Pour Thomas Piketty, "il faut se préparer à de nouvelles crises financières et politiques" en Europe

Thomas Piketty plaide pour une deuxième Europe plus resserrée et donc plus propice à prendre des décisions tranchées.
Thomas Piketty plaide pour une deuxième Europe plus resserrée et donc plus propice à prendre des décisions tranchées. © EUROPE 1
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Invité d'Europe 1, l'économiste Thomas Piketty défend son "Manifeste pour la démocratisation de l'Europe" et plaide pour une Europe resserrée
INTERVIEW

L'Europe, considérée par beaucoup comme une source de problèmes, peut-elle devenir la solution aux multiples crises qui secouent ses États membres ? C'est ce que pensent 120 intellectuels qui proposent, dans Le Monde, le "Manifeste pour la démocratisation de l'Europe", un projet de traité et de budget commun pour refonder l’Union européenne. Parmi eux, l'économiste Thomas Piketty se focalise sur la question de la justice fiscale. "En raison de la règle de l'unanimité, il est impossible pour une majorité d'États membres de mettre en place une politique de justice fiscale dans l'UE puisque le Luxembourg ou l'Irlande bloquent tout. Résultat, on ne fait rien", déplore-t-il au micro d'Europe 1.

L'unanimité ne tient plus, selon lui. Alors que la France est secouée par la crise des "gilets jaunes", que la question du Brexit n'est toujours pas réglée et que l'Italie fait fi des règles économiques de l'UE, Thomas Piketty tire la sonnette d'alarme. "Il faut se préparer à de nouvelles crises financières et politiques dans les prochaines années, et donc à devoir reconstruire les choses", avance l'économiste. Parmi les points qui ne vont pas, le directeur de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) estime qu'il n'est plus possible "d'attendre que les 27 se mettent d'accord" sur les questions fiscales.

À ce titre, il propose, avec ses cosignataires, "un nouveau traité qui pourrait être signé, sans remettre en cause les traités en vigueur, par un petit nombre de pays : la France, l'Allemagne, la Belgique…". Les pays signataires pourraient alors, par le biais d'une "assemblée commune" de députés nationaux et européens, prendre des décisions plus rapidement. Une sorte d'Europe dans l'Europe.

"On est obligé d'en passer par là", estime Thomas Piketty. Cette assemblée européenne serait "souveraine pour adopter un impôt commun sur les bénéfices des grandes sociétés, les plus hauts revenus, le patrimoine et aussi sur le carbone", illustre-t-il. Le texte et le projet sont disponibles ici.