Chaque jour, David Abiker scrute la presse papier et le web et décrypte l'actualité.
Une semelle pour écouter le terrain
Ce vendredi matin, la presse c’est un peu la carte et le territoire. La carte de France des blocages, des barrages et des points noirs, bref le mode d’emploi de ce 17 novembre en Gilet Jaune. Tandis qu’une partie de la presse géolocalise les blocages, les barrages et les filtrages, l’autre essaie encore de comprendre qui sont ces Gilets jaunes. "Un objet social non identifié" pour l’Opinion. Idem dans les Échos qui évoquent un mouvement social inédit . Un mouvement que le sommet n’a pas vu venir. Ce qui amène David Abiker à vous parler d’une innovation présentée par Le Point . C’est une semelle flexible et intelligente, à l’écoute de ce qui se passe sur le terrain, sous vos pieds. Dans la chaussure, elle transmet à votre smartphone les informations qu’elle a collectées pendant votre course ou votre marche. L’objectif c’est évidemment la santé du jogger mais imaginez que ceux qui nous gouvernent aient des semelles avec des capteurs qui leur dise ce qui se passe en bas, au ras des parquettes ? Les Anglais aurait peut-être vu arriver les conséquences politiques folles du Brexit dont il est question en Une du Figaro. La Mairie de Marseille aurait mieux mesuré l’urgence du logement indigne dont on parle ce vendredi matin dans Libération et peut-être le gouvernement aurait-il mieux anticipé ce qui va se passer demain sur le bitume.
Pour Marianne, les Gilets Jaunes sont des citoyens
"Ce peuple qui pue le diesel, un peuple méprisé par les partis, par les médias, un peuple assommé par la fiscalité", titre Marianne . Pas besoin pour l’hebdo d’aller chercher loin qui sont les gilets jaunes. C’est le peuple qui a disparu des radars (sauf de ceux qui le verbalisent), ce peuple qui s’est mobilisé via Facebook (nouveau vecteur des révoltes locales) et se rassemble sur la nouvelle place du village. Le parking. Et gare à ceux qui y voient une recomposition des extrêmes derrière leur volant. Non, ce sont des citoyens poursuit Marianne, des citoyens qui n’ont pas d’autre choix que la conduite. Et les enquêtes disent non seulement la fracture entre le politique et le terrain, elles disent aussi la fracture entre ceux qui ne porteront pas le Gilets, les urbains, CSP+ et les moins de 35 ans et puis les autres issus de milieux populaires, issus des villes moyennes ou de la campagne.
Le ras-le-bol des écharpes tricolores
Dans cette France ignorée, il n’y a pas que des conducteurs en colère, il y a aussi des maires à la Une du Monde. Les maires que Macron n’ira pas rencontrer le 22 novembre prochain au congrès des maires de France . 50% d’entre eux annoncent vouloir renoncer à leur écharpe tricolore selon l’enquête du CEVIPOF réalisée auprès de 5.000 d’entre eux . Pourquoi ? Parce que c’est trop lourd, trop dur mais aussi parce que les administrés, c’est-à-dire nous les Français nous comportons de plus en plus comme des consommateurs capricieux, exigeants et individualistes. Ces comportements égoïstes et inciviques, on les retrouve dans le Point de cette semaine qui parle non pas de guerre des Gilets Jaunes mais de guerre du bitume , une guerre provoquée par les nouveaux moyens de déplacement du bobo !
La guerre du bitume
Le Point décrit combien la cohabitation déjà complexe entre les bus, les vélos, les voitures et les scooters se compliquent avec les usagers de ces nouveaux engins . Vous prenez la révolution numérique, le déclin de la voiture en centre-ville, la montée en puissance des batteries électriques, l’extension des zones piétonnes et le fait qu’en 2050, 70% de la population mondiale vivra dans des mégalopoles. Vous obtenez les ingrédients d’un bigbang qui va générer un marché de 1.000 milliards de courses. Sauf qu’en attendant, c’est le bordel. Des accidents, des conflits de territoires et des actes inciviques en pagailles au point que souvent les piétons doivent emprunter la route pour faire de la place aux bobo-trottinettes. Pendant ce temps-là à Rennes, on expérimente le bus sans conducteur 100% électrique sur la ligne 100, nous explique ce matin Ouest France . Et des expérimentations comme ça, il y en a partout parce malgré les blocages de demain, la société est malgré tout mobile. Les usagers des trottinettes, les cyclistes, les usagers des transports électriques et demain des bus sans chauffeurs, tous ces gens-là, ils ne mettent pas de gilets verts pour dire combien la transition énergétique leur profite. C’est pourtant cette France-là que le pouvoir politique doit réconcilier avec l’autre. Et c’est pas facile. Pourquoi ? parce que la France n’est pas la Suisse.
Suisse, les pis de vache bientôt libérés.
Pourquoi parler de la Suisse ? Parce que nos amis suisses s’apprêtent à interdire les scellés sur les pis de vache. C’est quoi les scellés sur les pis de vache, le scellement des pis ça consiste à leur boucher les pis avec de la colle pour éviter l’écoulement du lait pendant les concours et les foires agricoles. En clair, c’est pour que les vaches aient de bons gros tétés. À la demande des écologistes, ça va cesser. On a ici un exemple de la synthèse parfaite entre la tradition et le progrès, on n’interdit pas l’exploitation de la vache, on n’interdit pas les concours agricoles parfois critiqués. On demande juste un petit sacrifice pour améliorer le bien-être animal. Bref, on a ici un exemple de conflit réglé dans une démocratie apaisée.