EDITO - "L’Arc de Triomphe, symbole de cette France qui gagne et qui vit en paix, mais aussi de ce pays qui doute, qui se révolte"

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Chaque samedi et dimanche, Nicolas Beytout, directeur du journal "L'Opinion", donne son avis sur l'actualité de la semaine.

Tous les week-ends, vous nous dites ce que vous avez aimé et ce que vous n’avez pas aimé de la semaine. Mais pour le dernier week-end de l’année, vous avez choisi nous dire ce que vous avez aimé en 2018. Et pour vous, c’est une image qui symbolise le meilleur de l’actualité française. Celle de l ‘Arc de Triomphe.

Absolument, je crois que ce monument peut à merveille résumer les moments les plus forts de 2018. Un Arc de Triomphe, dans l’histoire de l’Antiquité, c’est le lieu où se fête une victoire des armées et la paix retrouvée. Et c’est là que s’est déroulée le 11 Novembre dernier la commémoration du centième anniversaire de la fin de la guerre de 14-18. Cette image de l’Arc de Triomphe, c’est celle des chefs d’État des pays les plus puissants du monde et de toutes les Nations qui avaient été déchirées par une des guerres les plus meurtrières de l’histoire, tous réunis devant la flamme du tombeau du soldat inconnu.

Voir tous ces dirigeants rassemblés-là, à un moment où le monde danse sur un volcan, où les nationalismes s’exacerbent, où les tensions s’avivent aux frontières de différents États, y compris tout près de chez nous, voir ce spectacle de paix était un utile rappel de ce que les peuples ont à perdre lorsqu’ils se font la guerre.

L’Arc de Triomphe, c’est aussi le lieu symbolique où la France a fêté sa victoire à la Coupe du monde de foot…

Oui, c’est le lieu de rassemblement d’une foule innombrable qui vient partager sa joie d’avoir remporté une deuxième étoile. On a tous en tête ces images, et le souvenir que, comme vingt ans auparavant, quelque chose avait changé dans la tête des Français. Le moral était ce soir-là au beau fixe, le pays sortait d’une épreuve sociale assez longue et pénible (les grèves à répétition des cheminots contre la réforme de la SNCF). On allait donc en profiter de cette victoire, et l’économie française avait devant elle un cycle de croissance bienvenu.

Enfin, un certain nombre d’indicateurs pouvaient s’aligner dans le bon sens. Mais patatras, deux jours plus tard, une vidéo va tout gâcher… C’est le début de l’affaire Benalla…

Exactement. A peine les lampions de la fête étaient-ils éteints que l’actualité basculait dans cette affaire de collaborateur de l’Élysée qui est filmé en train de tabasser un manifestant. Les images datent, elles ont été filmées six semaines auparavant, mais elles ne sortent qu’à ce moment-là. C’est le début d’un scandale, le début d’une longue séquence qui va fragiliser Emmanuel Macron et tout le pouvoir.

Les oppositions, celle de droite comme celle de gauche, trouvent enfin cet angle d’attaque qu’elles peinaient à identifier depuis leur défaite électorale de 2017. En face, l’Elysée et la majorité En Marche sont pétrifiés, se défendent lamentablement, expliquent qu’Alexandre Benalla a été sanctionné pour ces dérapages. Pas de chance, on découvre d’autres images dans lesquelles le même Benalla, soit-disant sanctionné, figure parmi les joueurs de l’équipe de France lorsqu’ils passent devant l’Arc de Triomphe, dans le bus qui les conduit vers l’Élysée où Emmanuel Macron doit fêter avec eux leur victoire.

C’est vrai, cet Arc de Triomphe est là, sur les images… Un peu comme un symbole de ces deux jours, entre la Coupe du monde un dimanche de Juillet, et le début de la crise de la macronie, deux jours plus tard.

Ce même Arc de Triomphe qui abritera ensuite cette cérémonie historique du 11 Novembre, et qui sera ensuite vandalisé, deux semaines plus tard, par les casseurs lors des manifestations des Gilets jaunes. L’Arc de Triomphe, symbole de cette France qui gagne et qui vit en paix, mais aussi de ce pays qui doute, qui se révolte, et qui entre dans une des crises les plus inquiétantes de ces dernières années. Mais cet aspect-là des choses, on en parle demain. On retrouvera l’Arc de Triomphe, et je vous dirai ce que je n’ai pas aimé, en cette année 2018.