Commandes supplémentaires pour GM&S : une rustine dans l’attente d’un repreneur

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Les salariés de GM&S sont mobilisés depuis plusieurs semaines. © GEORGES GOBET / AFP
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Clément Lesaffre
Les commandes supplémentaires promises par Renault et PSA à leur sous-traitant creusois offrent un court répit en attendant de trouver un repreneur solide.

A peine nommé, déjà sur le pont. Arrivé à Bercy mercredi dernier, le ministre de l’Économie Bruno Le Maire s’est saisi dès vendredi du dossier GM&S, équipementier automobile en grande difficulté. Après négociations, le nouveau patron de Bercy a obtenu de Renault et PSA, principaux clients de l’usine de La Souterraine dans la Creuse, qu’ils augmentent leurs commandes afin de donner un sursis aux salariés. Mais le dossier est loin d’être réglé.

Sept millions d’euros de commandes supplémentaires. Pour remettre GM&S sur pied, Bruno Le Maire a fait pression sur les PDG des deux constructeurs, Carlos Ghosn et Carlos Tavares. Résultat, dimanche, Renault et PSA se sont engagés auprès du ministère de l’Économie à augmenter leurs commandes chez GM&S. La marque au losange double ses commandes sur un an à 10 millions d’euros tandis que son concurrent passe de 10 à 12 millions. Selon Bercy, "ces engagements permettront d’atteindre un niveau de chiffre d’affaires sur 2017 proche de 25 millions d’euros, et rendent possible la continuité de l’exploitation". Au début des négociations, Renault et PSA envisageaient de porter leurs commandes de 15 à 16 millions d’euros, pour finalement aller jusqu’à 22 millions.

"Signe encourageant". Les syndicats sont plutôt dubitatifs quant à la portée de l’accord obtenu dimanche. Depuis le début de la mobilisation, ils estiment en effet que l'entreprise, deuxième employeur privé de la Creuse, a besoin, pour survivre, de 35 à 40 millions d'euros de commandes annuelles. Le geste des deux principaux donneurs d'ordre est un "signe encourageant" par lequel "les constructeurs confirment qu'ils souhaitent continuer de travailler avec nous, ce qui est de nature à rassurer les éventuels repreneurs", a réagi le délégué CGT de l'usine creusoise, Vincent Labrousse. Mais, selon lui, il s'agit simplement d'un "sursis", car "le compte n'y est pas et les menaces sur l'avenir de l'entreprise ne sont pas levées".

"L'usine est loin d'être sauvée". Du côté des salariés, l’inquiétude reste d’actualité. "Je conçois qu'il y a eu un effort de fait, mais il faut regarder ce qu'il y a l'intérieur de cet effort", prévient Yann Augras, responsable CGT chez GM&S, joint par Europe 1. "Est-ce que c'est une augmentation du prix des pièces qui étaient chez nous ou est-ce que c'est une augmentation du volume des pièces ? Si vous achetez un vélo à 200 euros et qu'il passe à 300 euros, vous gagnez un peu d'argent et ça maintient un nombre de salariés, mais ça ne maintient pas l'activité car quand le vélo est construit c'est terminé", rappelle le responsable pour qui "l'usine est loin d'être sauvée".

Un effort de compétitivité. Conscient d’avoir offert "une bouffée d’oxygène bienvenue", Bruno Le Maire n’en reste pas moins lucide sur la situation de GM&S. Lundi, le ministre de l’Économie a rappelé qu’une "vraie menace plane sur l’entreprise". Les commandes sont une chose, "maintenant il faut assurer la pérennité de GM&S. Les salariés et les syndicats ont pleinement conscience qu’il y aura des efforts supplémentaires à faire", a averti Bruno Le Maire en marge de son déplacement à Berlin. La veille, Bercy avait prévenu de la nécessité pour GM&S d’"adapter son organisation afin de gagner en compétitivité". L'usine creusoise avait déjà reçu une aide de 1,16 million d'euros de la Région Nouvelle-Aquitaine depuis mars.

Deux repreneurs en vue. En réalité, les engagements de Renault et PSA permettent surtout d’éviter un placement en liquidation judiciaire lors de l’audience initialement prévue mardi au tribunal de commerce de Poitiers et qui pourrait être reportée. Un délai qui permet "la poursuite des discussions sur la reprise de l’entreprise", a précisé Bercy. Selon les représentants des salariés, les sociétés GMD et Magneto, deux sous-traitants automobiles, pourraient être intéressées par un rachat. L'intersyndicale "souhaite que le tribunal de commerce demande une prolongation de la période d'observation pour permettre d'ouvrir les discussions" officiellement avec Renault et PSA.

La mobilisation se poursuit. En attendant une éventuelle offre de reprise ferme qui garantirait la sauvegarde d’un maximum d’emplois, l'occupation du site par les salariés se poursuit. Si l’audience est maintenue, une manifestation est prévue mardi à Poitiers devant le tribunal de commerce. L’intersyndicale a rencontré le préfet de la Creuse lundi matin pour évoquer les suites à donner au dossier et un nouveau point sera fait le 31 mai.

Un dossier qui dure

Depuis plusieurs semaines, les salariés de GM&S alertent sur le sort de leur usine, placée en redressement judiciaire. Récemment, les ouvriers ont passé la vitesse supérieure en piégeant leur usine avec des bonbonnes de gaz. Le carnet de commandes de l’usine ne permettait plus de maintenir la production au niveau normal, menaçant les 277 salariés. Selon eux, la faute incombe à Renault et PSA. Les deux constructeurs représentent 90% du chiffre d’affaires de l’usine mais ont réduit la voilure en termes de commande ces dernières années.