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Le compte à rebours a commencé avant le début, lundi de ce qu’on appelle "le Ségur de l’hôpital". On sait déjà qu’une tuyauterie complexe va se mettre en place pour transférer des déficits (et donc de la dette) d’un compte à un autre. 

Exactement. Alors, avant toute chose, une précision : un "Ségur", c’est exactement comme un "Grenelle"… Oui, c’est un peu abscond. Mais voilà, depuis Mai 68, chaque crise sociale doit déboucher sur un Grenelle. C’est-à-dire sur une sorte de grand-messe, une conférence au cours de laquelle les syndicats (qui en raffolent) jouent leur rôle, le patronat le sien, et où le gouvernement arbitre et décide tout, à la fin. Le Ségur, c’est la même chose, sauf que ça concerne l’hôpital et que ça ne se déroule pas au siège du ministère du Travail, rue de Grenelle, mais à celui de la Santé, avenue de Ségur. Nuance…

Tout de même, ce sera un moment important pour la relance du plan hôpital !

Bien sûr, et sur les moyens qui vont y être consacrés. On sait déjà qu’une tuyauterie complexe va se mettre en place pour transférer des déficits (et donc de la dette) d’un compte à un autre. Sauf que, quels que soient les tuyaux, à la fin, il faut payer…

Et là, justement, qui seront les payeurs ?

C’est le sujet préféré de la classe politique française, celui sur lequel les avis sont les plus tranchés, où on retrouve les vestiges d’un bon vieux clivage gauche-droite, agrémenté d’une division entre les partis populistes et les autres. Et la vraie vedette de ce débat, c’est l’ISF. Pas un jour sans qu’une figure politique de la gauche ne réclame le retour de l’ISF. Et pas un instant sans que des économistes (de gauche, bien sûr) n’expliquent que les riches peuvent payer. Le plus emblématiques de ces fans de l’ISF, c’est Thomas Piketty. On connaissait le réflexe de Pavlov (une réaction automatique, toujours la même, à une stimulation de l’organisme). Il y aura désormais le réflexe Piketty : un problème, un ISF ; une dépense budgétaire, un ISF ; un besoin d’argent public, un ISF. De l’ISF partout. C’est simple : cet économiste-militant n’a plus que ce concept à la bouche…

 

Mais il n’est pas le seul. C’est un sujet très défendu à gauche…
Oui, avec un raisonnement limpide, là aussi : la crise sanitaire a dévasté nos finances publiques et creusé la dette. Et puisqu’il faudra rembourser, les riches peuvent payer. C’est un concept vieux comme la lutte des classes, laquelle n’a pas donné, que l’on sache, d’excellents résultats. Mais c’est égal : pour les militants de la cause ISF, une crise sanitaire, même si elle n’a rien à voir avec la répartition de la richesse, même si le capitalisme ou le libéralisme n’ont aucune responsabilité dans ce drame, c’est l’occasion de taxer les fortunes. Et tant pis si la France est déjà le pays qui taxe le plus, à la fois ses ménages et ses entreprises, celui où la redistribution est la plus forte et réduit le plus les écarts de richesse. Tant pis si ces fortunes qui obnubilent Piketty ont fondu de quelques centaines de milliards d’euros ou de dollars, avec la chute de la bourse. Puisqu’il en reste, il faut leur prendre. Ce n’est plus de l’économie, c’est de la démagogie.