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Chaque matin de cette semaine, Daniel Fortin, de la rédaction des "Échos", fait le point sur une question d'actualité économique. Aujourd'hui, à l'occasion du départ du spationaute français Thomas Pesquet vers la Station spatiale internationale, il explique qu'une guerre commerciale se prépare dans l'espace.

Thomas Pesquet décolle ce vendredi matin de Floride vers la station spatiale internationale, à 11 h 49 heure française. Derrière cette mission qui passionne la France, c’est une véritable guerre commerciale qui se prépare dans l’espace...

"Oui et cette guerre se déroulera entre 400 et 1.300 kilomètres au-dessus de nos têtes, dans ce qu’on appelle l’orbite basse. C'est là que se trouve la fameuse station spatiale internationale. Celle-ci est un des symboles du conflit qui s’annonce : ses parrains, les Etats-Unis et la Russie notamment, se déchirent sur son avenir. Elle n’est plus de toute première jeunesse avec ses vingt-trois ans. Elle craque de toute part et cela coûte très cher, entre 4 et 5 milliards de dollars de maintenance chaque année.

La Russie, qui veut sa propre station, menace donc de se retirer. Mais les Etats-Unis refusent : non pas qu’ils tiennent particulièrement à cet engin un peu périmé, mais ce qu’ils veulent absolument éviter à tout prix, c’est que la Chine s’installe en majesté sur cette orbite avec leur propre station spatiale. C’est le premier acte du conflit, celui de la souveraineté.

Le deuxième ne concerne pas les Etats mais les acteurs privés...

Cela se passe toujours au même endroit, dans l’orbite basse. Cette fois-ci, ce sont les grandes fortunes mondiales qui s’affrontent. Elon Musk, le patron de Space X, veut installer 42.000 mini-satellites dans cette partie de l’espace. Jeff Bezos, le patron d’Amazon, veut de son côté en lancer 3.000. Ce sont des programmes gigantesques si on les compare au nombre de satellites actuellement en service : ils sont à peine 6.000 aujourd’hui, dont la moitié hors d’usage.

Pourquoi lancer autant d’engins ? Tout simplement pour préparer le futur monde des objets connectés. Il faudra beaucoup de relais pour brancher de plus en plus de clients à internet, pour piloter des voitures autonomes et livrer des clients par drone. Ces relais, on les appelle les méga-constellations. Tout le monde veut les siennes : les Gafa américains, bien sûr, mais aussi les Chinois.

Est-ce que l’espace peut accueillir tout le monde ?

On pourrait croire que oui mais ce n’est pas le cas. On va vite se heurter à un problème environnemental : que faire des débris spatiaux quand ces dizaines de milliers de satellites mourront ? Peut-on en lancer à l’infini alors que l’orbite basse n’est pas aussi vaste qu’on le pense ? Peut-on laisser prospérer ce qui est aujourd’hui une sorte de Far West sans véritable règle sinon celle du premier 'arrivé-premier servi' ?

On sait déjà que les Etats vont devoir réguler cette ruée vers l’or des temps modernes. C’est en tout cas une des batailles les plus passionnantes du siècle qui est en train de se préparer."