La loi sur le logement va-t-elle renforcer la ghettoïsation ?

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François Pupponi affirme que la loi sur le logement, qui sera débattue dans quelques jours à l’Assemblée, va renforcer la ghettoïsation.

Vrai-Faux : Les inquiétudes des maires de banlieue.

Des maires dont certains ont été ulcérés par le discours du président Macron, qui a présenté mardi quelques mesures en faveur des banlieues. Le député du Val d'Oise, François Pupponi, dénonce une politique incohérente. La loi sur le logement, qui arrive le 30 mai à l'Assemblée, risque de renforcer les ghettos.

"La loi ELAN, ils prennent des mesures pour ghettoïser le ghetto. Qu’on arrête de concentrer les populations les plus fragiles dans ces quartiers !"

La loi sur le logement va renforcer les ghettos. Vrai ou Faux ?

Le risque existe, oui. Cette loi veut créer un "choc d’offre" pour résoudre la pénurie de logement, en construisant plus, plus vite et moins cher. Des bailleurs sociaux vont devoir fusionner, vendre plus de logements sociaux, 40.000 chaque année, pour financer les constructions puisque l’État se désengage. Et c'est ce qui inquiète les maires des quartiers. Sur le papier, l’idée de vendre plus de HLM à leurs occupants est séduisante : cela permettrait de lancer 2 fois plus de constructions avec l'argent gagné. Mais dans les 1.500 quartiers des politiques de la ville (les QPV , qui concentre un tiers du parc HLM français), où plus de 40% des gens vivent sous le seuil de pauvreté, une poignée seulement pourront les acheter, et ceux qui le feront n’auront peut-être pas les moyens de les entretenir, ces immeubles, dont les deux tiers ont plus de 40 ans : ils risquent de se dégrader. Ensuite, la loi prévoit que s’il n’y a pas d’acheteurs, les HLM pourront être vendus en bloc à des sociétés privées, sans que le maire ait son mot à dire. Là, des marchands de sommeil pourraient arriver.

Ces mesures ne concernent pas que les quartiers sensibles, et on redoute un effet "boule de neige".

Autour des quartiers sensibles, certains des HLM vendus vont basculer dans le parc privé. C’est ce qui s'est passé pour un quart des logements sociaux vendus depuis 15 ans. Mais le texte prévoit qu'ils resteront dans les quotas de logements sociaux des villes pendant 10 ans encore, cela ne va pas inciter à de nouvelles constructions. Du coup l’offre risque de se raréfier, d’autant plus que les bureaux qui seront transformés en logements ne seront plus obligés d’inclure des logements sociaux.

Donc dans les zones tendues, autour des quartiers sensibles, il y aura moins de solutions pour accueillir les gens qu’on voudrait en sortir, justement, pour casser ces ghettos.

Le gouvernement répond que les maires se trompent, que le texte permettra au contraire de construire davantage. Mais la question du financement demeure : les territoires candidats à la vente ne seront pas forcément les mêmes que ceux qui ont besoin de construire.

Et puis de quelles constructions parle-t-on ? Pour sortir les gens des banlieues, il faut des logements très sociaux, qu'il pourront payer. Mais à Paris par exemple, depuis 15 ans, les trois quarts des HLM qui sont sortis de terre étaient pour des classes moyennes, avec des plafonds de revenu de 3.700, 5.000 euros par ménage. Si ce schéma ne change pas, c’est toujours dans les quartiers sensible que sera reléguée l’extrême précarité. Certains de maires voudraient qu’une limite soit clairement fixée dans la loi : que dans les QPV, un maximum de 50% des HLM soient attribués à des publics très fragiles.