Sciences Po Paris : les gardes à vue de son directeur et sa compagne levées, l'enquête continue

Mathias Vicherat, directeur de Sciences Po Paris, a été placé en garde à vue.
Mathias Vicherat, directeur de Sciences Po Paris, a été placé en garde à vue. © MAGALI COHEN / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP
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avec AFP / Crédits photo : MAGALI COHEN / HANS LUCAS / HANS LUCAS VIA AFP , modifié à
Les gardes à vue entamées dimanche soir du directeur de Sciences Po Paris Mathias Vicherat et de sa compagne, qui s'accusaient réciproquement de violences conjugales, ont été levées lundi en fin d'après-midi a indiqué le parquet. "L'enquête se poursuit en préliminaire", a précisé le ministère public.

Les gardes à vue entamées dimanche soir du directeur de Sciences Po Paris Mathias Vicherat et de sa compagne, qui s'accusaient réciproquement de violences conjugales, ont été levées lundi en fin d'après-midi à Paris, a indiqué le parquet à l'AFP. "L'unité médico-judiciaire n'a relevé d'incapacité totale de travail sur aucun des deux, et aucun des deux n'a souhaité déposer plainte à ce stade. L'enquête se poursuit en préliminaire", a précisé le ministère public.

Souvent présentée comme la fabrique des élites françaises, Sciences Po Paris cumule déboires et scandales autour de ses dirigeants depuis une dizaine d'années sans que son prestige académique n'en soit pour l'heure entaché. 

De précédents scandales à la tête de l'établissement

Mathias Vicherat avait succédé en novembre 2021 à la tête de Sciences Po Paris à Frédéric Mion, contraint de démissionner en février de cette année-là pour avoir dissimulé les soupçons d'inceste visant le politologue Olivier Duhamel. Ce dernier était alors le président de la fondation nationale des Sciences politiques (FNSP) qui exerce la tutelle sur Sciences Po Paris également surnommée "l'école de la rue Saint-Guillaume", où elle a son siège historique à Paris.

Dans le sillage du scandale Duhamel, un mouvement de dénonciations de violences sexuelles dans les instituts d'études politiques (IEP) avait émergé, d'abord sur les réseaux sociaux. Frédéric Mion avait lui-même été désigné à la tête de Sciences Po Paris après le décès accidentel dans une chambre d'hôtel à New York de Richard Descoings, emblématique patron de Sciences Po de 1996 à 2012 qui a profondément modernisé et développé l'institution fondée en 1872.

Le bilan de l'ère Descoings avait cependant été assombri par un rapport au vitriol de la Cour des Comptes sur la gestion financière de l'établissement, ce qui avait suscité une première crise de gouvernance.

Mathias Vicherat, ancien camarade de promotion d'Emmanuel Macron

Ancien élève de Sciences Po, dont il est sorti en 2000, Mathias Vicherat est un ancien camarade de promotion d'Emmanuel Macron à l'ENA. Il est décrit comme un touche-à-tout ambitieux doté d'un solide réseau. Il a été en poste à la direction générale de la police nationale (DGPN) avant d'exercer les fonctions de directeur de cabinet du maire de Paris Bertrand Delanoë puis d'Anne Hidalgo, de directeur général adjoint de la SNCF puis de secrétaire général de Danone.

Peu après son arrivée à la tête de Science Po, il avait décrété "priorité absolue" les violences sexistes et sexuelles. Né en 1978 aux Lilas (banlieue est de Paris), il est le fils d'un employé de la Fnac et d'une éducatrice spécialisée. Ce quadragénaire à l'allure soigné suscite des commentaires variés de ses anciens collègues et collaborateurs : "intelligent", "brillant", "travailleur", mais aussi "arrogant" ou "petit marquis". Il a été en couple avec la journaliste Marie Drucker, avec qui il a un fils en 2015. Il a publié en 2001 un livre sur le rap, Pour une analyse textuelle du rap français.

"Si ces faits sont avérés, nous demanderons sa démission"

"On attend bien sûr d'avoir des éléments supplémentaires mais on ne peut pas fermer les yeux sur ce sujet", a réagi auprès de l'AFP Inês Fontenelle, vice-présidente étudiante au conseil de l'Institut (union étudiante) et membre du conseil d'administration de la FNSP. "Et encore moins dans le contexte de Sciences Po qui a connu l'affaire Duhamel, et plus récemment des blocages d'étudiants pour dénoncer le laxisme de l'institution face aux violences sexistes et sexuelles", a-t-elle ajouté. "Par devoir d'exemplarité, nous pensons que Mathias Vicherat ne peut représenter l'institution et si ces faits sont avérés, nous demanderons sa démission".

"On a tous appris l'information par la presse, et on est tous sous le choc, la sidération est la même qu'au moment de l'affaire Duhamel", a-t-elle complété. Sciences Po Paris scolarise quelque 15.000 étudiants, dont la moitié d'étudiants internationaux et 25% de boursiers.