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Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce mercredi, il s'intéresse à la campagne présidentielle qui va être chamboulée par la cinquième vague de la pandémie.

Le gouvernement a donc décidé d’accélérer l’adoption du projet de pass vaccinal. Ce sera fait lundi prochain.
Oui, en fait, tout a changé depuis deux ou trois jours. La montée en puissance très rapide du variant omicron, mais aussi les décisions de restriction ou même de confinement prises par d’autres pays comme l’Allemagne ou les Pays-Bas, tout poussait notre gouvernement à réagir pour ne pas être pris en défaut de sous-évaluation des risques.

Songez que mercredi dernier (c’était il y a une semaine seulement, c’était … hier) Emmanuel Macron déclarait, lors de sa grande émission sur TF1 : « Nous sommes sans doute à un pic ou un plateau ». Mais aujourd’hui, changement total d’ambiance, avec le pass vaccinal, avec l’éventualité d’un pass sanitaire dans les entreprises, avec la vaccination des enfants et les nombreuses recommandations de prudence pour la période des fêtes.

Sans compter, pour emballer tout ça, une nouvelle petite musique diffusée par les ministres (par exemple Gabriel Attal qui explique que le gouvernement « n’exclut pas d’aller au-delà des mesures en vigueur »). On ressort les blouses blanches sur les plateaux de télévision, et l’info sur le Covid reprend sa place à la une des médias.

Ce qui a bien sûr des conséquences sur le reste de l’information. En particulier à l’actu politique.

Qui est, vous avez raison, directement impactée par ce retour en force de l’actu Covid. Et ça va avoir des conséquences concrètes sur la campagne électorale. Une vie sous contrainte, sans grand rassemblement et en limitant les contacts sociaux, ça signifie d’abord pas de grand meeting.

On verra ce que nous réserve la suite des événements sanitaires, mais le grand meeting d’Eric Zemmour pourrait avoir été le premier et le dernier avant février ou mars. Pas de grand meeting et donc pas de possibilité de montrer des images d’enthousiasme, de mobilisation, de ferveur militante. On prête souvent trop de vertus aux meetings, mais ils sont malgré tout un bon capteur de la dynamique d’une campagne. Cette fois, on risque de devoir s’en passer. Même difficulté avec le porte-à-porte, pas très « geste barrière », ou avec la distribution de tracts sur les marchés. Tout ça va peser lourd sur la campagne électorale.

Est-ce que ça peut en changer le sens ?

Absolument. Une campagne électorale (et c’est en partie pour cette raison qu’elle est toujours imprévisible) une campagne à la fois impose son actualité et se nourrit des sujets de l’actualité. C’est une sorte de dialogue permanent. L’automne et toute la pré-campagne ont été dominés par les sujets d’immigration et de sécurité. Il est possible, avec le Covid, que le sanitaire, la santé, le social, reprennent le devant de la scène.

Et si c’est le cas, ce ne sera plus du tout la même campagne. Ça changera les angles, ça changera l’attente des Français, et ça peut rebattre les cartes entre les différents candidats. Par exemple, avec cette vague Covid agressive, Emmanuel Macron va retrouver son rôle de chef de guerre contre le virus et de protecteur. Un rôle que les Français lui reconnaissent avoir plutôt bien tenu (après le ratage des débuts). C’est lui qui a le carnet de chèques, c’est lui qui peut conserver le plus longtemps possible ses habits de Président de la République. Plus besoin pour lui de se déclarer trop tôt candidat.

Et pour les autres concurrents sur la ligne de départ ?

Ils subiront les mêmes contraintes sur le déroulé de leur campagne, et ils mettront sûrement eux aussi l’accent sur le social et le sanitaire, et sur la survie de l’économie. Mais ils pourront exploiter la moindre faille du dispositif gouvernemental, les interrogations autour de la stratégie vaccinale ou la question du vaccin des enfants. Autant de chausse-trapes pour le pouvoir. Et puis il y a ceux qui sont d’ores et déjà les grands perdants de l’affaire. Je pense par exemple à Nicolas Dupont-Aignan, le président de Debout La France, qui s’est enfoncé dans un refus du vaccin et un déni de la maladie. Ses troupes le quittent. Le Covid est en train de le tuer, politiquement.