Eric Ngapeth: "Earvin s'en fout totalement"

  • Copié
Propos recueillis par Martin ROY , modifié à
A l'issue d'une saison prolifique qui a vu le Tours Volley-Ball glaner un titre de champion de France et une Coupe de France, et à l'aube d'une deuxième journée de Ligue A à Rennes, Eric Ngapeth nous livre les ambitions de sa formation pour ce nouvel exercice. L'occasion aussi pour l'entraîneur du TVB de revenir sur l'exclusion du groupe France de son fils, Earvin, lors du Mondial italien.

A l'issue d'une saison prolifique qui a vu le Tours Volley-Ball glaner un titre de champion de France et une Coupe de France, et à l'aube d'une deuxième journée de Ligue A à Rennes, Eric Ngapeth nous livre les ambitions de sa formation pour ce nouvel exercice. L'occasion aussi pour l'entraîneur du TVB de revenir sur l'exclusion du groupe France de son fils, Earvin, lors du Mondial italien. Éric, votre victoire dans le tournoi de la Ligue d'avant-saison vous a-t-elle permis d'emmagasiner de la confiance ? C'est une compétition qui permet de prendre des informations sur nos adversaires potentiels. Il était important qu'on la gagne. Ça nous a surtout permis de ne pas avoir de pression en ayant perdu à domicile. Comment décririez-vous l'état de forme de vos joueurs après cette première victoire face à Beauvais ? Les joueurs sont en train d'atteindre leur forme maximum. On a pris beaucoup de retard sur le plan du travail collectif parce que durant toute notre phase de préparation, on avait quatre joueurs qui n'étaient pas présents. Mais les joueurs sont prêts à défendre leur titre. L'an passé, on a gagné le championnat et la Coupe de France. L'un des objectifs majeurs, c'est de se qualifier pour une Champions League, ça passe par le gain d'un de ces deux titres. Votre nouveau passeur, le Brésilien Rafael Redwitz, a-t-il réussi à s'intégrer au sein du dispositif tactique ? Totalement. Il est maintenant en train d'essayer de trouver la qualité de passes qui correspond à chacune des individualités. Mais étant donné qu'il n'évolue avec la plupart des joueurs majeurs que depuis cinq jours, il est évident qu'il lui faudra encore un peu de temps pour parfaitement s'acclimater au dispositif. On vous annonce un peu partout comme le grand favori du prochain exercice. Est-ce aussi votre sentiment ? Pas plus que ne l'est Poitiers. On nous annonce favori parce qu'on sort d'une bonne saison et qu'on a fait le doublé mais il ne faut pas oublier que ce doublé a été construit progressivement. Aujourd'hui, on repart à zéro. Au niveau de l'effectif, des individualités, je n'ai pas l'impression que Poitiers soit moins fort que nous. C'est une équipe qui va évidemment se battre pour le titre majeur. Ce qui est sûr, c'est qu'il ne faudra pas faire de faux-pas contre les équipes réputées plus faibles. Vous parlez d'équipes faibles, à l'inverse, quelles sont selon-vous les forces en présence dans cette Ligue A, version 2010-11 ? Bien sûr, il y a Poitiers. Et puis toutes les valeurs sûres du championnat. Il y a Cannes qui a fini deuxième de la saison régulière l'an passé sans perdre de matches mais aussi Paris, qui reste toujours Paris. Je viens de voir qu'ils ont fait souffrir Poitiers récemment. Toutes ces équipes, il faudra s'en méfier, c'est évident. "En équipe de France, il y a des choses qui ne vont pas Vous-méfiez-vous de votre futur adversaire, Rennes, chez qui vous vous déplacez samedi ? Bien sûr. Rennes a fait un recrutement intéressant. Ils ont fait appel à des joueurs beaucoup plus spécialisés dans le domaine de la réception avec notamment l'arrivée de Sébastien Frangolacci et d'Olivier Ragondet, qui est l'un des meilleurs de sa génération. Après ils ont recruté un attaquant de pointe assez physique. Pour l'instant, la mayonnaise n'a pas encore pris mais pour les avoir vu jouer en préparation, je pense qu'ils auront plus d'arguments à faire valoir que la saison dernière. On va jouer là bas en se disant que ça risque d'être un match plus difficile qu'on ne le pense. Le TVB, c'est un peu une histoire de famille chez les Ngapeth. Qu'est ce que ça fait d'avoir ses deux fils, Earvin et Swan, sous ses ordres ? Ce n'est pas une histoire de famille. Earvin est venu parce qu'il avait besoin, pendant une saison, d'apprendre un petit peu le professionnalisme. Swan avait quant à lui un niveau correct par rapport à sa catégorie d'âge donc il est venu naturellement là où il avait la possibilité de s'épanouir. Ils avaient tous les deux envie d'embrasser la carrière professionnelle, ils ont été là où il y avait des opportunités de s'exprimer. Aujourd'hui, c'est Tours, mais ça aurait aussi bien pu être Poitiers ou un autre club. Comment votre fils, Earvin, a-t-il vécu son retour à Tours après les évènements du Mondial transalpin ? Il était très content de rentrer. Il avait l'impression là-bas de ne pas vivre dans un milieu qui ressemblait à ce qu'on lui avait appris ici, avec des valeurs de combat perpétuel et un minimum de justice. Il a vécu une période assez difficile, c'est la raison pour laquelle il était extrêmement heureux de rentrer parmi les siens. Je ne parle pas seulement de sa famille mais aussi de ses coéquipiers, à l'intérieur d'un club très structuré, où il peut jouer avec des joueurs qui ont beaucoup de maturité et beaucoup de qualités techniques. Comment, en tant que père, avez-vous jugé tout cela, de l'extérieur ? Disons que personnellement je n'ai jamais remis en cause la manière dont était gérée l'équipe de France. Philippe Blain est un entraîneur que je connais très bien depuis maintenant trente ans. On a même partagé la même chambre durant notre carrière, je n'ai jamais voulu critiquer la manière avec laquelle les choses avaient été faites. Mais maintenant, étant donné que mon fils a été victime d'un système, car tout entraîneur dirige avec son propre système, je suis obligé de dire qu'il y a des choses qui ne vont pas. En particulier avec certains joueurs qui ont un temps de travail très inférieur à d'autres et qui revendiquent une place de titulaire juste à cause de leur ancienneté, ce n'est pas normal. Earvin regrette-il ses insultes proférées à l'encontre de Philippe Blain ? Il n'est pas dans les regrets. Il ne faut pas parler vraiment d'insultes. Ce sont des choses qui se sont passées dans un vestiaire où l'entraîneur, le principal concerné, n'était même pas là. On a été tenté de titiller Earvin ou de l'humilier. On a utilisé un évènement pour lui faire payer un certain nombre de choses. Comme Stéphane Antiga l'a dit à un moment donné, on a essayé de lui faire payer son agressivité à l'entraînement et son combat perpétuel pour gagner sa place sur le terrain. Mais aujourd'hui, il s'en fout totalement. Peut être qu'il n'aurait pas dû crier aussi fort dans le vestiaire, quand l'entraîneur n'était pas là. Mais comme il le dit lui-même, beaucoup d'autres ont également crié fort quand l'entraîneur n'était pas là. Le fait que ça se soit cristallisé sur lui, c'est probablement parce que c'est le seul joueur, malgré son âge, qui a fait apparaître un certain nombre de dysfonctionnements dans l'équipe. "Si on continue à faire des passes-droits..." Pensez-vous à une taupe en particulier qui aurait pu rapporter les propos de votre fils hors du vestiaire ? Je pense qu'il serait bien pour avoir l'information de questionner ceux qui étaient dans le vestiaire à ce moment là. Moi je n'y étais pas. Earvin ne peut pas savoir aujourd'hui qui a été le raconter. Mais peu importe, que ce soit Kieffer, Antiga, Henno, n'importe quel autre joueur, qui que ce soit, il faut savoir que ça n'a été qu'une péripétie. Je suis entraîneur de haut niveau depuis 20 ans, le nombre de joueurs qui m'ont insulté dans mon dos, je ne les compte même pas, y compris ceux que j'ai pu entendre derrière une porte de vestiaire. Je le répète, ce qui s'est passé dans le vestiaire, c'est une péripétie. L'exclusion d'Earvin de l'équipe de France, c'est tout simplement qu'on a voulu lui faire payer un certain nombre de choses, notamment le fait qu'il ait manifesté haut et fort qu'il ne comprenait pas la manière avec laquelle l'équipe de France était gérée. Les règles du jeu n'ont pas été établies dès le départ. Je reste persuadé que si on lui avait dit dès le départ que quoi qu'il fasse, il y aurait des joueurs qui ne quitteraient jamais le terrain, il n'aurait pas trouvé la motivation pour aller jouer en équipe de France. Espérez-vous revoir votre fils en équipe de France dans les rendez-vous à venir ? Je pense qu'il réintègrera le groupe France seulement si les conditions sont réunies. Quelles sont-elles ces conditions ? On va voir. Ça dépendra aussi de qui va entraîner l'équipe, quels seront les joueurs qui seront sélectionnés, comment la saison va se passer, quelles seront les relations qu'il aura avec ses coéquipiers. Mais je pense qu'aujourd'hui, aller en équipe de France, compte tenu de ce qu'il a vécu, c'est loin d'être une priorité. Sous-entendez-vous que tant que Philippe Blain restera en place, Earvin ne remettra pas les pieds en équipe de France ? Blain ou un autre. Ce qui importe, ce n'est pas Philippe Blain, c'est la manière avec laquelle sera gérée l'équipe nationale, point barre. Philippe Blain ou pas Philippe Blain. Si l'équipe est gérée de la manière la plus transparente possible, il n'y aura pas de problèmes. Si on continue à faire des passes-droits avec des sportifs professionnels qui partent en vacances cinq mois, qui reviennent et qui sont titulaires aux Championnats du monde, ça m'étonnerait qu'il y aille. Et moi je ne vais pas l'encourager à y aller sachant qu'il supportera beaucoup moins ce genre de choses. Personnellement, je n'ai vu jusqu'à présent aucune discipline où les choses se passent de cette manière. À un moment donné, quand on va juger cette affaire, s'il y a jugement, il faudra juger le fond.