Mode et durabilité : comment réconcilier business model et impact positif ?
Mardi 23 septembre, #NEWDEAL réunissait les acteurs du monde de l’industrie de la mode autour d’une table ronde, à la Maison des ESSEC pour répondre à la question de la coalition entre business model et impact positif. L’occasion de revenir sur la définition de la mode durable, d’évoquer ses enjeux et la force de l’écosystème mais également, d’établir des perspectives à l’échelle européenne. Retour sur cette matinée stimulante animée par Claire Gallon, Partner chez The Salmon Consulting et Mathilde Aubinaud, Directrice de #NEWDEAL, où experts, dirigeants et entrepreneurs ont croisé leurs regards pour imaginer une mode plus durable dans une dimension européenne.
Repenser un business model innovant et durable
Pour réduire leur impact environnemental, social et économique, les entreprises doivent repenser leur business model qui se décline en 2 étapes clés : "la manière dont on créer la valeur", prenant appui sur la circularité pour réduire les ressources et les produits, avec des initiatives telles que la seconde main, la réparation, la location.. et 'la manière dont on partage la valeur créée' en se demandant 'quel est le prix juste et la quantité juste'", estime Anne Jacqueminet, Associate professor à l’ESSEC Business School. Pour elle, "Les entreprises doivent repenser au type de valeur créée" en remettant en cause le nombre d’unités, le partage des ressources entre l’entreprise et les parties prenantes, grâce à l’expérimentation de business model, de collaborations avec les clients et les fournisseurs. Les consommateurs restent encore peu réceptifs aux enjeux de durabilité pour deux raisons principales. D’une part, un écart persistant entre les intentions déclarées et les comportements réels : bien que nombreux soient ceux qui affirment vouloir éviter la fast fashion, ils continuent à y recourir. D’autre part, le phénomène de greenwashing, associé à un manque de transparence, d’informations claires et de labels fiables, freine leur capacité à faire des choix éclairés.
Les enjeux
Pour Alexandra Wagner, directrice de la communication de Primark France, le modèle économique repose sur "l’hyperefficacité" : absence d'e-commerce, magasins physiques sans musique, collections limitées produites en période creuse et acheminées par bateau. Cette stratégie permet de proposer des prix uniformes dans le monde et de limiter les invendus grâce à une offre composée à 50 % de basiques.
Maxime Delavallée, président de la Fédération de la Mode Circulaire, souligne "l’évolution des attentes autour de la transparence, de la valorisation des externalités négatives et de l’investissement dans des modèles durables".
Dans cette dynamique, Nona Source, dirigée par Ane Prieur du Perray, "met en avant les matières dormantes issues du luxe en les mettant à disposition de jeunes créateurs". Présente uniquement en ligne, l’entreprise mise sur la traçabilité et le réemploi des tissus sans transformation industrielle.
La durabilité, une priorité
La durabilité dans la mode s’impose comme une priorité stratégique, portée par des approches complémentaires. Maxime Delavallée souligne l’importance de concevoir des produits circulaires pensés pour durer, grâce à l’éco-conception et à des services comme la seconde main. Il appelle à une transformation à la fois individuelle et collective, conciliant impact et rentabilité. Alexandra Wagner présente la stratégie RSE de Primark, structurée autour de trois piliers : "comment améliorer le produit" (avec 56 % d’articles issus de matières durables et des actions comme le Primark Coton Connect pour former les fermes à l’agriculture durable), "comment préserver la planète", et "comment garantir le bien-être des travailleurs". Ane Prieur du Perray, à travers Nona Source, valorise le réemploi de matières dormantes issues du luxe, sans transformation industrielle, en misant sur la traçabilité et la transparence. Ensemble, ces initiatives dessinent les contours d’une mode plus responsable, ancrée dans l’innovation, la pédagogie et la collaboration.
La force de l’écosystème
Le travail avec les parties prenantes permet de renforcer l’écosystème des entreprises. Primark travaille avec 80 ONG, instituts et start-up pour mettre en place et consolider sa stratégie RSE. "Nous devons avoir une démarche collective qui œuvre pour le bien commun. Si on n’embarque pas nos fournisseurs dans cette démarche, ils ne le feront pas tout seuls." La coopétition est fondamentale, la Fédération de la Mode Circulaire rassemble 375 organisations qui travaillent ensemble pour apporter des conditions clés en main auprès des pouvoirs publiques en mettant en avant des problématiques du terrain. L’entreprise Nona Source pousse cette coopétition avec les entreprises les poussant à la réutilisation des matières en fin de vie. Récemment, l’entreprise a collaboré avec un créateur qui crée du tissu. Cette association a permis de créer un nouveau tissu avec 30% de nouveau fil et 30% de matières recyclées, une étape supplémentaire vers la mode durable.
Toutes ces initiatives françaises sont suivies de très près par l’Europe qui s’emparent de ces sujets et les prolonge à l’international. La France est motrice et se doit d’être transparente et honnête envers les consommateurs pour les engager dans cette économie circulaire.
La rédaction d'Europe 1 n'a pas participé à la rédaction de cet article.