François Gabart, "épuisé" : "Je vais mettre des mois pour récupérer cette énergie"

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Anaïs Huet , modifié à
Le skipper français a réalisé l'impossible en battant de plus de six jours le record du tour du monde à la voile en solitaire, dimanche, sur le trimaran Macif. Un exploit réalisé au prix d'innombrables efforts.
INTERVIEW

"42 jours à fond la caisse". C'est l'exploit qu'a réalisé François Gabart, qui a pulvérisé dimanche le record du tour du monde à la voile en solitaire. Au lendemain de ce moment très fort dans la vie du skipper de 34 ans, il a accepté de répondre aux questions de Patrick Cohen dans la matinale d'Europe 1.

"On est toujours en éveil". Le navigateur charentais a pu dormir quelques heures depuis son arrivée à Brest. S'il répond avec le sourire, il ne fait pas de secret de son état physique. "Je suis épuisé. Je vais être épuisé pendant longtemps. Ce qu'on va chercher en soi pour tenir, c'est hyper profond, et ça ne se recharge pas comme ça en quelques heures. Il va me falloir des semaines, des mois pour récupérer cette énergie", confie-t-il. Pour battre de plus de six jours le record du monde, précédemment détenu par Thomas Coville, François Gabart a dû puiser dans ses ressources. "C'est dur, on est toujours en éveil, on est à fond sur le bateau", explique-t-il. "On essaie de tenir le rythme maximum, comme un marathonien va essayer de trouver sa bonne vitesse pour courir les 42 km. Moi, il fallait que je trouve la bonne vitesse pour tenir en arrivant sur la ligne d'arrivée sans aucun regret", illustre le skipper.

"Des pointes de vitesse sur une mer cabossée". Cet impressionnant tour du monde, c'est 52.000 km parcourus, à une vitesse moyenne de 27 nœuds, soit environ 50 km/h. "Avec des pointes jusqu'à 47, peut-être 48 nœuds", précise François Gabart. "Ces pointes de vitesse se font sur une mer cabossée. Si on compare avec une voiture, c'est vrai que 50 km/h, c'est plutôt tranquille. Sauf que là, la route n'est pas plate. C'est comme s'il y avait des dos d'âne en permanence, qu'on était sur un chemin de terre avec des grosses bosses et des grands trous. À une vitesse moyenne élevée, c'est parfois assez inconfortable". 

Un bateau ultra-perfectionné. Heureusement, le Charentais a pu compter sur un trimaran Macif ultra-perfectionné, sur lequel il a longuement travaillé avec son équipe d'ingénieurs. Ce trimaran est manœuvré dans un cockpit entièrement fermé, à l'abri du vent et de l'eau. Une prouesse technologique. "C'est vrai qu'on a franchi un cap important. C'est indispensable aux vitesses où l'on va. Si on va face au vent à une vitesse de 25 nœuds, les vents que l'on reçoit sur le bateau sont supérieurs à 100 km/h. Ce n'est pas seulement inconfortable, c'est juste impossible de tenir, surtout si vous y ajoutez de l'eau à 5 degrés dans la figure", indique le marin. Mais cette installation est aussi gage de sécurité. "Au-delà de la mer et du vent, je suis sur un multicoque qui peut se retourner. Si jamais le pire arrivait, je savais que j'étais immédiatement dans un endroit sécurisé qui est la coque centrale", souligne-t-il.

Selon le skipper, les bateaux seront de plus en plus équipés de cette coque centrale protégée, car elle permet aux skippers d'aller encore plus vite. 

Etre à l'abri du vent et de l'eau, c'est plutôt plaisant pour ce prodige des mers qui, en dépit de son métier, "n'aime pas être dans l'eau". "J'adore la mer, j'adore l'océan, mais je préfère être sur quelque chose qui flotte", glisse-t-il dans un sourire. 

>> Retrouvez l'interview intégrale de François Gabart ici :