec une épée et un chapeau, pour donner une bague allure de gentilhomme.

Le 30 janvier 1746, deux commis venus à Marly pour voir le château se perdent dans les couloirs. Ils montent et descendent au hasard et empruntent finalement un petit escalier qui donne sur une porte. Ils frappent à la porte, et qui leur ouvre ? Le roi en personne ! Ils sont tombés par accident sur le cabinet du roi. On imagine leur surprise !

Les vols se multiplient à Versailles

A l’époque, on accédait beaucoup plus facilement et légalement au roi que l’on accède de nos jours au président de la République. Les mémorialistes du XVIIe siècle ont tous laissé des souvenirs de larcins commis à la cour de Louis XIV, à la faveur des allers et venues dans le château.

Par exemple, à la mi-janvier 1674, on vole dans la chapelle de Saint-Germain une lampe en argent d’une valeur de 7000 francs et six chandeliers « plus hauts que moi »écrit à sa fille Madame de Sévigné. Et d’ajouter :

" Voilà une très grande insolence. On a trouvé des cordes à côté de la tribune de Madame de Richelieu. On ne comprend pas comment cela s’est pu faire car il y avait des gardes qui vont et qui viennent et tournent toute la nuit. "

Les gardes ne manquent pas à Versailles, entre les gardes du corps, les gardes des meubles de la couronne, les gardes des princes ou les gardes Suisses (100 Suisses rien que pour l’accès aux jardins et 50 gardes pour la porte de Sa Majesté). Mais cela n’arrête pas les téméraires. L’avant-veille de Noël 1684, dans la salle de bal, on coupe la bourse d’un capitaine des Suisses. Sa Majesté lui fit donner cent pistoles qu’on lui avait volé, disant qu’il n’était pas juste qu’un jeune officier perdit en une soirée les gains d’une année passée à son service.

En 1688, voilà que les vols se multiplient. En avril, la comtesse de Mailly se rend chez Madame de Maintenon et est volée par un certain Pierre Viraud, condamné à être étranglé et pendu. Sa peine est finalement commuée en galères à perpétuité. Le même mois, un serviteur de haute maison commet plusieurs vols qui font planer des soupçons sur les domestiques innocents. Il est finalement pardonné et le roi se borgne à demander de connaître les noms de ceux qui, depuis quelques temps, s’adonnent à voler à Versailles, dans les appartements.

En novembre 1688, Mademoiselle de Château-Thierry, fille d’honneur de Madame et qui avait quêté pour les pauvres, se fait voler son aumônière. Elle décide donc de donner malgré tout la somme récoltée à la cause qui lui tient à cœur. Le roi, informé, lui fait porter une paire de pendants en diamants d’une valeur de 2000 écus.

Le règne des voleurs à la tire

Au matin du 21 juin 1691, dans la galerie de Versailles, on constate la disparition des franges d’or des portières d’un lit à baldaquin. Les recherches entreprises demeurent sans résultat. Cinq ou six jours plus tard, pendant le souper du roi auquel assistait Saint-Simon, un gros paquet lancé de loin voltige dans la pièce et arrive au bout de la table, à la gauche du roi. Louis XIV tourne la tête et, sans s’émouvoir, dit : « Je pense que ce sont mes franges ». En effet, un morceau se détachant du paquet était tombé sur la perruque du roi…

Livry, premier maître d’hôtel, se précipite pour enlever le paquet lorsqu’il voit qu’un billet y est attaché. Il s’en saisit pour le lire :

" Je te rends tes franges, bon temps. La peine en passe le profit. Fais mes baise-mains au roi. "

Au mois de novembre 1698, le mariage de la duchesse de Bourgogne fait le bonheur des coupeurs de bourse. Ils débarquent à Versailles, vêtus comme des gens de qualité et volent tout ce qu’ils peuvent. Dès leur retour à Paris, plusieurs personnes se rendent compte qu’elles n’ont plus les diamants qu’elles avaient apporté pour cette fête. La duchesse de Bourgogne elle-même se rend compte qu’un voleur a coupé le morceau de sa robe où était fixée une agrafe de diamant.

En 1699, toujours à Versailles, deux individus volent du cuivre et du bronze dans les bosquets du parc. En juin suivant, on dérobe de nuit, dans la sellerie de Sa Majesté toutes les housses et caparaçons qui avaient coûté plus de 50 000 écus. Parmi les objets volés, on compte aussi des selles brodées, des fourreaux à pistoler, des mors en argent massif.

Le vol du pot de chambre du roi

Sont cités aussi, en vrac, des vols de vaisselle d’or et d’argent, des tapisseries, des meubles garnissant une chambre proche du Cabinet du roi, quasiment sous ses yeux. Enfin, on vola même au roi, sous son lit, son pot de chambre en argent…

Des perquisitions furent prescrites avec ordre de pendre l’auteur pour servir d’exemple. Les auteurs du larcin s’étant confessés, ils obtiennent l’absolution à la condition de restituer le pot de chambre de Sa Majesté, ou la somme s’il avait été vendu, ce qui était le cas. Un Franciscain s’offrit pour servir d’intermédiaire et Louis XIV empocha les cent pistoles de son pot de chambre disparu.

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