Comment expliquer les très mauvais résultats d’Apple ?

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Thibauld Mathieu avec Emmanuel Duteil , modifié à
En annonçant des résultats moins bons que prévu, Apple a plongé les grandes places financières dans le rouge jeudi. La stratégie de la marque à la pomme est plus que jamais en question.
ON DÉCRYPTE

Douche froide sur les marchés financiers : l'action d'Apple s'est effondrée jeudi, emportant dans son sillage une partie des valeurs technologiques, un peu partout dans le monde. À Wall Street, le titre a ainsi plongé de 10% en clôture, sa pire séance depuis 2013. Un simple accident ? Pas vraiment. La firme à la pomme traverse une réelle crise de confiance en bourse. Après avoir été la première entreprise privée américaine à franchir la barre des 1.000 milliards de valeur boursière l'été dernier, Apple a perdu le tiers de sa valeur depuis et vaut désormais moins que Microsoft, Amazon et Alphabet, la maison mère de Google.

Des prévisions de ventes revues à la baisse

La situation reste toutefois singulière. Pour la première fois depuis plus de quinze ans, le géant de Cupertino a fait ce qu'on appelle un "profit warning". Autrement dit, elle a averti mercredi soir qu'elle n'atteindrait pas les performances annoncées sur le trimestre. En attendant les résultats officiels le 29 janvier prochain, son chiffre d'affaires de septembre à décembre devrait tomber à 84 milliards de dollars (74 milliards d'euros) au lieu de 91 milliards (80 milliards d'euros) prévus par les analystes.

L'impact du marché chinois

Cette année, les iPhone ne se sont pas vendus aussi bien que prévu à Noël, principalement en Chine. Dans une lettre aux investisseurs, le patron d'Apple, Tim Cook, a ainsi évoqué, outre le renforcement du dollar, la décélération "plus forte que prévu" de l'économie chinoise pour justifier cette rare révision à la baisse. "Nous pensons que l'environnement économique en Chine a été davantage affecté par la montée des tensions commerciales avec les États-Unis", affirme le successeur de Steve Jobs.

Et si Apple ne communique plus ses ventes d'iPhone, celui-ci représente 63% de son chiffre d'affaires. C'est dire tout l'enjeu que revêt ce produit-phare.

Des iPhone trop chers

Certains experts rajoutent à cela une raison toute simple : le prix des iPhone, dont les derniers modèles ont allègrement passé la barre des 1.000 euros. Bien plus, donc, que certains de ses concurrents, parmi lesquels le Chinois Huawei, dont les ventes ont été supérieures à celles d'Apple au deuxième trimestre 2018. Sans compter l'ascension d'un autre chinois, Xiaomi, qui talonne désormais la marque à la pomme.

Des difficultés à innover

Autre indicateur intéressant : le taux de renouvellement des iPhone est inférieur aux prévisions dans certains pays développés, signe qu'Apple n'arrive plus à innover pour susciter suffisamment d'envie.

Il y a un an, l'entreprise confirmait par ailleurs avoir ralenti ses téléphones aux batteries vieillissantes sans en prévenir ses utilisateurs. Pour se faire pardonner, elle avait alors réduit, toute l'année 2018,  le prix de remplacement d'une batterie, de 69 à 29 euros. Or, selon Tim Cook, cette décision a poussé les clients à conserver leur ancien modèle.

L'ombre de Nokia

Rod Hall, analyste Apple chez Goldman Sachs, n'a pas hésité à comparer Apple et Nokia, qui a un temps dominé le marché des téléphones mobiles avant de tomber de son piédestal il y a dix ans. Son erreur : être devenu trop dépendant de la volonté de ses clients d'acheter de nouveaux appareils, à un moment où la crise les poussait à attendre le plus longtemps possible.

Richard Windsor, analyste high-tech auteur du Radio Free Mobile blog, ne se risque pas à faire le même parallèle, auprès de l'AFP : "Je ne pense pas qu'il s'agisse d'un instant 'Nokia' tout simplement parce qu'il n'y a rien qui puisse sérieusement défier l'iPhone dans le haut de gamme".