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SAISON 2020 - 2021

C'est une princesse, une intellectuelle et une pionnière. Psychanalyste, elle a contribué à diffuser le travail de Freud en France. Dans ce nouvel épisode du podcast Europe 1 Studio "Au cœur de l’Histoire", Jean des Cars raconte le parcours de Marie Bonaparte, arrière-petite nièce de Napoléon et princesse de Grèce.

Saviez-vous que l'arrière-petite nièce de l'​empereur Napoléon Bonaparte a connu un destin singulier ? Dans ce nouvel épisode du podcast Europe 1 Studio "Au cœur de l'histoire", Jean des Cars raconte la jeunesse et le mariage compliqué de Marie Bonaparte​, avant ​l'événement qui va changer sa vie : sa rencontre avec le psychanalyste Sigmund Freud.

En septembre 1906, à Paris, le prince Roland Bonaparte donne un grand déjeuner dans le somptueux hôtel particulier qu’il a fait construire au 10 avenue d’Iéna, sur la colline de Chaillot, surplombant la Seine et le Champ de Mars. Le prince Roland vit dans la légende napoléonienne, entouré de tableaux, de mobilier et d’objets de style Empire. Ce déjeuner est offert en l’honneur du roi Georges 1er de Grèce, de passage à Paris. Si ce descendant de Lucien Bonaparte reçoit le "Roi des Hellènes", c’est parce qu’il y a un projet de mariage entre sa fille Marie et le deuxième fils du roi, le prince Georges de Grèce. 

Roland Bonaparte a de grandes ambitions pour sa fille. Elle a 24 ans. C’est une riche héritière. Pour elle, il a envisagé plusieurs partis prestigieux : le prince Hermann de Saxe-Weimar et le prince Louis de Monaco. Mais l’idée de ce mariage grec a été suggérée à l’Ambassadeur du pays à Paris. Roland a déjà reçu une fois à déjeuner deux des frères du prince Georges, le diadoque Constantin, l’héritier, et le prince Nicolas. Cette-fois, les choses se concrétisent puisque c’est le roi lui-même qui vient rencontrer sa potentielle future belle-fille. C’est un déjeuner de cinquante couverts. Marie est assise à la droite du souverain et elle écrira dans son journal :"Il me plaît, il me charme, c’est un des hommes les plus séduisants que j’ai jamais vu."

Mais lorsqu’après le déjeuner, son père lui annonce qu’il l’accepte comme belle-fille, Marie s’affole. Elle répète qu’elle ne veut pas quitter Paris. Elle est terrorisée à l’idée de se séparer de ce père qui domine toute sa vie car sa mère est morte un mois après sa naissance. Mais ce dernier réussit à la convaincre. Elle renonce à son habituel séjour en Touraine en juillet pour être présente à Paris le 19 juillet 1907. C’est une journée torride. Le diadoque Constantin et le prince Georges de Grèce se rendent avenue d’Iéna à 4 heures de l’après-midi. Marie fait la connaissance de son futur fiancé. Elle nous le décrit :"Élancé, blond, avec une longue moustache blonde comme son père, un nez droit, des yeux bleu de ciel qui sourient. Peu de cheveux seulement, il est chauve. Qu’importe ! Il est grand, beau, blond et surtout il semble si bon, si bon."

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Marie, que tout le monde appelle Mimi, parle deux heures avec lui et le trouve charmant. Le lendemain, le prince lui fait livrer une brassée d’orchidées. Les fiançailles sont décidées. Marie va épouser le deuxième fils du Roi de Grèce. Il est né à Corfou en 1869. C’est un marin. Il a suivi les cours de l’Ecole Navale de Copenhague. En 1891, il avait accompagné son cousin, le tsarévitch Nicolas, le futur tsar Nicolas II, dans son voyage autour du monde comme lieutenant de vaisseau dans la Marine Russe. Lors de leur escale au Japon, alors qu’ils visitaient Otsu, près de Kyoto, le tsarévitch et sa suite se déplaçaient en pousse-pousse. Un policier japonais assurant sa garde sort son épée, se rue sur Nicolas et le frappe à la tête. Georges, dont le pousse-pousse suivait celui de son cousin, se précipite et assomme l’agresseur avec sa canne. Il a sauvé la vie du futur tsar qui n’est que légèrement blessé à la tête et au cou. Après ce voyage, Georges a regagné son pays où son père Georges 1er est le deuxième monarque de la Grèce nouvellement indépendante. Le premier, Othon 1er, un Bavarois de la dynastie des Wittelsbach, oncle de Sissi, avait abdiqué devant la difficulté de la tâche. 

Georges 1er est un prince de Danemark. Il est le fils de Christian IV. C’était l’époque où l’on distribuait parfois aux cadets de familles les nouvelles monarchies issues de l’ancien Empire Ottoman. Le prince Georges était devenu en 1897  Haut-Commissaire pour administrer la Crète devenue autonome, mais il l’administrait tout de même au nom du Sultan. La tâche était difficile car la situation était ambiguë. Son ministre de la Justice, Venizélos, voulait le rattachement de la Crète à la Grèce continentale alors que Georges voulait une Crète indépendante. C’est Venizélos qui l’emporta : la Crète a été rattachée à la Grèce et Georges a été obligé de démissionner. C’est son grand échec. Il est découragé. Marie va donc épouser un prince de 37 ans (il a 13 ans de plus qu’elle), désabusé et blessé par son échec politique. Mais elle est émue par la situation dont il lui a parlé, ce qui la rapproche encore plus de lui. Les fiançailles sont annoncées le 30 août 1907. 

Le mariage a lieu quatre mois plus tard à Athènes. Marie a été accueillie au Pirée par toute la famille royale, le roi Georges, son épouse Olga, descendante directe du tsar Nicolas 1er de Russie, sa belle-soeur Hélène, elle aussi grande-duchesse russe épouse de Nicolas et Alice, une belle blonde totalement sourde, l’épouse d’André. C’est une Battenberg, une branche des Hesse-Darmstadt. Quant au diadoque Constantin, il a épousé Sophie de Prusse. Impressionnants, tous ces mariages au sommet du Gotha… Mais Marie n’est pas déstabilisée, elle est Bonaparte, ce n’est pas rien, et de loin la plus riche !

Mais le personnage qui intrigue le plus Marie est le prince Valdemar de Danemark dont son fiancé lui a tant parlé. C’est son mentor. C’est lui qui l’avait accueilli au Danemark lorsqu’il était venu faire ses études. Il a 10 ans de plus que Georges et il est amiral de la Flotte danoise. Il est très aimable avec Marie et elle s’en réjouit car elle sait combien il compte dans la vie de son futur époux.

La cérémonie a lieu selon le rite orthodoxe. Sur les photos, Marie est très belle et semble épanouie. Son mari, digne, sanglé dans son uniforme, est beaucoup plus grand qu’elle. Le soir, un grand banquet est donné pour tous les notables d’Athènes. Marie est heureuse, incontestablement amoureuse du prince Georges, mais quand il vient la rejoindre le soir de leurs noces, il sort de chez son oncle Valdemar, comme s’il était allé chercher un encouragement. Marie raconte la suite de sa manière crue de future psychanalyste :"Tu me pris ce soir-là, d’un geste court, brutal, comme t’y forçant toi-même et t’excusant "je hais cela autant que toi mais il faut bien si l’on veut des enfants"." Ce n’est pas vraiment romantique ! Mais qui est cette aristocrate "sans filtre" ? 

Des Bonaparte, pas des Napoléon…

Pour comprendre Marie Bonaparte et ses manques affectifs, il faut évidemment se pencher sur son père, le prince Roland Bonaparte. Il est le petit-fils de Lucien, troisième de la fratrie Bonaparte après Joseph et Napoléon. Lucien était le plus doué des frères de Napoléon. Comme lui, il avait fait l'École militaire de Brienne, il a joué un rôle capital lors du coup d’Etat du 18 Brumaire. Pour le récompenser, Napoléon, Premier Consul, l’a d’abord nommé ministre de l’Intérieur puis ambassadeur à Madrid. Mais son opposition au pouvoir de plus en plus autoritaire de son frère et surtout son remariage, jugé peu glorieux, avec une veuve d’agent de change, avaient entraîné la rupture avec Napoléon. Lucien refuse les couronnes d’Italie et d’Espagne et se retire à Rome en 1804. Il est prisonnier des Anglais de 1810 à 1814 après une tentative de départ pour l’Amérique. Après Waterloo, il retourne s’installer en Italie, dans sa Principauté de Canino, près de Viterbe. De son deuxième mariage, il avait eu trois fils. C’est le dernier qui nous intéresse, Pierre-Napoléon Bonaparte, le père de Roland.

Pierre Bonaparte était un ardent libéral. Élu député d’extrême gauche en 1848, il n’accepte pas le coup d’Etat de son cousin Louis-Napoléon le 2 décembre 1852. Il se retire de la vie publique. Sa petite-fille, Marie, saura s’en souvenir. Bien plus tard, elle écrira : "Si jamais quelqu’un écrit ma vie, qu’il l’intitule "la dernière Bonaparte" car je le suis. Mes cousins de la branche impériale ne sont que Napoléon."

Pierre rencontre une certaine Justine Ruflin, qu’il appelle "Nina". Elle est de très modeste origine : son père est ouvrier fondeur. Ils se marient secrètement et en 1858 un fils naît, Roland, le futur père de Marie. Après des études à Saint-Cyr, il épouse Marie-Félix Blanc, l’une des plus riches héritières d’Europe, la fille cadette du propriétaire de la Société des Bains de Mer et du Casino de Monte-Carlo ! Quelques jours avant le mariage, il achète une grande maison entourée d’un vaste parc sur la colline de Saint-Cloud. C’est là que va s’installer le jeune couple en compagnie de la redoutable Nina. Marie-Félix va vite déchanter. Elle avait toujours été entourée de gens affectueux et aimants. Dans cette maison loin de Paris, elle se retrouve perdue dans un univers qui lui est étranger. Elle aime lire les poètes en français et en allemand, elle apprécie la musique, mais sa belle-mère et son mari tentent de la dissuader de ses occupations futiles. 

Pour ne rien arranger Marie-Félix est tuberculeuse, crache souvent du sang. Mais on se contente de dire qu’elle a des "granulations dans la gorge". Malgré sa mauvaise santé, elle découvre qu’elle est enceinte. Roland et sa mère montrent alors leurs véritables visages et leur rapacité. Arrivée au milieu de sa grossesse, ils lui font signer un testament. La princesse déclare vouloir donner à son mari, le prince Roland Bonaparte, une preuve de son attachement en lui léguant en toute propriété la totalité de sa fortune. Elle ajoute qu’au cas où elle laisserait des enfants de leur mariage, elle léguerait à son mari tout ce dont la Loi lui permettait de disposer en sa faveur. Bien des années plus tard, Marie Bonaparte expliquera :"En l’absence de testament, j’eusse hérité seule de toute la fortune maternelle. Mon père, mon tuteur légal n’ayant alors eu droit qu’à la jouissance de mes revenus jusqu’à mes dix-huit ans révolus."

La jeunesse difficile de Marie Bonaparte

La princesse Roland Bonaparte accouche dans la villa de Saint-Cloud le 2 juillet 1882 d’une petite fille : Marie. Elle fait installer le berceau dans sa chambre. Les quatre semaines qu’elle va passer avec elle ont certainement été les plus heureuses de sa courte vie. Elle ne se lasse pas de contempler et d’embrasser cet enfant, mais elle est très mal. Le 1er août suivant, elle meurt d’une embolie. Désormais, Roland Bonaparte et sa mère vont veiller seuls la petite princesse surnommée Mimi. 

Roland, ce fils et petit-fils de rebelle, va hériter de son épouse. Désormais, il est immensément riche. Quelle revanche ! Trois ans plus tard, en 1885, le trio quitte Saint-Cloud pour s’installer dans une maison de style Renaissance construite au début du siècle par la comédienne Mlle Mars sur le Cours la Reine. Mimi y passe une enfance très solitaire. Les seules visites qu’elle reçoit sont celles de sa tante, Jeanne, la soeur de son père. En 1886, on lui découvre une tuberculose bénigne. A partir de là, elle va être traitée comme une invalide. Elle-même se persuade qu’elle est menacée de tuberculose et qu’elle mourra jeune, comme sa mère. En 1887, un séjour à San Remo lui révèle la Méditerranée, le soleil, les orangers et les pins, un bonheur total. Le retour à Paris n’en est que plus difficile. 

Le prince Roland est, en réalité, un homme frustré et malheureux. En se mariant, il espérait se faire une place dans la société mais l’argent de son épouse ne l’avait pas aidé. Il consacrait son temps libre aux études et particulièrement à l’anthropologie. Il publie un ouvrage intitulé "les habitants de Surinam", il voyage en Laponie et publie un album de cent photographies qu’il a prises. Mimi aussi est malheureuse, souffrant d’absence de chaleur et d’amour. Heureusement, elle a beaucoup d’imagination, elle se met à écrire des cahiers à l’âge de 8 ans, cinq gros carnets qui portent le titre de "Bêtises".  Comme elle se méfie de son entourage, elle les écrit en anglais ou en allemand. Plus tard, la psychanalyse lui permettra de décrypter ces cahiers et l’étrange atmosphère de la maison où elle vivait, les querelles de domestiques, les amours ancillaires dont elle est témoin. On la promène au Bois de Boulogne, elle va de temps en temps à Saint-Cloud, c’est ce qu’elle préfère, elle adore le parc et ses pelouses, les grands arbres et les animaux domestiques comme la chèvre du jardinier dont elle boit le lait. Saint-Cloud est une sorte de paradis, elle y restera attachée toute sa vie. 

Marie est dominée par un père distant et une grand-mère tyrannique. Ceux-ci sont athées mais ils jugent que si on veut la marier plus tard, elle doit avoir une éducation catholique. Elle attend ses leçons de catéchisme du mardi avec impatience. Elle fait sa première communion dans l’exaltation sous l'œil indifférent de son père et de sa grand-mère. Elle a évidemment  une succession de gouvernantes plus ou moins compétentes. En avril 1896, c’est le grand déménagement à Paris dans un hôtel flambant neuf avenue d’Iéna. Son père dispose enfin d’une immense bibliothèque dans laquelle il passe une grande partie de son temps. Les magnifiques proportions de la nouvelle demeure des Bonaparte ne rendent pas la vie de famille plus chaleureuse. Une photo montre la grand-mère, le père et Marie assis naturellement dans des fauteuils Empire sous un portrait en pied de Napoléon Ier. Tous trois ont l’air sinistre, écrasés par le poids de l’illustre ancêtre. Deux ans plus tard, on estime qu’il est temps que Marie soit présentée à la famille. Avec sa grand-mère, elle se rend chez la princesse Mathilde qui reçoit dans ses salons des écrivains célèbres. On la présente aussi à l’impératrice Eugénie lors d’un de ses passages à Paris. Marie n’aime pas ces visites, elle sent bien que son père est une sorte de paria pour le reste des Bonaparte.

L’année suivante, pour faire cesser les rumeurs circulant dans Paris, Roland et Nina veulent prouver que Mimi n’est pas séquestrée. Le 25 juin 1899, quelques jours avant ses 17 ans, le prince donne pour sa fille un grand bal. Dans son carnet, Marie note : "Je suis belle pour la première fois". Mais finalement rien ne change dans sa vie sinistre. À l’automne 1905, sa grand-mère, succombe à une attaque. C’est la première fois que Mimi est confrontée à la mort. Le prince Roland est atterré, sa mère était le plus grand amour de sa vie. Ce deuil n’améliore pas ses rapports avec sa fille. Leurs seuls sujets de conversation concernent l’argent. L’année suivante, il demande à Marie de faire un testament en sa faveur pour "des raisons d’ordre". Jamais elle ne s’exécutera. On comprend que dans ce désert affectif, son mariage avec le prince Georges de Grèce en 1907 ressemble à un sauvetage… 

Un mariage compliqué

Après son voyage de noces, le couple s’installe à Athènes. Au printemps 1908, Marie est enceinte. L’été se passe comme Georges en avait l’habitude au Danemark, à Bernstorff, le château de son oncle Valdemar. Début octobre, ils gagnent Paris où le prince Roland les accueille avenue d’Iéna. A l’approche de son accouchement, Marie est très angoissée. Elle a peur de mourir comme sa mère, après sa délivrance. Le 3 décembre, elle donne naissance à un fils, Pierre. Elle est éblouie et comblée par sa maternité, Georges est heureux. Un deuxième enfant naîtra deux ans plus tard : la princesse Eugénie de Grèce. Une sorte de routine va s’installer dans leur vie entre Athènes, Paris et toujours Bernstorff l’été. Mais à partir de 1910, Marie commence à s’apercevoir que les relations entre Georges et son oncle tant aimé ne sont pas celles qu’elle avait imaginées... Elle n’a aucune idée de ce qu’est l’homosexualité. Elle découvre avec stupeur les rapports incestueux des deux hommes. Elle s’en accommodera non sans douleur. Le seul remède qu’elle trouve à son chagrin, c’est de connaître d’autres partenaires pour se sentir femme. Elle tient un carnet de notes intitulé "Les hommes que j’ai aimés".  Les trois premiers sont deux chanteurs d’opéra et le tragédien Mounet-Sully, mais elle les a aimés de loin. Le quatrième est le secrétaire, manipulateur et malhonnête de son père, le corse Léandri, le cinquième, l’un des frères de Georges, mais elle ne dit pas lequel... C’est une liaison courte et excitante, une sorte de parenthèse dans sa vie frustrante. 

Georges et Marie assument cependant leur rôle de prince et princesse de Grèce, ils le feront toute leur vie. Le 22 juin 1911, ils représentent le roi de Grèce au couronnement de George V à Londres. Mais Marie aura des occupations plus graves avec le déclenchement des guerres balkaniques en octobre 1912. Elle improvise un hôpital dans l’Ecole Militaire d’Athènes et finance deux bateaux-hôpitaux de ses propres deniers et de ceux de son père. Tout en s’activant auprès des blessés, elle rencontre un jeune chirurgien genevois, Albert Reverdin. Il deviendra le sixième des "hommes que j’ai aimés". Elle l’évoque en 1913 :"Les seuls évènements, pour la femme, sont ceux du cœur : une larme, un baiser. Que m’importe que s’écroulent les empires ! Il a baisé mes lèvres ce soir."

Le 18 mars 1913, le roi Georges 1er est assassiné à Salonique. Le beau-frère de Marie devient le nouveau souverain de Grèce sous le nom de Constantin 1er. La deuxième guerre balkanique s’achève en 1913. Constantin ayant pris comme Premier ministre Venizélos, la bête noire de Georges, Marie n’est plus obligée de passer une partie de l’année à Athènes. Le couple rentre à Paris, la princesse a envie d’avoir son salon. Le rôle d’hôtesse l’attire depuis longtemps. L’homme numéro 7 s’approche,  c’est le Français Aristide Briand, 51 ans, qui a été quatre fois Président du Conseil. D’abord avocat puis journaliste, il s’était lancé dans la politique avec succès. Il était aussi un grand séducteur. Marie mettra quelque temps à tomber dans ses filets. Ils se voient, ils se parlent, c’est une sorte d'envoûtement ponctué par les séjours d’été avec Georges chez l’oncle Valdemar. 

Le couple est au Danemark au moment où la Première Guerre mondiale éclate. Ils regagnent difficilement la France en novembre et s’installent à Saint-Cloud car Paris est menacé. La liaison de Marie avec Briand durera pendant tout le conflit. Georges est très déprimé, son frère a été déposé, son cousin le tsar Nicolas II aussi. Ils apprennent en 1918 l’assassinat de la famille impériale russe. A la fin de l’été, l’espoir revient. Le 11 novembre sonne l’armistice. La liaison de Marie avec Briand touche elle aussi à sa fin. Elle va le voir une dernière fois le 18 mai 1919 avant d’écrire : "J’ai appris que depuis un an, il aime une autre femme. Fin."

Un nouvel homme, le numéro 8 va entrer dans sa vie. Elle taira toujours son nom. Elle l’appelle X. Il est médecin, marié et son épouse est une grande amie. Mais ce n’est pas le seul homme qui va maintenant l’occuper. Car l’après-guerre, c’est aussi sa rencontre avec Freud… 

 

Ressources bibliographiques :

Célia Bertin, Marie Bonaparte (Présentation de Elisabeth Roudinesco, Perrin, 1982, réédition 1999)

Freud, l’Homme et l’Oeuvre ( Le Petit Parisien, 14 juin 1938)

Marie Bonaparte, Edgar Poe, sa vie son œuvre, étude psychanalytique, Avant-propos de Sigmund Freud. (1903, réédition aux Presses Universitaires de France, 1958)

Sigmund Freud, Ma vie et la psychanalyse (Gallimard, 1930, traduction de Marie Bonaparte)

 

"Au cœur de l’Histoire" est un podcast Europe 1 Studio

Auteur et présentation : Jean des Cars
Production : Timothée Magot
Réalisation : Jean-François Bussière 
Diffusion et édition : Clémence Olivier
Graphisme : Karelle Villais