Ce "cheveu" qui "menace" la zone euro

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L'absence d'accord sur la Grèce met en danger l'Europe mais Bercy se dit confiant. À raison?

Le contexte. Les ministres des Finances de la Zone euro (Eurogroupe) ont échoué à trouver un accord pour le déblocage d'une aide à la Grèce, dans la nuit de mardi à mercredi. Jugée vitale pour Athènes, mais aussi pour toute la Zone euro, l’émergence d'un éventuel accord devra attendre lundi, puisque les discussions ont été reportées. Si Bercy se dit confiant, ce n'est pas le cas de tout le monde.

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• Sur quoi portent les discussions ? Les ministres des Finances tentaient de s'accorder sur le versement d'un prêt à la Grèce pouvant aller jusqu'à 44 milliards d'euros et de trouver un terrain d'entente avec les autres créanciers publics, en premier lieu le FMI. La Grèce, saluée pour ses mesures d'austérité mises en œuvre depuis deux ans, a besoin de cet argent pour payer sa dette et les dépenses de l’État. L'Eurogroupe cherche aussi un moyen d'améliorer la soutenabilité de la dette grecque, qui explose et devrait grimper jusqu'à 190% du PIB en 2014. Un niveau insoutenable.

• Pourquoi le débat est-il repoussé à lundi ? "Les questions étaient si complexes que nous n'avons pas trouvé de solution définitive", a déclaré le ministre allemand des Finances, Wolfgang Schäuble. La réunion a été interrompue "de façon à ce que des travaux techniques puissent avoir lieu ", selon un communiqué de l'Eurogroupe. Une justification reprise quasi mot pour mot par Bercy.

Bercy, ministère de l'Economie

• La phrase optimiste. "Vraiment, nous sommes à un cheveu d'un accord". Pierre Moscovici, ministre de l’Économie et des Finances, s'est dit mercredi sur Europe1 "très confiant" sur l'émergence d'une solution. "Franchement, il nous reste à mettre la dernière touche, nous allons le faire lundi."

>> Mais a-t-il raison d'être aussi confiant ?

• Des raisons d’espérer. L'Eurogroupe explique avoir "fait des progrès en mettant le doigt sur une série d'initiatives crédibles". De nombreuses solutions sont à l'étude. Outre un abaissement des taux d'intérêt des prêts déjà consentis à la Grèce, les ministres examinent la possibilité d'un allongement des durées de remboursement ou un rachat par le pays d'une partie de sa dette à prix cassé.

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Par ailleurs, les ministres ont avancé sur le renforcement du contrôle des sommes versées à la Grèce, ce qui plait à Berlin et peut rendre l'Allemagne plus flexible sur le reste. "Nous avons un meilleur mécanisme pour permettre que les engagements de la Grèce soient mis en place progressivement à l'avenir", s'est réjoui Wolfgang Schäuble.

• Encore des risques de blocage. "Des progrès ont été faits, mais il en faut encore un peu plus", a mis en garde la directrice du Fonds monétaire international, Christine Lagarde. "On n'est vraiment pas près d'un accord", affirme carrément mercredi à l'AFP un "responsable" proche des discussions. La chancelière allemande, Angela Merkel, évoque seulement "des chances" de parvenir à un accord.

Merkel Bandeau

© REUTERS/Tobias Schwarz

Premier point de blocage : la question d'un délai supplémentaire pour permettre à Athènes de ramener sa dette à 120% en 2022 au lieu de 2020. L'Eurogroupe est dans l'ensemble plutôt favorable à cette demande de la Grèce mais le FMI refuse catégoriquement et l'Allemagne est peu emballée. Second point : le "trou de financement".Dans le jargon des économistes, il s'agit du surplus de déficit de la Grèce, par rapport à ce qui avait été prévu initialement. En clair : la conjoncture économique morose et les effets néfastes sur la croissance des plans d'austérités ont creusé la dette grecque plus que prévu. Du coup, l'aide de 44 milliards risque de ne pas suffire. Et il faudrait trouver 32 milliards supplémentaires.

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La survie de la Zone euro est-elle en jeu ? "Elle serait menacée si nous n'y parvenions pas", a reconnu Pierre Moscovici à propos d'un accord. "Ce n'est pas seulement l'avenir de notre pays mais la stabilité de toute la zone euro qui dépend du succès" de la réunion de lundi avait déjà prévenu le Premier ministre grec, Antonis Samaras, un peu avant.

En effet, en cas de défaut de paiement de la Grèce, cela entrainerait une forte perte de liquidité en Europe. Les banques, l'Union européenne, et la BCE, principaux créditeurs, verraient s'envoler beaucoup d'argent si Athènes ne les rembourse pas ou peu. Les dettes s'accroitraient encore plus et l'investissement et la consommation en pâtiraient. Mais surtout, cela risque de provoquer un vent de panique qui conduirait les marchés à faire bondir leurs taux pour les autres pays en difficulté, comme le Portugal ou l'Espagne, ce qui entrainerait une spirale infernale.