Rentrée scolaire : ces six dossiers chauds dans le cartable du ministre Blanquer

Parmi les nombreux chantiers de cette année, le ministre de l'Education va devoir s'attaquer à celui de la rémunération des enseignants.
Parmi les nombreux chantiers de cette année, le ministre de l'Education va devoir s'attaquer à celui de la rémunération des enseignants. © THIERRY ZOCCOLAN / AFP
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Le ministre de l’Education nationale se montre confiant pour l’année scolaire en cours. Pourtant, tout n’est pas si calme sur le front de la rentrée.

"Décontracté". Tel est le maître mot de Jean-Michel Blanquer pour la nouvelle année scolaire, prononcé mercredi après-midi lors d’une conférence de presse de rentrée. Le ministre de l’Education nationale a vanté la qualité des mesures nouvellement mises en place, telles que l’interdiction du téléphone portable à l’école ou l’instauration d’une évaluation nationale systématique pour les CP, les CE1 et les 6e. Avant même la rentrée scolaire (lundi 3 septembre), ces mesures font déjà "la Une des journaux en Allemagne, aux Etats-Unis et en Espagne", assure le ministre.

La confiance du patron de l’Education nationale n’a d’ailleurs pas échappé à la presse tricolore, jeudi, Le Figaro soulignant par exemple "l’esprit serein" d’un ministre qui s’apprête à aborder une rentrée "à plein volume", pour reprendre, cette fois, les mots de Paris Match. "Emmanuel Macron a perdu Nicolas Hulot, mais il peut compter sur Jean-Michel Blanquer", résume notre chroniqueur David Abiker, lors de sa revue de presse. Pourtant, si le ministre a des raisons d’aborder l’année scolaire avec confiance, il lui reste encore de nombreux dossiers sur le feu.

Des mesures encore à concrétiser pour la rentrée…

Y aura-t-il assez de salles pour les REP ? De toutes les mesures d’ampleur amorcées l’année dernière, l’une des plus abouties reste le passage à 12 élèves par classe en CP et CE1 en zone d’éducation prioritaire (REP et REP +). 2.200 classes ont été créées dans ce cadre l’an dernier, et 4.700 devraient l’être pour cette rentrée. Mais si Jean-Michel Blanquer assure que cette objectif sera tenu, quelques incertitudes perdurent à quelques jours de la rentrée. Le ministère de l’Education nationale reconnaît que 10 à 15% des écoles concernées rencontrent des problèmes de logistiques, notamment un manque de locaux. Fin juin, le SNU-IPP, principal syndicat du primaire, assurait même qu’il y en aurait au moins le double. Et il déplorait la sous-dotation en professeurs dans une vingtaine d’académies, entraînée par cette réforme. Pour Jean-Michel Blanquer, qui salue "la mesure de justice sociale la plus importante qu’[il] connaisse", tout sera opérationnel pour la rentrée ou dans les jours qui suivent. Verdict dans quelques jours, donc.

Qui aura droit à son "plan mercredi" ? Depuis un an, les communes sont autorisées à réinstaurer une semaine de quatre jours d’écoles pour les élèves de primaire. Cette année, 85% d’entre-elles ont opté pour cette option. Pour les encourager, le gouvernement a mis en place un "plan mercredi" : en clair, l’Etat financera la prise en charge par la commune des enfants le mercredi. Le hic ? Tout le monde n’y aura pas droit. Les communes doivent, pour cela, soumettre un projet à l'Education nationale, la Caisse nationale d'allocations familiales (CNAF) et le préfet. Et devant la multiplication des projets, la procédure risque de prendre du temps. Comme le relate Le Parisien, en Seine-Saint-Denis, par exemple, la plupart des communes devront attendre plusieurs semaines après la rentrée avant d’avoir une réponse. Avec le risque que certaines n’obtiennent pas la réponse escomptée.

Des programmes remaniés… seulement sur le papier ? Cette rentrée verra aussi l’entrée en application de quatre circulaires visant à détailler de nouvelles méthodes pour apprendre à lire, écrire ou compter. Elles préconisent, par exemple, un quart d'heure de calcul mental chaque jour dans les classes de primaire, une dictée quotidienne et deux séquences d'écriture "de dix à vingt minutes" par jour. Mais ces mesures suscitent toujours l’ire de la majorité des syndicats enseignants (à l’exception du SNALC-FGAF et du SNE-FGAF, minoritaires) qui, à l’instar de l’Unsa, y voient "une conception archaïque des apprentissages". "Au vu de la formation que les enseignants ont reçue depuis trente ans, c'est un peu comme si on demandait à des prêtres catholiques de devenir protestants. Cela prendra des années", s’inquiète dans Les Echos un bon connaisseur de l’Education nationale, sous couvert d’anonymat.

… D’autres à mettre sur les rails pour l’avenir

Le nouveau bac sera-t-il prêt en 2021 ? Au-delà des mesures qui concernent directement la rentrée prochaine, Jean-Michel Blanquer va devoir manœuvrer pour mener à bien plusieurs autres chantiers au long cours. L’un des plus emblématiques est, évidemment, la réforme du bac. D’ici 2021, les équipes pédagogiques devront être en mesure de préparer les élèves à un grand oral de 20 minutes et un examen de fin d’année remanié autour de quatre épreuves écrites - le français en première, deux épreuves dites de spécialité après les vacances de printemps, et la philosophie fin juin en terminale. Un chantier titanesque érigé au rang de "priorité" dès cette année, selon le ministre.

Comment évaluer les établissements ? Emmanuel Macron l’avait promis durant sa campagne : les établissements scolaires devront être évalués. Progression des élèves dans les matières fondamentales, absentéisme, fidélisation des enseignants… De nombreux critères sont déjà sur la table. "Nous allons avoir une réflexion sur ce sujet", a confirmé Jean-Michel Blanquer mercredi, lors de sa conférence de rentrée. Reste à connaître les détails… et notamment celui de savoir si ces résultats seront rendus publics ou non. Cette piste, non écartée pour l’heure, aurait pour effet, selon ses partisans, d’inciter les établissements à l’excellence. Mais elle risque, également, de détourner les familles des établissements les moins bien notés, accentuant encore une fracture territoriale déjà dénoncée dans de nombreux rapports.

Comment rémunérer les enseignants ? "Un pays qui va bien est un pays qui aime ses professeurs", a martelé Jean-Michel Blanquer mercredi. Pourtant, le climat n’est pas encore au beau fixe entre le ministre et ses troupes. Les syndicats dénoncent toujours le gel du point d’indice des salaires. Et ils demandent la mise en place de la prime de 3.000 euros pour les professeurs en zone d’éducation prioritaire promise par Emmanuel Macron. Partant du constat que les enseignants du primaire français sont parmi les moins bien lotis au sein de l’OCDE, le ministre a promis des négociations avec eux dans les tous prochains mois. Pour les autres, il se montre ouvert à l’instauration d’un nouveau système de prime. Les enseignants, eux, attendent des détails.