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On a appris hier que la conférence de presse d’Edouard Philippe, dimanche soir, a été suivie par 7 millions de téléspectateurs, sur TF1 et France 2. Un très bon score qui montre à quel point les Français sont en recherche d’informations sur la maladie elle-même, et sur la sortie du confinement, naturellement. La courbe d’audience a d’ailleurs été très stable, probablement à cause du teasing réalisé par le Premier ministre.

Édouard Philippe a habilement annoncé en début de conférence de presse qu’il donnerait des infos sur le déconfinement… à la fin de son intervention…

Voilà. Sauf qu’on n’a eu aucune information, que des suppositions, des hypothèses. Le reste de la conférence (2h1/4) n’a été qu’un résumé de ce qu’on savait déjà, de ce qu’on ne savait toujours pas, et bien sûr des indispensables gestes barrières. Alors, je sais bien que cette crise, totalement mystérieuse à beaucoup d’égards, demande beaucoup de pédagogie, et que la répétition des messages permet de les faire entrer dans les réflexes des Français, mais tout de même. Avec cette conférence-fleuve, on était dans la caricature de la politique du tableau noir. Et d’autant plus qu’il y avait un grand absent, dans cette conférence…
Un absent parmi les intervenants ? Ils étaient pourtant nombreux…

Oui, très nombreux : ministre de la Santé, Directeur Général de la Santé et une médecin-chercheur de Lyon, très claire, d’ailleurs. Mais personne pour l’aspect économique des choses. On le sait pourtant depuis le début, cette épidémie catastrophique du coronavirus a provoqué une double crise : sanitaire, bien sûr, et économique avec le confinement de la moitié de la planète. Or, cet aspect-là des choses a été expédié par le Premier ministre, en quelques chiffres rappelant toutes les aides que l’Etat avait mises en place. Elles sont bienvenues, ces aides, évidemment. Mais elles ne sont pas à elles seules l’ensemble du sujet. En particulier, quand on sortira du confinement, il faudra relancer la machine économique. Comment, à quel rythme, avec quels moyens, quelles cibles ? C’est tout cela qu’il faut dessiner maintenant…

Sauf qu’Edouard Philippe a bien expliqué que beaucoup d’incertitudes pesaient encore lourd…

Mais ça n’empêche pas de poser les termes de l’équation. En fait, tout se passe comme si, depuis le début de cet enfermement volontaire, on avait décidé que l’humain écrasait tout, que le fameux « quoi qu’il en coûte » d’Emmanuel Macron avait ôté tout argument à ceux qui n’oublient pas qu’il faudra bien, un jour, relancer l’économie. Dans une interview vidéo passionnante qu’il vient d’accorder au Financial Times, Emmanuel Macron explique que cette crise montre que « l’économie n’a plus le primat sur l’humain, que l’humain est redevenu quelque chose de supérieur à l’ordre économique ». On l’a compris, aujourd’hui, c’est l’exigence de sûreté qui domine tout. Pas de risque, pas de négation du primat de la santé. OK, mais jusqu’où faudra-t-il mettre l’économie, les emplois, le pouvoir d’achat, les entreprises en risque, pour que l’humain soit totalement préservé. Ce débat n’a pas eu lieu. Il faudra absolument l’ouvrir au moment du déconfinement.