Mort de Matisse à Châteauroux : qu'est-ce que l'excuse de minorité, de nouveau au coeur des débats

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Le débat autour de l'excuse de minorité a été relancé par le gouvernement. © Ludovic MARIN / AFP
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Ophélie Artaud / Crédit photo : Ludovic MARIN / AFP (Illustration)
Alors que les violences impliquant des mineurs se sont multipliées ces dernières semaines, Gabriel Attal a annoncé il y a quelques jours vouloir revenir sur l'excuse de minorité. La mort de Matisse, 15 ans, poignardé par un adolescent du même âge, relance le débat. Mais de quoi s'agit-il ?

Faut-il juger les mineurs de la même manière que les adultes ? La mort de Matisse, 15 ans, samedi soir à Châteauroux, ravive les questionnements autour de l'excuse de minorité. L'adolescent est décédé après avoir été poignardé par un mineur, également âgé de 15 ans. Avant lui, le passage à tabac mortel de Shemseddine, à Viry-Châtillon, ou le guet-apens mortel dans lequel est tombé Philippe Coopman, qui impliquaient des suspects mineurs, ont relancé les discussions sur ce principe juridique. Le Premier ministre Gabriel Attal a lui aussi annoncé vouloir "ouvrir le débat" pour voir si des "atténuations" à "l'excuse de minorité" sont "possibles et souhaitables". Mais de quoi s'agit-il ?

Concrètement, avec l'excuse de minorité, un mineur bénéficie d'une atténuation de responsabilité et ne peut donc pas être puni aussi sévèrement qu'un majeur. Ce principe juridique a été créé par une ordonnance du 2 février 1945 : ainsi, le tribunal pour enfants et la cour d'assises des mineurs "ne peuvent prononcer à l'encontre des mineurs âgés de plus de 13 ans une peine privative de liberté supérieure à la moitié de la peine encourue". Dans le cas où la peine encourue est la réclusion à perpétuité, "ils ne peuvent prononcer une peine supérieure à vingt ans de réclusion ou de détention criminelle", était-il inscrit.

Un principe juridique qui peut être levé exceptionnellement

Depuis le 30 septembre 2021, avec le code de la justice pénale des mineurs, un nouveau texte est en vigueur. S'il conserve les mêmes principes clés, désormais la notion de "discernement" prime : "lorsqu'ils sont capables de discernement, les mineurs [...] sont pénalement responsables des crimes, délits ou contraventions dont ils sont reconnus coupables", indique la loi. Une différence subsiste en fonction de l'âge : les mineurs de moins de 13 ans sont automatiquement "présumés ne pas être capables de discernement", alors que ceux entre 13 et 18 ans sont considérés en capacité de comprendre la procédure pénale dont ils font l'objet.

Mais ce principe juridique peut être exceptionnellement levé pour des mineurs entre 16 et 18 ans, "compte tenu des circonstances de l'espèce et de la personnalité du mineur ainsi que de sa situation". Dans les faits, l'excuse de minorité n'a été levée que deux fois depuis 1945. En 1989, Patrick Dils, âgé de 16 ans, est condamné à la réclusion criminelle à perpétuité pour le meurtre de deux garçons de 8 ans. Il est finalement acquitté en 2002, victime d'une erreur judiciaire, après avoir passé 15 ans en prison. Le second cas remonte à 2013 : Matthieu M., âgé de 17 ans au moment des faits, est condamné à la réclusion à perpétuité pour avoir violé et assassiné Agnès Marin, une adolescente de 13 ans.

Depuis, la possible levée de l'excuse de minorité a été évoquée dans plusieurs affaires, notamment dans le meurtre de Shaïna, 15 ans, violée, poignardée et brulée vive par un mineur âgé de 17 ans au moment des faits, ainsi que lors des émeutes qui ont suivi la mort de Nahel en juillet 2023.

Outre la volonté d'"ouvrir le débat" sur l'excuse de minorité, Gabriel Attal s'est également dit prêt à "mettre en place une comparution immédiate devant le tribunal pour les jeunes à partir de 16 ans".