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EDF avance dans son projet de construction de trois paires de nouveaux EPR, les EPR2, dont il vient de soumettre le design à l’Autorité de sûreté nucléaire. Le feu vert pour leur construction, le gouvernement l’a dit, ne pourra pas intervenir avant que l’EPR de Flamanville ne soit mis en service, dans environ deux ans. Nicolas Barré fait le point sur une question d'actualité économique.

Alors que l’avenir même d’EDF fait l’objet de discussions avec Bruxelles, l’électricien français avance sur ses projets de réacteurs EPR.

Décidément, le sort fait à EDF relève de la quadrature du cercle. Obligé de se projeter sur le très long terme, de penser à un horizon de plusieurs décennies, alors même qu’il est maintenu dans l’incertitude la plus grande sur son modèle économique et sur le contour même de ses activités. La France a accepté d’ouvrir le secteur de l’électricité à la concurrence. Or cela a de multiples conséquences très lourdes pour EDF. Bruxelles considère que pour garantir une concurrence équitable, il faut séparer la production d’électricité de sa distribution. Bref, découper EDF. Et encore, parmi les activités de production, il faut distinguer le nucléaire du reste, le renouvelable et les barrages hydroélectriques, que l’Etat français ne veut absolument pas ouvrir à la concurrence.

En clair, il faut totalement réorganiser EDF.

Ce projet a un nom en interne : Hercule. Il est actuellement âprement discuté avec Bruxelles. Sachant que le gouvernement français, tout comme les syndicats d’EDF d’ailleurs, a posé une ligne rouge : pas question de remettre en cause l’intégrité du groupe EDF. Comment fait-on pour séparer le nucléaire d’un côté, les autres activités de production et la distribution sans toucher à l’intégrité du groupe : personne n’a trouvé la formule magique. Donc nous en sommes là, avec des questions fondamentales, existentielles, qui se posent pour l’avenir d’EDF. Nous n’avons pas les réponses. Nous sommes dans le brouillard. Or en même temps, EDF est obligé de penser à l’avenir, et l’avenir, à moins de renoncer à la réduction des émissions de CO2, passe par le renouvellement du parc nucléaire.

Et la construction de nouveaux EPR.

Voilà pourquoi EDF avance dans son projet de construction de trois paires de nouveaux EPR, les EPR2, dont il vient de soumettre le design à l’Autorité de sûreté nucléaire. Le feu vert pour leur construction, le gouvernement l’a dit, ne pourra pas intervenir avant que l’EPR de Flamanville ne soit mis en service, dans environ deux ans. Mais en attendant, il est crucial d’avancer pour ne pas perdre en compétence et maintenir des savoir-faire dans toute la filière. Dans les années 1970-80, âge d’or de la construction du parc français, nous savions réfléchir à long terme. Aujourd’hui, EDF doit travailler à l’avenir du nucléaire, qui est un atout majeur de notre pays, sans savoir ce que sera son propre avenir. C’est tout de même ubuesque. On chercherait à se tirer une balle dans le pied, on ne s’y prendrait pas autrement.