Parra, et 10 de der

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Propos recueillis par Sylvain LABBE , modifié à
L'improbable parcours de l'équipe de France jusqu'en finale de la Coupe du monde doit assurément beaucoup au choix, qui l'est tout autant, fait par Marc Lièvremont de replacer Morgan Parra au poste d'ouvreur. A la veille de défier les All Blacks pour ce qui s'apparente déjà à 22 ans au match d'une vie, le petit Caporal du Grand Chelem 2010 est en passe de gagner ses galons de général en chef.

L'improbable parcours de l'équipe de France jusqu'en finale de la Coupe du monde doit assurément beaucoup au choix, qui l'est tout autant, fait par Marc Lièvremont de replacer Morgan Parra au poste d'ouvreur. A la veille de défier les All Blacks pour ce qui s'apparente déjà à 22 ans au match d'une vie, le petit Caporal du Grand Chelem 2010 est en passe de gagner ses galons de général en chef. Lui-même reste incrédule à l'heure de se retourner -pas trop longtemps- sur son parcours dans cette première Coupe du monde. Celui qui à 22 ans était, on a tendance à l'oublier un peu vite, encore il y a peu le benjamin de cette équipe de France avec Raphaël Lakafia, avant que Jean-Marc Doussain (20 ans) ne rejoigne les Bleus en Nouvelle-Zélande, a du mal à réaliser la manière dont s'est finalement concrétisé ces deux derniers mois sa première expérience dans la compétition suprême: "Je n'aurais jamais pensé à la jouer au poste de n°10, avoue l'ancien Berjallien. Maintenant, ça reste un rêve de gamin, j'étais venu avec l'enthousiasme et la volonté de prendre du plaisir au maximum que ce soit sur le terrain ou en dehors, dans la vie de tous les jours. C'est en train de se réaliser, mais pour que le rêve devienne réalité, il faut gagner dimanche." C'est dit, Parra ne veut surtout pas s'arrêter en si bon chemin. A l'heure de retrouver les Blacks, le Clermontois fait peu de cas de ce qui pourrait pourtant s'apparenter, en cas d'exploit de la part des Bleus dimanche, à l'Eden Park, à un coup de maître de la part de Marc Lièvremont qui, le 24 septembre dernier, choisissait de désavouer François Trinh-Duc, son ouvreur pourtant titulaire depuis bientôt quatre ans, pour bombarder Parra nouveau n°10 des Bleus. Un intérim qui va durer, au point de voir le Petit Caporal du Grand Chelem 2010 enchaîner aujourd'hui un quatrième match dans la peau du taulier à l'ouverture, associé à son ancien concurrent en neuf, Dimitri Yachvili, avec lequel son association se bonifie de sortie en sortie. Parra: "Quand je vais retrouver mon club, ce sera avec le 9 dans le dos " "J'essaye de bien communiquer durant la semaine, de prendre encore plus d'assurance à ce poste, après, il est certain qu'en jouant plus, je me sens mieux, avoue-t-il presque du bout des lèvres. Maintenant, je n'ai pas la prétention de dire que ça se passera bien ce week-end. En tout cas, je vais tout faire pour..." On le devine encore rétif à l'idée d'admettre qu'il possède aussi un avenir désormais à ce poste d'ouvreur, où il effectua ses débuts à Bourgoin. Pourtant, sa progression apparaît constante jusqu'à cette performance majuscule en demi-finale face au Pays de Galles, où dans la conduite du jeu, la charge des tirs au but (3 sur 3), récupérée sans broncher suite à la blessure de Yachvili, et plus encore dans l'abattage défensif, il aura porté son équipe à bout de bras, ou presque. Une performance qui lui vaudra d'abord les louanges d'un David Ellis, spécialiste de la défense au sein du staff tricolore: "Pour moi, en tant qu'entraîneur de défense, c'est un rêve de travailler avec un n°10 aussi efficace que lui, expliquait l'Anglais, comblé par les 14 plaquages assénés par le Clermontois. Il a plaqué Jamie Roberts, George North plusieurs fois, et il n'a jamais subi. Il fait un match superbe." Et ce n'était rien encore au regard des commentaires à venir des deux références au poste, ni plus ni moins que Jonny Wilkinson et Dan Carter, tous deux unanimes dans l'éloge du Tricolore. "Parra est pour moi un joueur très doué, appréciera ainsi Wilkinson sur RMC. Que ce soit dans ses gestes ou lorsqu'il il tape très bien le ballon. Il a la capacité de prendre les grandes décisions et de faire bouger son équipe. Il est crucial. C'est déjà incroyable ce qu'il a fait en 10. S'il joue avec confiance, il peut être essentiel en finale. Il fait le lien avec le 9 et les avants." Rien que ça... "Il s'est extrêmement bien adapté à ce poste, renchérit Carter en personne. Il fait toujours preuve de sang-froid et même s'il n'a pas joué beaucoup à ce poste, il s'est surpassé dans les matches couperets. C'est un joueur très fiable et régulier. Il a vraiment apporté beaucoup à l'équipe de France. Je pense qu'il a vraiment amélioré son niveau de jeu. Ce n'est peut-être pas un grand joueur par la taille néanmoins c'est un bon défenseur, comme il l'a montré la semaine dernière, il n'y a pas grand chose à redire en ce qui concerne son jeu." N'en jetez plus... Informé de ces louanges, l'intéressé en rougirait presque: "Venant de lui, ça fait très plaisir. Mais quand je vais retrouver mon club, ce sera avec le 9 dans le dos. Mais bon, 9 ou 10, tant que je joue et que je prends du plaisir..." A l'évidence, il en fait le plein de puis deux mois, même s'il subit tout autant l'environnement tourmenté des Bleus: "A force, on a l'habitude, on a passé quelques semaines seuls contre tous ; on pensait après l'Angleterre avoir un peu de soutien et derrière, après ce match face au Pays de Galles, ont s'est retrouvés de nouveau avec tout contre nous. On en a l'habitude... [...] C'est l'histoire de ce groupe depuis quelques mois, on est passés par des moments très difficiles, des moments aussi de joie. [...] On essaye de rester dans notre bulle. Il y a les retours positifs de certains et d'autres négatifs, qui nous disent qu'on ne mérite pas d'être où on est. C'est pour nous ce qui fait le plus mal au coeur parce qu'on se bat sur le terrain pour essayer de donner la plus belle image possible du rugby français. Et aujourd'hui, quand on voit certaines critiques de supporters, ou de certains joueurs gallois ou anglais, ça fait mal, mais ça resserre aussi les liens entre nous." Que ce soit bien au chaud de ses "gros" en 9 ou plus exposé que jamais en 10, Parra reste le même. Engagé, avant tout.