Ippon sur la mêlée ?

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SYLVAIN LABBE, envoyé spécial , modifié à
Titulaire aux côtés de Servat et de Mas au sein d'une première ligne, qui n'avait plus été réunie depuis une victoire sur les Springboks en novembre 2009, Fabien Barcella, au même titre que William Servat, est en quête de rythme et de repères quinze mois après sa blessure. Raison de plus de ne pas sous-estimer une mêlée japonaise qui, à l'image de toute une équipe, n'aurait plus rien d'un faire-valoir.

Titulaire aux côtés de Servat et de Mas au sein d'une première ligne, qui n'avait plus été réunie depuis une victoire sur les Springboks en novembre 2009, Fabien Barcella, au même titre que William Servat, est en quête de rythme et de repères quinze mois après sa blessure. Raison de plus de ne pas sous-estimer une mêlée japonaise qui, à l'image de toute une équipe, n'aurait plus rien d'un faire-valoir. Des repères à retrouver... "Le sommet de ma carrière." Fabien Barcella n'hésite pas une seconde lorsqu'on lui rappelle la dernière fois qu'il fut titularisé en bleu aux côtés de William Servat et Nicolas Mas. C'était à Toulouse, en novembre 2009, et cette première ligne, où figurait le pilier biarrot, en plein boom à l'époque, va littéralement tordre son homologue sud-africaine pour bâtir un succès (20-13) qui encore aujourd'hui fait figure de référence dans l'ère Lièvremont. Seulement, comme le dit si bien Barcella, qui samedi, à North Shore, débutera son premier match officiel depuis quinze mois, "les temps ont changé. Moi, je me suis blessé durant environ un an. William revient aussi de blessure après avoir été au sommet durant un an, donc des choses ont changé, c'est sûr. Ces trois-là se sont enfin retrouvé pour une séance au joug mardi matin, sur le terrain d'Onewa Domain, dont on imagine qu'elle fut riche d'enseignements après une si longue parenthèse. Même Nicolas Mas, lui épargné par les blessures, reconnaît une certaine appréhension: "Nous allons rapidement devoir retrouver des sensations ensemble, sur les automatismes, les liaisons. Il y a un peu de stress par rapport à cela." Le niveau d'excellence et le pedigree de la mêlée française pourraient-ils devoir en souffrir ? "William (Servat) nous aide beaucoup aussi, mais sur les trois, on est quand même deux convalescents. On va essayer de s'entraider tous les deux et de faire notre maximum pour apporter le plus à l'équipe. [...] Il faudra d'abord être propre sur nos ballons pour essayer de donner le maximum de ballons à nos trois-quarts. Et sur les leurs, on essaiera de faire le maximum pour les en priver, même si sur ce que j'ai vu, ça semble solide. C'est le genre d'équipes qu'on n'est pas habitué à jouer non plus, on part un peu dans l'inconnu. On ne les a vus qu'à la vidéo face aux équipes du Pacifique, puis contre l'Italie ; on a vu que des images, mais on attend d'être vraiment confrontés à la réalité du terrain." Plus que jamais, la première mêlée sera décisive samedi. Et Barcella d'annoncer: "On est prêts, mais on fait preuve d'humilité. On entre dans la compétition, mais on a encore « tué personne »." La mêlée nippone, ça va vite... "Ils ont résisté au paquet d'avants italien, ce n'est pas rien !" Renseigné au moins par l'analyse vidéo, Barcella ne tombe pas dans la fausse modestie à l'heure d'évaluer un paquet d'avants japonais qui, à en croire ses sorties récentes, n'a plus grand-chose à voir avec sa réputation de faire-valoir. S'ils ne sont pas devenus tout d'un coup des foudres de guerre dans ce secteur, les "Cherry Blossoms", qui ne se sont pas plus acheté une culture de la mêlée, affichent de nets progrès. "Je dirai que ce n'est pas forcément le point fort de leur équipe", relève pudiquement le maître es-mêlée, Didier Retière. Pourtant, Lionel Nallet relève un parallèle. "Ils me font un peu penser aux Ecossais ou aux Australiens dans ce domaine : tu as l'impression que tu vas les défoncer, mais au final, non seulement tu ne les domines pas, mais c'est toi qui recules !" Quant à la bataille des airs, "en touche, ils ont deux ou trois combinaisons simples, mais efficaces. Ils contrent en revanche très bien, avec trois blocs. Il va falloir bien travailler dans ce secteur." Des phases statiques de combat, où les Nippons auraient trouvé la parade, sortes d'éjecteurs très précoces de leurs ballons pour mieux libérer le jeu enlevé de leurs trois-quarts. Pour Servat, le problème est posé et bien réel: "Ce sont des garçons qui cherchent sans arrêt à être efficaces, et ils ont les moyens de l'être, prévient le talonneur. Et je pense qu'ils ont énormément progressé en mêlée. Si on a retenu de la dernière Coupe du monde que c'était une nation faible dans ce secteur, ils ne perdaient finalement pas de ballons, qui étaient sortis proprement grâce à une transmission hyper rapide entre le 9 et le 8 - estimée de sept à huit secondes-, alors que les mêlées adverses avaient le dessus. Ce serait une grosse erreur que de s'imaginer qu'on a de l'avance sur quoi que ce soit." De l'à propos, Messieurs... De là à imaginer les Bleus ne pas tirer profit de leur potentiel évident, il y a un pas que Retière semble presque disposé à franchir, même s'il recommande surtout de la précision et de la lucidité à ses hommes: "C'est peut-être là qu'il faudra appuyer, mais on le sait, c'est toujours assez difficile de jouer la mêlée contre une équipe qui ne tient pas forcément à relever le combat dans ce secteur. Il ne faudra pas non plus s'y perdre ; on essaiera d'appuyer à cet endroit-là au moment où il le faudra, mais avec le plus d'à-propos et d'efficacité possible. Mais ce ne sera pas la seule arme dont on disposera pour essayer de battre les Japonais." Aux Bleus de ne pas se tromper dans le choix des armes.