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Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce vendredi, il s'intéresse à la fronde marseillaise qui s'accentue après l'annonce des nouvelles mesures sanitaires. Marseille a d'ailleurs souhaité passer un message en organisant la conférence de presse de Michèle Rubirola et Martine Vassal au même moment que celle du Premier ministre. La maire de Marseille a par ailleurs déclaré que tout reconfinement de la ville était "inenvisageable", laissant planer la menace d’une désobéissance si Paris décidait de durcir encore la lutte contre l’épidémie.

La journée de jeudi a été marquée par une sorte de duel à distance entre Paris et Marseille.

Pour lever tout soupçon qui pourrait naître, précisons que Nicolas Beytou n’est supporter ni du PSG ni de l’OM. Simplement, il constate que l’affrontement entre les deux premières villes de France, qui avait déjà connu quelques épisodes pendant le confinement, est reparti de plus belle. Il a franchi un cran supplémentaire, on en est maintenant aux provocations.

Des provocations ? De la part de qui ?

D’abord du camp marseillais. Par exemple, la décision prise par la Maire de Marseille et la Présidente du département des Bouches-du-Rhône, Michèle Rubirola et Martine Vassal, de tenir une conférence de presse exactement au moment où le Premier ministre tenait la sienne. Ce choix n’est évidemment pas anodin, d’autant plus que la conférence à Marseille se tenait dans les locaux mêmes du Pr Raoult, lequel en a profité pour dénigrer par avance la visite que le ministre de la Santé, Olivier Véran, devait faire dans l’après-midi.

Du côté de Paris, ou plutôt du côté du gouvernement ?

Selon les élues marseillaises, le serrage de vis sanitaire (port du masque obligatoire et fermeture des bars à 23h) a été décidé sans concertation, au mépris des propositions qui avaient (auraient) été vues avec le préfet. Si c’était exact, ça relèverait effectivement de la provocation, puisqu’au contraire, les mesures sanitaires imposées aux Parisiens ont été négociées avec la mairie, avec Anne Hidalgo.

Ce qui nourrit le discours "deux poids, deux mesures" des Marseillais. Est-ce que ce n’est pas une énième résurgence de la rivalité Paris-province ? Est-ce que c’est grave ?

Ça peut le devenir. D’abord parce qu’il y a une sorte d’union sacrée des politiques marseillais contre le gouvernement central (la majorité de gauche, l’opposition républicaine, plus Jean-Luc Mélenchon qui leur a emboîté le pas), c’est un bloc contre l’autre. Ensuite, parce que ça flatte l’antagonisme classique province-Paris. Mais surtout, il y a désormais la menace d’une désobéissance si Paris décidait de durcir encore la lutte contre l’épidémie et de reconfiner la ville. La Maire de Marseille le dit sèchement : "C’est inenvisageable".  Ça veut dire que la ville refuserait d’appliquer la décision du gouvernement ? Ce serait alors une grande première. Lors d’une conversation avec Emmanuel Macron, au printemps dernier, Nicolas Beytout avait entendu le Président de la République s’inquiéter du fait que les collectivités locales et territoriales demandaient toujours plus de décentralisation, mais renvoyaient de plus en plus la responsabilité de ce qui ne fonctionne pas sur l’État central. Elles ont, disait-il en substance, pris du pouvoir mais elles n’assument pas la responsabilité qui va avec. Cette fois, c’est un peu plus préoccupant. Elles ont pris du pouvoir et elles prétendent l’exercer contre Paris. Le gouvernement aurait tort de sous-estimer le message.