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Chaque matin, Nicolas Beytout analyse l'actualité politique et nous livre son opinion. Ce mercredi, il s'étonne que la gestion des finances publiques ne soit pas davantage un sujet de la campagne présidentielle. Selon lui, elle deviendra vite une de ses principales préoccupations.

L’Assemblée nationale devrait adopter dans la journée le dernier budget du quinquennat.

Avec une augmentation des dépenses et de la dette publiques dans des proportions une fois de plus inquiétantes. Ce qui maintiendra la France dans la catégorie des mauvais élèves de l’Europe, à la fois pour son déficit, pour le niveau de son endettement et pour la pression exercée par les impôts. Naturellement, tout ça est largement dû à l’effet cataclysmique de la crise Covid et à la décision incroyable prise par Emmanuel Macron (mais c’était la seule qu’il fallait prendre) : mettre le pays totalement à l’arrêt, puis le contraindre à ne se rouvrir que partiellement.

Cette politique du « quoi qu’il en coûte » a mobilisé 100 milliards d’euros, un chiffre tellement gigantesque qu’on a peine à le matérialiser. Et si c’est grâce à cet argent public que notre économie a pu tenir et que l’emploi ne s’est pas effondré, ce rythme, cette politique de l’argent facile ne pourra pas tenir indéfiniment.

D’ailleurs, il y a de bonnes chances pour que ce budget, qui sera voté tout à l’heure par l’Assemblée, ne soit pas appliqué, qu’il devienne lettre morte dès cet été.

Après les élections présidentielle et législatives ?

Exactement. Pour l’instant, le sujet de la dépense publique et de la dette n’est quasiment pas entré dans les thèmes de campagne. Les affrontements se sont essentiellement déroulés autour des problèmes d’immigration, de frontières, de sécurité. Eric Zemmour a réussi à imposer ces thématiques sur la scène publique, et elles ont chassé les autres dossiers, en particulier économiques et sociaux.

Il n’y a guère qu’au cours des débats télévisés entre les cinq candidats à la primaire de la droite républicaine qu’on en a (un peu) entendu parler. Mais sur un mode assez soft. Valérie Pécresse a bien proposé de supprimer 150.000 postes de fonctionnaires sur un quinquennat, si elle est élue. Mais, ce qui est notable, c’est que jusque-là, ça n’a provoqué aucune véritable contre-attaque des autres formations politiques. La plupart des candidats déclarés semblent s’en moquer comme d’une guigne (et donc ils préfèrent ignorer ce sujet).

Et lorsque La République en Marche s’exprime sur ce thème, c’est pour accuser la candidate de la droite de promettre « une politique de la hache ». Autrement dit, pour défendre (en creux) l’idée qu’avec Emmanuel Macron réélu, il n’y aurait pas de suppression de postes dans la fonction publique.

Et ce n’est pas crédible ?

Non. On est au bout de la logique de la dépense « quoi qu’il en coûte » et de la dette publique. Et la seule chose qu’on peut espérer, c’est que ce débat occupe une partie de la campagne électorale. On a besoin de confronter les projets des différents candidats, de les évaluer et de les faire entrer dans la grille de choix des Français. Parce que, quel que soit le ou la vainqueur en Avril prochain, Emmanuel Macron, Valérie Pécresse et même Marine Le Pen (bref l’un des trois concurrents aujourd’hui en position d’être au second tour), la gestion des finances publiques deviendra vite une de ses principales préoccupations. Je le redis, le rythme actuel est intenable, et si personne ne s’empare du sujet chez nous, nos créanciers ne tarderont pas à la faire. D’ailleurs, dès cet été, il y a de bonnes chances pour que la trajectoire du budget, telle qu’elle est votée aujourd’hui, soit modifiée.
Même si Emmanuel Macron est réélu ? Il modifiera ce qu’il est en passe de faire voter pas sa majorité ?

C’est vraisemblable, oui. D’abord, la probabilité est forte que nous ayons tout de suite une réforme des retraites. Et pour ce qui est du budget lui-même, le Président réélu devra vraisemblablement l’adapter à ce qui sera ressorti de la campagne. Pour l’instant, on promet de dépenser en prévision de l’élection. Après, il faudra bien finir par faire les comptes.