[1/2] Marguerite Duras, langueurs indochinoises

L’Amant ou Un Barrage contre le Pacifique de Marguerite Duras sont basés sur son enfance passée en Indochine. Dans un récit inédit en deux parties, l’historienne Virginie Girod vous raconte la jeunesse de celle qui deviendra une figure de proue du mouvement littéraire du Nouveau Roman en France. 

Marguerite Duras est la fille d’Henri et Marie Donnadieu. Elle naît en 1914 en Cochinchine, le sud de l’actuel Vietnam. Ses parents, des instituteurs, ont quitté la France pour les colonies dans l’espoir d’une vie meilleure. L’État français encourage alors l’arrivée de nouveaux colons. Colonie française fondée en 1862 par le traité de Saïgon, la Cochinchine est intégrée en 1887 aux autres conquêtes françaises dans la région pour former l’Indochine. Ce vaste territoire colonial tire sa richesse de la culture du riz, du caoutchouc, du tabac et du sucre. 

Les parents de Marguerite Duras ne gagnent pas bien leur vie, ils ne font pas partie de l’élite des colons. Marguerite et ses deux frères jouent même avec des enfants “indigènes”, et apprennent ainsi le vietnamien.   

La vie est simple pour eux, mais le sort va s’acharner sur la famille Donnadieu. En 1921, Henri Donnadieu est emporté par la maladie. Veuve, Marie Donnadieu décide de retourner en Indochine après quelques années en métropole. Elle achète un terrain cultivable près de Kampot, dans l’actuel Cambodge. Mais le terrain que l’administration lui a vendu est infertile. La famille est ruinée, et l’aîné Pierre sombre dans l’opium. Tous les espoirs reposent sur la jeune Marguerite, que sa mère inscrit en 1928 au lycée Chasseloup-Laubat à Saïgon, un établissement fréquenté par des Français. Elle est bonne en mathématiques et en lettres, elle pourra devenir professeur à son tour.