Plongée dans les attiques du château de Versailles, ces appartements de courtisans devenus musée

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Les attiques du château de Versailles ont subi un lifting pour accueillir le public en visite libre. © Thibaud Le Meneec / Europe 1
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, à Versailles , modifié à
Le dernier étage du château de Versailles, qui correspond aux "attiques" de l'édifice, va rouvrir au public en 2021 dès la fin des restrictions actuelles pour les lieux culturels. Europe 1 a pu visiter ces salles réhabilitées, avec une collection impressionnante de tableaux de la fin du 18e siècle et de l'époque napoléonienne à l'occasion d'une émission spéciale de la France bouge depuis le château.
REPORTAGE

L'odeur de la peinture fraîche tranche avec l'atmosphère feutrée du lieu, déserté par ses milliers de touristes quotidiens. Là, derrière quelques portes au deuxième et dernier étage du château de Versailles, une poignée de techniciens s'affairent encore à rendre possibles les visites dans les attiques, sous le toit. Car c'est une nouveauté de l'année 2021 : pour la première fois, ce qu'on appelle les attiques seront accessibles en visite libre au public. Cinq ans après la fin des visites guidées et alors que la rénovation touche à sa fin, Europe 1 vous emmène en avant-première dans cet étage marqué par l'époque napoléonienne.

À vrai dire, dans un château inhabituellement silencieux et nimbé du brouillard de janvier, on ne saurait trouver facilement l'accès à ces fameux attiques. Le visiteur y pénètre par une petite porte située à côté de l'escalier de la Reine, situé à la fin du circuit des Grands appartements, non loin de la Cour royale.

Des anciens "appartements de fonction"

A la construction du château de Versailles et jusqu'au 19e siècle, cet étage servait d'appartements pour les courtisans et jusqu'à 3.000 personnes ont pu y être hébergées pendant le règne du Louis XIV. "Il s'agissait d'appartements d'appoint, comme des appartements de fonction", retrace pour Europe 1 Frédéric Lacaille, conservateur général au château de Versailles. Progressivement, les courtisans ont investi les hôtels meublés de Paris pour travailler à Versailles.

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C'est ce qui a poussé Louis-Philippe, dernier roi de France et souverain de 1830 à 1848, à décider dès le début de son règne de transformer ces attiques en Musée de l’Histoire de France. L'objectif ? "Que chaque Français se réconcilie avec son histoire, de la conversion de Clovis au christianisme à son sacre en 1830, en accordant une grande part de Napoléon", rappelle le conservateur, chargé de l'art pictural du 19e siècle. Et ces attiques représentent le chaînon manquant et la transition idéale entre les appartements royaux et la salle du Sacre de Napoléon, deux incontournables du château de Versailles.

Napoléon, as de la communication politique

En montant au deuxième étage, où les salles ont été ouvertes en 1956 et "relookées" en 1980, ce ne sont pas les représentations du "Petit caporal" que l'on retrouve d'abord, mais quelques escabeaux et le Serment du Jeu de paume, dessin inachevé de Jacques-Louis David sur les événements de juin 1789, immédiatement avant la Révolution française. C'est ainsi que débute cette visite dans l'attique dite Chimay, première partie des attiques, au-dessus de l'appartement de la Reine.

La prise du palais des Tuileries (Duplessis-Bertaux), La Mort de Marat (David)… Les tableaux sur la Révolution ne sont pourtant pas légion. "C'est une collection modeste qui a été choisie par Louis-Philippe pour ne froisser personne", explique Frédéric Lacaille sur cette collection restreinte à propos de l'une des périodes les plus importantes de l'histoire française. Le visiteur bascule très vite sur le début de l'ascension de Napoléon Bonaparte, au cours des années 1790.

" Napoléon avait besoin de raconter ses campagnes et faire oeuvre de propagande "

Et à mesure que se succèdent les tableaux hagiographiques, on se rend compte que le Corse "avait besoin de raconter ses campagnes et faire oeuvre de propagande", comme si on assistait à la naissance de la communication politique au tournant du 19e siècle. Bonaparte au pont d’Arcole (Antoine-Jean Gros) illustre à merveille cette nouvelle manière, pour l'époque, de célébrer l'héroïsme militaire. Le tableau sera d'ailleurs prêté à la Grande Halle de la Villette pour l'exposition sur le bicentenaire de la mort de Napoléon, du 14 avril au 19 septembre, événement majeur de cette "année Napoléon".

Plongée artistique dans le 19e siècle

Campagne d'Italie, famille de l'empereur, personnalités culturelles de l'Empire… Les salles regroupent des tableaux sur de nombreux thèmes, sous la lumière diffuse des verrières. Pour la première fois, un éclairage électrique viendra également valoriser les oeuvres des différents peintres de l'époque. "On a modernisé les lieux, rafraîchi ces espaces et remplacé les peintures anciennes. Ça redonne du punch", se félicite le conservateur versaillais avant les derniers ajustements. Dans l'aile du Midi, deuxième partie de ces attiques revisités, il n'y aura en revanche pas de chauffage.

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La visite se termine avec la statue de Napoléon, agonisant dans ses derniers jours, réalisée par Vincenzo Vela. Le public conclut ainsi cette plongée artistique dans le premier quart du 19e siècle, plutôt inattendue pour qui a l'image d'un château tout entier tourné vers les incontournables Louis XIV et Marie-Antoinette. "On oublie souvent qu'il y a cette collection historique incroyable", souligne Frédéric Lacaille, "conservateur de cette partie immergée de l'iceberg" à découvrir dès la réouverture de l'édifice versaillais.