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Engagé dans "une guerre" contre le coronavirus, le gouvernement doit vivre avec l'action de syndicats et de collectifs de médecins et soignants qui l'accusent d'avoir mal anticipé la crise sanitaire. Mais derrière certaines de ses plaintes se cachent des objectifs plus politique que de santé publique. 

Depuis quelques jours, c’est un peu comme une épidémie. Les recours en justice contre la gestion par le gouvernement de la crise sanitaire se sont multipliés. 

Oui, et c’est un nouveau front qui s’ouvre devant le gouvernement. Pas un front urgent, mais une menace pour l’après-bataille sanitaire. Edouard Philippe est prévenu : il aura à subir les assauts de plusieurs plaignants qui lui reprochent, à lui comme à Agnès Buzyn et maintenant à Olivier Véran, d’avoir mal anticipé la crise sanitaire. 

Le Conseil d’Etat s’est déjà prononcé sur le recours d’un syndicat Jeunes médecins.

Effectivement. Ce syndicat voulait que le juge administratif oblige le gouvernement à verrouiller plus strictement le dispositif de confinement. Ce que le Conseil d’Etat a refusé, se contentant de demander au gouvernement d’être plus précis dans la définition des conditions dans lesquelles on peut sortir de chez soi. Ca, c’est fait depuis lundi dernier. 

Et donc, il y a maintenant d’autres recours, d’autres plaintes.

Oui, et de nature assez différente cette fois. La plainte du syndicat de médecins devant le Conseil d’Etat avait un but plus ou moins de santé publique : il s’agissait de renforcer la protection des populations, et par là même, celle des personnels de soins. Admettons.

Les autres plaintes, elles, sont fondamentalement politiques. Exemple, celle d’un collectif de 600 médecins et soignants qui veut poursuivre Edouard Philippe et Agnès Buzyn pour "mensonge d’Etat". Ils accusent le Premier ministre d’avoir tout su dès fin janvier de l’épidémie à venir, et de n’avoir rien fait. Et comme cette plainte vise l’action de ministres dans l’exercice de leurs fonctions, elle sera examinée par la Cour de Justice de la République. Rien que ça. 

Et c’est crédible ? Je veux dire : il y a un risque pour le chef du gouvernement ? 

Le plus simple, pour vous répondre, c’est de reprendre les très nombreuses déclarations des très nombreux spécialistes, médecins et scientifiques, qui ont très longtemps affirmé, avec constance, que cette épidémie "n’était pas plus dangereuse qu’une grippe", que le virus "n’était pas mortel", et "pas tellement pathogène", et qu’il faisait "moins de morts que les accidents de la route".

Et ces déclarations, elles ont été faites jusqu’à très récemment, en février et jusqu’à début mars. Et ce sont les mêmes médecins, les mêmes scientifiques qui aujourd’hui appellent au secours. Ce que ça démontre, c’est bien que personne ne savait, ou plutôt, que personne n’avait imaginé l’ampleur de la catastrophe. 

Oui, mais ça ne dispense pas forcément le gouvernement de toute responsabilité ?

C’est vrai. Mais on parle alors de sa responsabilité politique. La France n’était pas prête, elle n’avait pas assez de masques, de tests, de lits. C’est le résultat de mauvaises décisions qui ont été successivement prises par tous les gouvernements, depuis 15 ans. Bien. Mais est-ce que traîner le gouvernement devant la Cour de Justice de la République, et doubler cette démarche d’une bonne grosse pétition, ça ne fait pas grosse tambouille politicienne ? A mon avis, oui. Et vraiment, ce n’est pas le moment.