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Chaque samedi et dimanche, Nicolas Beytout, directeur du journal "L'Opinion", donne son avis sur l'actualité de la semaine.

Bonjour Nicolas, vous n’avez pas aimé qu’on reparle cette semaine de la réforme des retraites.

Oui, et plus précisément du mécanisme de la pension de réversion. Vous savez ce que c’est que la pension de réversion : ça concerne les couples mariés dont l’un des deux conjoints décède. Dans ce cas, le survivant a droit au reversement d’une partie de la pension de retraite de celui qui vient de disparaître.

Et en quoi consiste le projet de réforme ?

Il est un des aspects de la réforme plus générale des retraites, un dossier piloté par Jean-Paul Delevoye, le Haut commissaire à la réforme des retraites. Sa feuille de route, c’est l’uniformisation des régimes de retraites (il y en a 42, en France). Et donc l’uniformisation des reversions de retraites aux conjoints survivants (il y a 13 régimes différents). Par exemple, le montant de cette pension varie selon les régimes (50, 60%), tout comme par exemple les conditions dans lesquelles elle est maintenue si le conjoint survivant s’est remarié. Vous voyez, cet objectif d’uniformisation, ça va être un peu de la dentelle.

Avec, j’imagine, des gagnants et des perdants ?

Oui, comme toujours dans ce genre d’exercice. Ce qu’on sait déjà, par exemple, c’est que le Haut commissaire travaille sur une réforme qui aboutirait à bouleverser ce système. Vous allez comprendre : imaginons un couple de retraités. L’un a une pension de 2000 euros, l’autre de 4.000. Soit 6.000 au total, ou si vous voulez, 3.000 euros chacun. C’est cette somme de référence qu’il faut retenir. Elle est la clef du raisonnement. OK ?

Oui.

Si celui qui a 2.000 euros disparaît, son conjoint doit aujourd’hui recevoir la moitié de sa pension, soit 1.000 euros. Il touchera donc 4.000+1.000 euros= 5.000. Dans le prochain système, on considérerait qu’ayant déjà 4.000 euros, soit plus que les 3.000 de la somme de référence, il ne touchera rien. Plus de pension de réversion.

C’est violent… Et si c’est l’inverse, si c’est le conjoint qui recevait 4000 euros qui décède ?

L’autre qui touche 2.000 euros a droit aujourd’hui à 2.000 euros (la moitié de 4.000). Demain, il aura 1.000 euros seulement, pour arriver à la somme de référence de 3.000 euros.

Ah… Et c’est pour tout de suite ?

Non, le sujet ne doit être ouvert en grand qu’au printemps prochain. Mais au-delà de fond de la réforme, ce que je ne comprends pas, c’est qu’on ressorte ce sujet en ce moment, en plein mouvement des "gilets jaunes". Les pensions de réversion, c’est 36 milliards d’euros par an. Ça concerne un monde fou et il n’y a que des coups à prendre. Impopularité garantie ! Alors, dans un tweet, le Haut commissaire à la réforme a affirmé il y a trois jours que "la future réforme ne touchera pas ceux qui reçoivent aujourd’hui une pension de réversion, ou en percevaient une avant l’entrée en vigueur" des prochaines règles. Alors, pour ne pas être impacté par les prochains modes de calcul et toucher pleinement une pension de réversion, mon conseil : mourir avant la réforme.