Journée de la Filière auto : Bruno Le Maire tente de rassurer le secteur en proie à sa «révolution» électrique

Le ministre a promis "d'accompagner la filière" face à la nécessité de "passer en quelques années du siècle thermique au siècle électrique". (Illustration)
Le ministre a promis "d'accompagner la filière" face à la nécessité de "passer en quelques années du siècle thermique au siècle électrique". (Illustration) © LUDOVIC MARIN / AFP
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avec AFP / Crédit photo :
Ce mardi, devant un parterre de dirigeants, constructeurs et équipementiers réunis pour la troisième édition de la Journée de la Filière auto au Carrousel du Louvre, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a promis "d'accompagner la filière" face à la nécessité de "passer en quelques années du siècle thermique au siècle électrique".

"L'Etat ne va pas vous laisser tout seuls !", a promis le ministre de l'Économie Bruno Le Maire pour répondre aux inquiétudes de la filière automobile réunie mardi à Paris, face à la "révolution" qu'elle doit effectuer pour passer au tout électrique. Devant un parterre de dirigeants, constructeurs et équipementiers réunis pour la troisième édition de la Journée de la Filière auto au Carrousel du Louvre, le ministre a promis "d'accompagner la filière" face à la nécessité de "passer en quelques années du siècle thermique au siècle électrique".

1,5 milliard d'euros par an à partir de 2024

"Le rôle de l'État est d'être à vos côtés", a-t-il martelé, avant de rappeler son investissement financier : 1,5 milliard d'euros par an à partir de 2024 (contre 1,3 milliard l'année précédente) consacrés à l'électrification du parc, qui financeront bonus électriques, primes à la conversion, leasing social, etc. Il a insisté sur les dispositifs étatiques qui permettront selon lui de conjuguer passage à l'électrique, réindustrialisation française et souveraineté économique: "Au 1er janvier 2024, toute la production de batteries électriques en France pourra bénéficier d'un crédit d'impôt", a-t-il ainsi promis, pour contrer une fabrication actuellement dominée par des groupes asiatiques.

Ces crédits d'impôts, promulgués mardi matin au Journal officiel dans le cadre de la Loi Industrie verte, constituent aussi une contre-attaque aux mesures prises par les États-Unis dans leur grand plan climat (IRA), qui accorde des subventions aux seuls véhicules électriques fabriqués en Amérique du Nord. "Nous sommes les premiers (en Europe), à l'image de ce qui a été fait aux États-Unis avec l'IRA, à mettre en place un dispositif fiscal aussi avantageux pour la production industrielle de technologies nouvelles sur notre territoire", a vanté Bruno Le Maire.

Chine "pas irrattrapable"

Ce discours intervient alors que l'industrie française automobile, déjà victime depuis des années de délocalisation, a grandement souffert de la crise du Covid : la production de véhicules en France a diminué de près de 40% entre 2019 et 2020, et n'a toujours pas retrouvé ses niveaux pré-pandémiques (1,4 millions en 2022, contre 2,2 millions en 2019). Pour relancer la filière, constructeurs et gouvernement parient sur l'électrique, alors que les voitures thermiques seront interdites en Europe en 2035. Le gouvernement s'est fixé comme objectif une production annuelle de 2 millions de véhicules électrifiés en France d'ici 2030.

Mais en la matière, l'Hexagone doit faire face à une double concurrence rude : celle des Etats-Unis et celle de la Chine, qui "a pris cinq ans d'avance" sur l'électrique, selon Bruno Le Maire, quand les représentants du secteur évoquent plutôt "dix ans". "Ce n'est pas irrattrapable, mais cela suppose de mettre les bouchées doubles", a tenté de rassurer le ministre. Concernant les batteries électriques par exemple, "non seulement nous sommes en train de rattraper notre retard", mais "d'ici quinze ans", la France produira "les meilleures batteries électriques", affirme-t-il.

Pour ce faire, le ministre entend sécuriser l'approvisionnement en métaux rares nécessaires à leur construction, via la création d'un fonds de dépôts "opérationnel au plus tard en 2024". "Je souhaite qu'il représente au total 1,5 milliard d'euros pour sécuriser notre approvisionnement national en métaux, comme le nickel, le lithium, le cobalt, le graphite ou encore le titane", a-t-il précisé. Un demi-million proviendra de l'Etat, a-t-il précisé

"Donnant-donnant"

Reste à voir si ces propos parviendront à rassurer vraiment le secteur, inquiet depuis que "l'électrique n'est plus une option, mais notre horizon", selon les mots du président de la Plateforme automobile, Luc Chatel. Juste avant l'intervention du ministre dans la lumière bleutée d'une salle comble, ce dernier l'avait averti: "C'est donnant-donnant ! Vous nous demandez de changer de modèle, d'arrêter les moteurs thermiques où nous sommes leaders, (...) mais nous avons besoin d'un accompagnement pérenne".

Le gouvernement et le secteur doivent d'ici quelques jours signer un nouveau contrat de filière, qui prendra effet en 2027. Plusieurs points restent encore à négocier, mais le secteur tire entre autres la sonnette d'alarme sur le prix de l'électricité, qu'il voudrait moins élevé pour gagner en compétitivité. "On ne peut pas continuer à investir en France dans l'automobile avec une énergie autour de 150 euros" du MWh, a martelé Luc Chatel. "Je vous garantis que vous aurez un prix qui soit compétitif", lui a répondu Bruno Le Maire, au moment où le gouvernement négocie avec EDF sur ce sujet.