Chômage des jeunes : un plan "ridicule" ?

Les 27 dirigeants de l'Union européenne se sont mis d'accord dans la nuit de jeudi à vendredi à Bruxelles, pour débloquer six milliards d'euros d'ici 2015, et 8 milliards d'ici 2020, lors d'un sommet du conseil européen.
Les 27 dirigeants de l'Union européenne se sont mis d'accord dans la nuit de jeudi à vendredi à Bruxelles, pour débloquer six milliards d'euros d'ici 2015, et 8 milliards d'ici 2020, lors d'un sommet du conseil européen. © Reuters
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Bruxelles débloque un fonds de 6 milliards pour l'emploi des moins de 25 ans. Suffisant ?

L'INFO. Effet d'annonce ou véritable plan de lutte contre le chômage des jeunes ?  Les 27 dirigeants de l'Union européenne se sont mis d'accord dans la nuit de jeudi à vendredi à Bruxelles, pour débloquer six milliards d'euros d'ici 2015, et 8 milliards d'ici 2020. La France, pour sa part, devrait toucher quelques 600 millions d'euros, destinés à aider 300.000 moins de 25 ans en recherche d'emploi. L'idée, c'est qu'au bout de quatre mois de chômage, on puisse proposer aux moins de 25 ans un emploi, un apprentissage ou une formation. Pour cela, François Hollande a prévenu : "il faudra tout dépenser".

>>> Mais les Etats du Vieux continent peuvent-ils vraiment être efficaces avec une telle somme, lorsqu'on sait que les dépenses en faveur de l'emploi représentent déjà un budget de près de 90 milliards d'euros rien qu'en France ? Europe1.fr a posé la question à trois experts.

Union européenne Hollande Merkel sommet bruxelles européen herman van rompuy

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Vraie aubaine… "C'est toujours ça de pris. Cela peut-être bien pour financer des contrats aidés par exemple, redonner confiance aux gens", estime pour sa part Laurence Nayman, économiste au Centre d'études prospectives et d'informations internationales (Cepii). En effet, pour la France par exemple, 600 millions représentent environ 20% du budget annuel des contrats aidés. Soit un apport non négligeable dans le financement de ce dispositif. "Mais cela n'est pas suffisant, cela ne durera que quelques temps, un an ou deux tout au plus…", s'inquiète la spécialiste.

… ou effet d'annonce ? "C'est un montant ridicule à l'échelle du Budget européen (plus de 900 milliards ndlr.). C'est clairement un effet d'annonce pour masquer le manque d'avancées sur d'autres sujets, comme la mise en place d'un gouvernement économique de l'Europe", tacle, lui, l'économiste et chercheur à l'université Paris-II, Bruno Jérôme. Selon lui, ces fonds serviront tout au plus à financer "la communication des organismes de mise en relation de l'offre et la demande, type Pôle emploi ou agences d'intérim". "Ça soulève un problème de fonds : l'UE peine à se doter d'un vrai budget pour l'emploi. Ce plan, c'est le genre de chose à ne pas faire pour éviter de se fâcher avec l'Europe, parce que les gens sentent que ce n'est pas à la hauteur", tranche-t-il.

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Un fonds utile qu'à l'apprentissage ?  "C'est insuffisant pour offrir des emplois mais les Etats peuvent mettre l'accent sur la formation et l'apprentissage. Les stages en entreprises, par exemple, fonctionnent plutôt bien", nuance Laurence Nayman. "Les chômeurs sont pour beaucoup des jeunes peu qualifiés et peu intéressants pour les entreprises. Pour bien utiliser ces fonds, il faut les orienter vers la formation. C'est vraiment ça LE truc", juge également Philippe Waechter, directeur des études économiques chez Natixis. Mais Laurence Nayman prévient : tout miser sur la formation professionnelle peut comporter des risques. "Encore un fois, j'ai l'impression qu'on cherche à prendre exemple sur l'Allemagne, où il existe une profusion de formations professionnelles. Les jeunes y sont formés pour l'entreprise, ils sont dans le moule des entreprises. Mais là-bas, on s'en plaint", prévient-elle. Et de conclure : "le risque est que nos jeunes se dirigent moins vers les formations classiques. De ce fait, l'Allemagne manque de main d'œuvre qualifiée, de gens qui savent bien rédiger, résoudre des équations".

pole emploi, chomage

Rien à faire sans croissance ? "Pour enrayer le chômage des jeunes, il faut relancer la croissance et inciter les entreprises, sinon, l'emploi manque et les séniors restent accrochés à leur travail. C'est pour ça que Bruxelles prépare également un plan en ce sens", précise, enfin,  Philippe Waechter. Les dirigeants européens se sont, en effet, également mis d'accord sur un plan d'investissement et de financement des PME. En France, 50 à 100 milliards de prêts seront ainsi dégagés. "Mais ce plan est conditionné à la réduction des déficits publics", regrette Philippe Waechter. Et d'insister : "il faut faire un effort pour les entreprises, y compris du côté des jeunes chômeurs. Ces derniers pourraient, par exemple, accepter des baisses de salaires, quitte à recevoir des  compensations de l'Etat. Pourquoi ne pas imaginer, par exemple, un système de 'Smic jeunes' ? Les 6 milliards doivent également servir à ça".