Pierre Cardin 1:04
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Angèle Chatelier avec AFP édité par Guilhem Dedoyard , modifié à
Le célèbre couturier français Pierre Cardin s'est éteint mardi à l'âge de 98 ans. Durant 70 ans, il a construit un empire commercial, s'appuyant sur de très nombreuses licences à son nom qu'il vendait à prix d'or, quitte à diluer la qualité de sa marque.

Si Pierre Cardin était l'homme aux vêtements colorés, futuristes, c'était aussi un businessman. L’un des plus célèbres couturiers français, qui s’est éteint mardi à l’âge de 98 ans, laisse derrière lui un empire, dans la mode mais pas seulement. Le créateur a fait de son nom une marque : du parfum, des cigarettes, de l’eau minérale et même des couteaux de cuisine. "Je me suis étendu sur tous les domaines et mon nom a inondé le monde entier, grâce à mes licences qui assurent une vraie solidité à l'entreprise", expliquait-il en 2019. Une position gagnante qui lui a permis de s'enrichir. Mais a nui à son image de marque.

Une multiplication des licences à double tranchant

Pierre Cardin a ainsi réussi à faire fructifier sa marque grâce au système de licences : des entreprises payaient pour avoir son nom sur leurs produits et lui touchait une part sur chaque vente. Le couturier-homme d'affaires a commencé par les cravates, avant de bâtir au fil des ans un empire qui décline son nom à l'infini : chemises, draps, eau minérale, nécessaire à couture, lieux culturels, design, en passant par les dérivés du restaurant Maxim's dont il était propriétaire.

Un choix qui a eu un coût. "L'ubiquité a tué la désirabilité de la marque. Avec cette démultiplication à l'infini des licences, c'est la valeur-qualité qui en a souffert. On trouvait du Cardin dans n'importe quel produit, n'importe où dans le monde", résume pour l'AFP Eric Briones, cofondateur de l'école de mode "Paris School of Luxury". Son modèle de licences poussé à l'extrême est même devenu un cas d'école, étudié dans le marketing sous le néologisme de "cardinisation".

Une implantation réussie en Chine

En 2011, il expliquait ainsi à Europe 1 avoir plus de 800 licences différentes, dans une centaine de pays, et surtout la Chine, où il a bâti un véritable royaume. Il a ainsi mis le pied en Chine dès 1978, devenant un des premiers investisseurs étrangers à s'implanter sur ce marché.

Il est aussi le premier couturier occidental à défiler à Pékin en 1979. En 2009, la maison avait cependant revendu une partie de son empire en Chine (soit une trentaine de licences textile et accessoires) à des partenaires chinois pour 200 millions d'euros.

Un choix de marketing lucratif

"J’étais un homme d’administration, comptable en même temps, donc j’ai fait attention au prix de revient de chaque chose et j’étais très sérieux dans mon travail. Autant je suis fantaisiste dans mes créations, mais très sérieux dans la finance", expliquait alors celui qui s'est fait connaitre par des pièces iconiques comme la robe bulle, le cosmocorps ou encore le look des Beatles des années 60.

Pourtant, Pierre Cardin n’est pas vraiment reconnu par ses pairs en tant que couturier car au-delà de ses produits dérivés ,c’est aussi le premier à avoir voulu rendre la haute couture, accessible et à organiser des défilés dans de grands magasins. Un choix décrié mais lucratif. "C’est grâce à ça que j’ai gagné beaucoup d’argent", confirmait-il en juillet dernier, sa fortune était estimée à 600 millions d’euros.