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Dider Deschamps n'entend pas ressasser les tristes évènements qu'a connu le football français depuis 2008. "Il s'est passé ce qu'il s'est passé, ça fait partie du football français. C'est indélébile mais il faut regarder devant", affirme le sélectionneur.

Didier Deschamps, sélectionneur de l'équipe de France de football

Bonjour Didier Deschamps. Est-ce qu'on est obligé d'être langue de bois quand on est sélectionneur de l'équipe de France de foot ?

"Il n'y a aucune obligation. Mais je n'ai aucune obligation de répondre à toutes les questions."

On va essayer de pas l'être quand même.

"Oui, non, mais j'y réponds. Sans y répondre, des fois. Tout dépend des questions, en réalité, les réponses peuvent être intéressantes, ça dépend beaucoup de la question donc la pression est sur vous."

Je vais essayer de m'appliquer. On est à 5 mois maintenant de la coupe du monde. Ça fait quoi, un sélectionneur en plein mois de janvier quand tous les joueurs sont accaparés par leur championnat ?

"Ça réfléchit, ça regarde les matchs évidemment pour voir les joueurs, leur évolution, parce qu'on a un match amical le 5 mars contre les Pays-Bas."

Mais honnêtement, votre liste, les 23, vous les avez à peu près en tête ?

 

"Faut que je fasse attention, je ne vais pas faire de langue de bois, mais... Tout dépend s'ils sont disponibles dans la tête mais j'en ai une vingtaine dans la tête."

L'équipe de France type, elle se rapproche de celle qui a renversé la vapeur contre l'Ukraine ?

"Ceux qui étaient là et qui étaient sur le terrain ont répondu aux attentes. Pas que ceux qui étaient sur le terrain, dans le groupe."

C'est-à-dire que Ribéry, Benzema, Valbuena, Pgba, Matuidi, Cabaye..?

"A partir du moment où ils n'ont pas de souci physique et qu'ils sont performants dans leur club, oui."

Evra, il sera du voyage, c'est déjà décidé dans votre tête ?

"Là, vous faites des cas particuliers. Si vous me dites que ce sont les 11 qui ont débuté, je crois qu'il a débuté et qu'il a joué."

Donc a priori il est sur la liste.

"Il n'y a pas d'a priori."

Le patron sur le terrain, ce sera Franck Ribéry ?

"Franck, c'est un leader technique. Il y a d'autres formes de leaderships mais lui, par ce qu'il est capable de faire et parce qu'il fait des différences et comme il fait partie des tous meilleurs mondiaux, évidemment..."

Il y a un de vos prédécesseurs qui est aujourd'hui consultant chez nous, c'est Raymond Domenech et il a une question à vous poser :

Raymond Domenech : "Didier bonjour ! Dis-moi, il y a la coupe du monde au Brésil, tout le monde le sait, on peut pas la rater. Mais il y a aussi le championnat d'Europe en France, en 2016. Est-ce que finalement, 2016 ne va pas contrarier ou influencer ton choix de la liste ? Vas-tu écarter des anciens pour mettre des jeunes, pour préparer l'Euro 2016, qui me semble capital pour l'avenir du football français. On a besoin de réussir donc ça me paraît important."

Alors, vous répondez quoi à Raymond Domenech ? La coupe du monde, c'est un tour de chauffe pour être au point à l'Euro 2016 ?

"Ça me paraît inconcevable de galvauder une coupe du monde. En plus, elle est au Brésil, mais n'importe quelle coupe du monde. On va pas à une coupe du monde pour se dire : "On se prépare pour..." C'est la plus belle compétition qui puisse exister donc..."

Il paraît que vous aimez beaucoup Claude Onesta, le sélectionneur de l'équipe de France de hand...

"Oui."

Qu'est-ce que vous aimeriez prendre chez lui ?

"Ses titres (rires). Non, j'aime bien l'homme même si je le connais pas très bien. Mais dans ce qu'il peut dire, je partage pas mal de ses avis."

Et donc, quand est-ce qu'on aura une équipe de France de foot aussi accessible et sympa que l'équipe de hand ? Vous les avez vu rentrer en début de semaine à l'aéroport : ils vont signer des autographes, ils sont sympas, hyper accessibles... On va le voir, ça, chez les Bleus ?

"C'est valable pour toutes les équipes qui gagnent. Toutes les équipes qui gagnent elles ont le sourire, elles sont accessibles et disponibles. J'ai connu ça aussi."

Alors, puisqu'on a dit qu'on faisait pas de langue de bois : ils sont quand même souvent fermés, les footballeurs de l'équipe de France, on leur a souvent reproché. Il y a une sorte de malaise entre l'opinion et eux, non ?

"Vous étiez au stade de France contre l'Ukraine ? Vous avez senti un malaise ?"

Non, mais...

"Après, que vous, vous en parliez, que ce soit écrit, qu'il y ait des sondages..."

C'est un truc de journalistes ?

"Après, je suis pas là pour faire... Mais moi, je n'ai pas ressenti ça. Après, il y a des gens qui n'aiment pas le football ou qui le détestent. Et ceux-là, on pourra rien y faire. Après, au-delà de ça, pour approfondir un petit peu, la quasi-totalité des joueurs qui sont là, mis à part Franck Ribéry et Eric Abidal, qui ont participé à la coupe du monde 2006, ils n'ont vécu que des choses négatives voire très négatives. Donc, le lien qu'ils avaient avec le maillot de l'équipe nationale n'évoque pas de souvenirs positifs. Là, ils ont en commun quelque chose de très positif : les joueurs qui décident spontanément de chanter la Marseillaise tous ensemble et d'agiter les drapeaux..."

Ça faisait tellement longtemps qu'on attendait ça...

"Oui, mais c'est l'événement, j'en reviens à ce que je vous ai dit avant : quand vous gagnez un match... Si on gagne pas un match, si on se qualifie pas, il y aurait eu des questions et je serais certainement peut-être pas là pour y répondre. Mais voilà, quand il y a victoire, forcément, tout le monde est heureux."

Cet état d'esprit, vous pensez que vous arriverez à l'emmener au Brésil ? C'est ça, ce que vous voulez ? Ça compte, dans la préparation du groupe ?

 

"Oui, oui, le maintenir dans le temps. Et arrêtons - je m'y mets dedans même si... - : c'est pas en regardant devant ce qui nous attend à la coupe du monde et à l'Euro 2016 en France, en parlant du passé, que ça va changer quelque chose. Il s'est passé ce qu'il s'est passé. C'est indélébile, ça fait partie du football français : il faut regarder devant."

Il y a un joueur qui a compté dans l'équipe de France, c'est Nicolas Anelka. Qu'est-ce que vous avez pensé de toute la séquence avec sa quenelle, tout ce qui s'est passé et s'est dit autour ?

"Ça... Je ne réagis pas à l'actualité, c'est une décision que j'ai prise dès le départ et je pense que c'est une bonne décision. Il y a tellement de choses qui sortent et là, ça dépasse le contexte sportif."

Vous attendez de vos joueurs qu'ils soient complètement irréprochables, qu'ils s'expriment pas sur ce genre de sujet ? Bon, Anelka est pas en équipe de France, a priori il sera pas au Brésil...

"Je pense qu'il a eu sa carrière en équipe de France et une très bonne période, à l'époque, quand j'y étais aussi. Il était jeune... Oui, il y a un devoir."

C'est quelque chose qui vous tenait à cœur, vous l'avez dit en arrivant.

"Je ne vais pas renier ce que j'ai dit."

En 98, vous aviez été préservés de tout ça, je crois qu'Aimé Jacquet vous laissait pas lire les journaux le matin, il n'y avait pas trop de téléphone...

"Non..."

Ah, c'est des légendes, ça ? C'était pas la vie monacale à Clairefontaine ?

"Non, on avait accès à ce qu'on voulait."

Et vous, vous allez leur fixer quelles règles, au Brésil ?

"Les interdire de quoi ? Après, il y a des règles de vie en interne. Il faudra qu'ils aient bien conscience que - allez, je suis gentil - de 7h, 7h30 le matin à minuit le soir, ce sera football, football, football. Et il va falloir avoir des ingrédients, parler, des débats, polémiques ou pas... Donc, si on peut éviter d'amener de la farine au moulin (sic), ce serait pas une mauvaise chose."

Vous ferez quoi après l'équipe de France ?

"Je sais pas. Je ferai autre chose après 2016, mais je ne sais pas quoi aujourd'hui."

Vous pensez que Zidane pourrait être celui qui pourrait vous succéder un jour ?

"Pourquoi pas ? C'est une possibilité. Il a choisi, c'est important pour lui, il a fait sa formation, il est diplômé. Il veut être sur le terrain, numéro 1, après il peut être entraîneur de club aussi."

Dernière question : on vous a quitté au stade de France avec des joueurs qui vous envoyaient en l'air et vous craigniez pour votre dos. Ça va ?

"Qu'il y en ait qui m'oublie et qui enlève les bras au dernier moment ? Oui, ça va très bien. J'espère qu'ils me feront sauter à nouveau."