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Chaque matin, Nicolas Barré fait le point sur une question d'actualité économique.

La France est un des mauvais élèves en Europe en matière de déficit et de dette publics. Est-ce grave ? De plus en plus d’économistes disent que non…

En effet, à part la Cour des comptes, qui continue d’alerter sur la dérive des comptes publics, de plus en plus d’économistes estiment que nos marges de manœuvre sont beaucoup plus larges qu’on ne le croit. Mieux : les mêmes économistes qui, il y a quelques années, s’inquiétaient du niveau de dette de la France, jugent aujourd’hui que le problème est moins grave. Car un élément fondamental change la donne et n’a pas été suffisamment intégré dans les raisonnements: c’est le fait que les taux d’intérêt sont désormais à zéro voire négatifs.

Ce qui veut dire qu’on a même intérêt à s’endetter…

Exactement. C’est la théorie par exemple d’Olivier Blanchard, l’ancien chef économiste du FMI. Il considère que tant que les taux d’intérêt sont inférieurs à la croissance -ce qui est le cas aujourd’hui : les taux sont à 0%, la croissance à 1,5%- et bien on a tout intérêt à s’endetter. À une condition quand même : que cet endettement serve à financer des dépenses d’investissement. Et on peut citer deux exemples : la transition énergétique, financer un grand plan en faveur des énergies renouvelables, ou encore, sous certaines conditions, l’éducation ou la formation professionnelle. Bref, si la dette sert à financer de vrais investissements et pas des dépenses courantes, alors, disent ces économistes de plus en plus écoutés, il ne faut pas hésiter.

Mais ces théories sont-elles adaptées au cas français ?

Bonne question ! La France est le pays où les dépenses publiques courantes sont parmi les plus élevées du monde. La logique et la bonne gestion commandent plutôt de les réduire et d’utiliser ces marges de manœuvre pour investir, plutôt que d’augmenter la dette. C’est tout le danger de la période actuelle avec des taux d’intérêt à zéro. Objectivement, cela pousse à s’endetter et il y a des besoins énormes à financer : la transition énergétique, cela représente des dizaines de milliards d’euros d’investissements. La tentation est donc grande de laisser filer la dette en se donnant bonne conscience : c’est pour préparer l’avenir. Mais en oubliant juste un détail : le stock de dette accumulé depuis des années, et qui représente l’équivalent d’une année de création de richesse, a servi en grande majorité à financer des dépenses courantes. La France n’a jamais su s’endetter uniquement pour financer des investissements. Si elle y parvenait demain, ce serait une révolution…