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Chaque matin, Nicolas Barré, directeur de la rédaction des Échos, fait le point sur une question d'actualité économique. Aujourd'hui, il revient sur l'explosion des prix de certaines matières premières dans le monde, ce qui pourrait conduire à des pénuries alimentaires dans des pays cette année.

C’est un des multiples effets collatéraux de la crise du Covid : les prix des céréales explosent et plongent de nombreux pays dans de grandes difficultés...

"Oui les prix mondiaux de toutes grandes denrées agricoles, celles qui servent de base à l’alimentation humaine mais aussi animale, s’envolent. Blé, maïs, soja, riz... Les prix de ces produits de base sont au plus haut depuis six à sept ans. L’huile de palme, très utilisée dans toute l’Asie et avec laquelle on cuisine tout le temps, n’a jamais été aussi chère depuis dix ans. Résultat, l’indice des prix alimentaires, calculé par la FAO, l’Organisation des nations unies pour l’agriculture, est au plus haut depuis 2014. Pour des centaines de millions de gens à travers le monde, cette envolée des prix de la nourriture est une épreuve, une tragédie même. On voit apparaître des pénuries, notamment en Afrique de l’est.

Comment s’explique cette flambée des prix ?

Une grande partie de l’explication se trouve du côté de la Chine. Pour plusieurs raisons. D’abord la Chine fait le marché : elle est l’un des plus gros acheteurs de denrées agricoles, donc elle fait largement les prix. Or elle a eu de mauvaises récoltes l’an dernier donc elle a beaucoup acheté sur la fin de l’année dernière. Il faut savoir aussi que depuis les grandes famines de l’époque Mao, le régime de Pékin est obsédé par le risque de pénurie. Donc ils font des stocks. Et puis deuxième raison : en 2019 et 2020, la peste porcine a décimé les élevages de porcs. Maintenant, la Chine essaie de reconstituer son cheptel et pour cela, elle besoin de dizaines millions de tonnes de maïs et de soja pour nourrir ses bêtes. Et cela fait grimper les cours.

Et la crise du Covid aggrave le problème...

La fermeture des frontières a désorganisé les marchés agricoles. Il est devenu plus difficile d’acheminer les productions vers les lieux de consommation. Certains pays ont aussi imposé des taxes sur leurs exportations : la Russie, par exemple, taxe ses exportations de blé pour freiner l’envolée des prix du pain. Mais pour tous les pays qui dépendent du blé russe, c’est une très mauvaise nouvelle. Le résultat de tout cela, selon l’ONU, c’est que l’on va assister en 2021 à des pénuries alimentaires dans plusieurs régions du monde. Pour ces régions, avec la crise sanitaire, c’est la double peine."