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Au 26e jour de grève contre la réforme des retraites, les tensions montent entre le gouvernement et la CGT. Pour Nicolas Beytout, certains grévistes et leaders syndicaux vont trop loin, en particulier quand ils pratiquent une stratégie d'"intimidation", une méthode dénoncée par Jean-Baptiste Djebbari, le secrétaire d'État aux Transports.  

Le trafic devrait s’améliorer légèrement aujourd’hui, au 26e jour de grève, en particulier dans le métro parisien.

Il y a du mieux, en effet, ce qui n’est pas le cas, mais alors pas du tout, en ce qui concerne les relations entre le gouvernement et la CGT. Ça n’a jamais été l’amour fou, et les deux camps ne se sont pas épargnés depuis le début du conflit social, mais un cap nouveau a été franchi, hier, avec les déclarations respectives du secrétaire d’État aux Transports, Jean-Baptiste Djebbari, et du secrétaire général de la CGT, Philippe Martinez. 
Il y a même eu des noms d’oiseaux. 

"Le gouvernement organise le bordel", accuse carrément la CGT. De son côté, le secrétaire d’État est moins grossier mais tout aussi tranchant. Il dénonce les méthodes du syndicat, les actions qui "flirtent avec l’illégalité", les opérations coup de poing à destination des médias, et ce qu’il appelle "le syndicalisme d’opposition systématique". Un syndicalisme "d’intimidation", précise même Djebbari. 

"Intimidation", c’est une lourde accusation. Il y a du vrai ?

Bien sûr. Je ne pense pas seulement aux rodomontades de Philippe Martinez sur le thème "la colère monte tous les jours" : ça fait partie du folklore traditionnel dans ce genre de conflit où les grévistes promettent toujours le pire, et revendiquent par exemple un nombre de manifestants systématiquement sur-vitaminé. Disons que ça, c’est un peu la loi du genre. Ce qui est plus grave, c’est l’intimidation que pratiquent certains grévistes et leaders syndicalistes à l’égard des non-grévistes. C’est une mécanique bien connue, et que n’importe quel meneur des grandes grèves passées vous décrira complaisamment : les votes à main levée dans les assemblées générales, processus fondamentalement non-démocratique (que, en son temps, la droite avait essayé d’interdire). Les insultes (on a vu des images, on a eu des témoignages), les pressions directes entre collègues, ou même parfois sur les familles. La présentation tronquée des propositions de sortie de conflit. Il faut dire la vérité : ce genre de mouvement social de longue durée est en partie manipulé de l’intérieur.

Est-ce utile que le gouvernement le dénonce ?

Je crois que le gouvernement a compris qu’il n’y avait absolument aucune chance pour que la CGT modère son opposition à la réforme des retraites. Il a compris aussi que, si les Français sont toujours majoritairement méfiants à l’égard de son projet, ils sont une grande majorité à soutenir la disparition des régimes spéciaux. Le gouvernement essaye donc d’enfermer la CGT dans le rôle de défenseur des privilégiés des régimes spéciaux et d’agitateur politique qui "instrumentalise le conflit à des fins politiciennes". C’est l’autre face du conflit : elle n’est pas sociale mais politique, et le gouvernement ne veut pas la laisser sans réponse.