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Chaque matin, Alain Cirou nous explique en détails un évènement scientifique.

Pas besoin d’aller au bout du monde pour faire de la science, il suffit parfois de se pencher pour faire des découvertes ! C’est la conclusion d’une étude qui vient de paraître dans le cadre d’un programme du CNRS. Où l’on découvre qu’il existe un monde d’une étonnante diversité dans les caniveaux parisiens.

Débute par une observation faite dans la capitale : la couleur de l’eau des caniveaux est parfois marron, parfois verte + apparitions de petites bulles qui, souvent, témoignent d’une activité biologique.

Les chercheurs du laboratoire Biologie des organismes et des écosystèmes aquatiques ont pris une pipette, une brosse à dent. Ont prélevé de l’eau et gratté au fond des caniveaux d’une centaine de rues dans tous les arrondissements de Paris et analysé le biofilm (les organismes qui sont accrochés au fond) au niveau moléculaire.

Et là, surprise ! Ils ont découvert une vie microbienne insoupçonnée avec des micro-algues, des champignons, des mollusques, en tout plus de 6.900 espèces potentielles d’eucaryotes c’est-à-dire des organismes unicellulaires ou pluricellulaires.

Les chercheurs ne s’attendaient pas du tout à ça ?

Absolument pas ! C’est une étonnante biodiversité urbaine qui s’est dévoilée là. Aussi bien en terme de quantité que de variété.

Mais la surprise ne s’arrête pas là ! Le plus étonnant c’est que, si on change de caniveau, celui de la rue d’en face par exemple, on ne trouve pas la même diversité. C’est différent !

En fait, dans les rues de Paris qui comptent 3.000 kilomètres de caniveaux, il existe des écosystèmes très nombreux qui se côtoient. Et on ne comprend pas l’origine de cette diversité qui n’a rien à voir avec celle des égouts qui sont sans lumière, sans soleil, sans photosynthèse.

Sait-on quel rôle joue cet écosystème urbain ?

On ne sait pas très bien mais on peut imaginer que cet écosystème majoritairement composé de micro algues brunes, du groupe des diatomées, se nourrit de nos déchets. Des rejets de la ville.

Les déchets des hommes mais aussi des déchets organiques, des polluants comme les gaz d’échappement, les huiles moteurs, etc… Tout ce petit monde-là vit dans l’eau non potable, est spécifique à ce milieu (on ne les trouvent pas dans l’eau potable), et participe peut-être à la purification de l’eau de la rue, à la manière de micro-stations d’épuration.

Aussi surprenant que cela puisse paraître personne s’était jusqu’alors penché sur cette « écologie de caniveau » ! On ne trouve pas d’étude comparable ailleurs et les chercheurs vont sans doute regarder ce qui se passe dans d’autres villes, sous d’autres climats et à d’autres saisons.

C’est un nouveau thème qui apparaît : celui de la biodiversité urbaine. On la connaissait déjà pour la faune (avec les oiseaux, les renards, les rats par exemple) mais pour les micro-organismes elle reste à découvrir et à comprendre.

Et un message pour ceux qui cherchent la vie dans l’Univers : sur Terre il n’y a aucun milieu qu’elle n’ait pas colonisé !