Manifestation des policiers : les forces de l'ordre posent la question de l'application de la loi par les magistrats

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Une manifestation de policiers a eu lieu mercredi à Paris alors que ces forces de l'ordre ont été touchées par plusieurs attaques ces dernières semaines. Directeur du journal "L'Opinion", Nicolas Beytout estime jeudi sur Europe 1 qu'Emmanuel Macron devrait s'inquiéter de la dénonciation par les policiers du laxisme des juges.

La manifestation des policiers s’est déroulée dans le calme, et Gérald Darmanin n’a pas été chahuté...

"Non, il a été supplanté au hit-parade de l’impopularité et des sifflets par Eric Dupond-Moretti, le ministre de la Justice qui, d’ailleurs, ne s’était pas déplacé pour rencontrer les manifestants. Il avait une bonne excuse : il défendait au même instant dans l’enceinte de l’Assemblée son texte de loi sur la confiance dans l’institution judiciaire. Et ça tombait plutôt bien pour lui, parce que sinon rien ne dit que ça se serait bien passé...

La cible de la colère des policiers s’est donc déplacée...

Exactement. On pouvait s’y attendre, car en dehors des traditionnels mots d’ordre sur les demandes de moyens supplémentaires, les syndicats de policiers réclamaient 'des peines minimales pour les agresseurs des forces de l’ordre'. Et à la tribune, plusieurs policiers victimes d’agressions ont témoigné sur l’impunité quasi-totale dont ont bénéficié les auteurs de violence. Applaudissements assurés.

Le Premier ministre vient pourtant de proposer de durcir les sanctions contre les coupables de crime contre un policier ou un gendarme...

Oui et c’est vrai que l’arsenal pénal existe. Mais justement, la question pointée par les policiers est celle de l’application de la loi par les magistrats. 'Le problème de la police, c’est la justice' : cette phrase, ce slogan et ses différentes versions a été le mot d’ordre le plus scandé pendant la manifestation. C’est un fait, les relations entre police et justice sont devenues un vrai sujet. Dans un pays qui ressent comme jamais la montée de l’insécurité et de la violence, la dénonciation par la police du laxisme des juges est assurée de rencontrer un franc succès d’audience. Le chef de l’Etat ferait bien de s’en inquiéter.

Il y a justement ce projet de loi sur la confiance en discussion à l’Assemblée comme vous le notiez...

Oui mais ce sont des mots, une sorte d’incantation. En l’occurrence, le problème, ce sont les magistrats. Le Syndicat de la magistrature par exemple n’a pas hésité, mercredi, à jeter de l’huile sur le feu en dénonçant la participation de ministres et d’élus à une manifestation de policiers qui risquerait de faire de la police 'une puissance autonome'. Difficile de faire plus antagoniste.

A sa nomination, Eric Dupond-Moretti avait en filigrane sur sa feuille de route l’établissement d’un nouveau rapport de force avec les magistrats. Ceux-ci ont réagi en le traînant devant la Cour de Justice de la République. Depuis, et malgré son acharnement à mettre son nom sur une loi, on le remarque surtout dans son combat contre Marine Le Pen. A ce rythme-là, il n’y aura bientôt plus que dans les films et les romans qu’on entendra cette phrase : 'J’ai confiance dans la justice de mon pays.'"