Isabelle Huppert a-t-elle ses chances pour les Oscars ?

Multi-récompensée aux États-Unis, Isabelle Huppert s'invite dans la course aux Oscars.
Multi-récompensée aux États-Unis, Isabelle Huppert s'invite dans la course aux Oscars. © Jemal Countess / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP
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Clément Lesaffre
Déjà récompensée à trois reprises aux États-Unis pour son rôle dans "Elle", Isabelle Huppert pourrait bien être nommée pour l'Oscar de la meilleure actrice. De là à décrocher la statuette...

Et de trois ! En l'espace d'une semaine, Isabelle Huppert a reçu trois prestigieuses distinctions aux États-Unis. L'actrice française a été récompensée pour son rôle dans Elle de Paul Verhoeven et son nom revient désormais avec insistance dans la course aux Oscars. Dans le film du néerlandais, tourné en français et représentant de la France pour l'Oscar du meilleur film étranger, Isabelle Huppert interprète une femme violée qui retrouve son agresseur. Fascinée, elle entame avec lui un jeu malsain, véritable malaise pour le spectateur.

Primée par le cinéma indépendant.Son rôle transgressif a d'abord valu à Isabelle Huppert de remporter le Gotham Independent Film Award de la meilleure actrice, fin novembre. Cette cérémonie qui promeut et récompense les films indépendants est un bon indicateur pour les Oscars. L'an dernier, elle avait "anticipé" Spotlight pour le meilleur film et en 2014, elle avait eu raison concernant le meilleur film (Birdman) et la meilleure actrice (Julianne Moore).

Sacrée par les critiques. Autres récompenses de bon augure pour Isabelle Huppert : les deux prix de meilleure actrice remis par les cercles de critiques de New York et de Los Angeles (conjointement pour Elle et L'avenir, de Mia Hansen-Love). En 2012 et 2013, les critiques new-yorkais avaient vu juste en prévoyant les sacres de Jennifer Lawrence puis Cate Blanchett aux Oscars. Quant aux spécialistes de la cité des Anges, ils avaient également eu le nez creux concernant Cate Blanchett ainsi que pour Meryl Streep en 2011.

Des adversaires coriaces. Ces récompenses ont d'autant plus de valeur que la concurrence est rude pour prétendre à une place de finaliste aux Oscars - les nominations seront annoncées le 24 janvier et la cérémonie aura lieu le 26 février. Isabelle Huppert fait notamment face à... Jackie Kennedy, ou plutôt Natalie Portman, grimée en épouse de JFK pour Jackie, un biopic très attendu de l'iconique First Lady. Autre sérieuse concurrente, Emma Stone, star de la comédie romantique musicale La La Land, déjà portée aux nues par la critique outre-Atlantique.

Au moins une nomination ? Mais le chemin est encore long pour Isabelle Huppert. Bien qu'elle ait glané les premières récompenses de la saison, la Française n'est pas réellement la favorite. D'après le site de prédictions pour les Oscars goldderby.com, Natalie Portman et Emma Stone sont les mieux placées. Les deux sont mentionnées dans toutes les listes prévisionnelles des 28 critiques de cinéma interrogés par le site. Elles devancent Ruth Negga (23 votes pour Loving) et Annette Bening (20 votes pour 20th Century Women). La cinquième et dernière place a de fortes chances de se jouer entre Amy Adams (18 votes pour Premier Contact) et donc, Isabelle Huppert (15 votes).

Un rôle trop torturé. Si elle parvient à faire partie des cinq finalistes pour l'Oscar, rien ne dit qu'Isabelle Huppert ne créera pas la surprise, telle Marion Cotillard en 2008. "Une nomination c'est jouable. Mais l'Oscar, ça me paraît compliqué. Il y a bien d'autres films américains avec des comédiennes qui valent largement Isabelle Huppert", tempère le spécialiste cinéma d'Europe 1 Bruno Cras. D'autant que le rôle de femme machiavélique et ambiguë tenu par l'actrice de 63 ans n'est pas vraiment ce qu'il convient d'appeler un "rôle à Oscars". A de rares exceptions - comme Natalie Portman en danseuse schizophrène dans Black Swan, primée en 2011 - l'Académie des Oscars récompense plutôt les biopics, les histoires morales et les performances positives. Le personnage de Michèle Leblanc de Elle apparaît bien sombre pour des votants encore très empreints du classicisme hollywoodien.

 

Isabelle Huppert, ni star ni inconnue aux États-Unis

Elle n'a pas l'aura de Marion Cotillard mais Isabelle Huppert bénéficie d'une certaine notoriété outre-Atlantique. En effet, au cours de sa prolifique carrière (plus d'une centaine de films), elle a tourné quelques films sous la direction de grands réalisateurs américains. En 1975, trois ans après ses débuts, elle est à l'affiche de Rosebud, d'Otto Preminger. Cinq ans plus tard, elle est au casting de La porte du paradis, fresque de Michael Cimino récemment redécouverte. Dans les années 1980-90, elle a joué dans Faux témoin de Curtis Hanson et Amateur de Hal Hartley.

En 2004, Isabelle Huppert tient le rôle principal de J'adore Huckabees de David O'Russell puis apparaît en 2014 dans The Disappearance of Eleanor Rigby avec Jessica Chastain. Résultat, son visage n'est pas inconnu des cinéphiles américains. Vanity Fair France l'a ainsi classée, cette année, au 19ème rang des Français les plus influents dans le monde. Cerise sur le gâteau, le prestigieux American Film Institute (AFI) lui a rendu hommage lors de son festival annuel, en novembre.