Que se passe-t-il dans ces universités qui se rebellent ?

Toulouse, assemblée générale, amphithéâtre, université, étudiants, vote crédit : PASCAL PAVANI / AFP - 1280
Les assemblées générales se sont multipliées dans diverses universités pour voter en faveur du blocage (image de l'université de Toulouse). © PASCAL PAVANI / AFP
  • Copié
Marthe Ronteix avec AFP , modifié à
Entre les blocages, les manifestations et les flambées de violence, l'ambiance n'est plus à la sérénité dans les universités. Mais pourquoi les étudiants sont-ils mobilisés ?

Depuis plusieurs semaines, les universités de Toulouse, Nantes ou encore certains campus parisiens sont bloquées par les étudiants. Ils manifestent notamment contre le nouveau mode d'accès à l'université dont ils dénoncent l'aspect sélectif. Mais depuis une semaine, ils se mobilisent également contre les violences dont certains étudiants ont été victimes lors de l'évacuation d'un amphithéâtre de la fac de droit de l'université de Montpellier. Europe 1 revient sur les divers aspects de cette mobilisation.

D'où vient ce mouvement ?

Acte 1 - L'abandon d'APB. Après le fiasco de la dernière campagne d'inscriptions dans l'enseignement supérieur avec la plateforme Admission Post-Bac (APB), celle-ci a été abandonnée et remplacée par Parcoursup, dont la phase d'inscription se termine d'ailleurs samedi.

Acte 2 - Une réforme de l'accès à l'université. Face à l'augmentation constante du nombre de nouveaux étudiants chaque année, le ministre de l'Enseignement supérieur a décidé d'accompagner le lancement de cette nouvelle plateforme d'une réforme en profondeur de l'accès à l'université.

Le système de tirage au sort pour certaines filières, largement décrié, a été abandonné. À la place, il s'agit désormais pour les futurs étudiants de répondre à un certain cahier des charges : les "attendus". C'est-à-dire qu'ils doivent avoir certaines compétences pour postuler dans une filière. Par exemple, les postulants à la filière Staps (Sciences et techniques des activités physiques et sportives), une section particulière engorgée, devront avoir suivi des enseignements scientifiques pluridisciplinaires (sciences de la vie, sciences humaines et sociales). S'ils ne remplissent pas ces critères, ils devront suivre un "accompagnement spécifique" obligatoire pour se remettre à niveau.

Acte 3 - Une loi adoptée. Ce nouveau système a été validé par toutes les instances législatives et publié au Journal officiel le 9 mars dernier. Une officialisation qui a déclenché la mobilisation des étudiants qui avaient largement dénoncé ce nouveau système d'accès à l'université dès le mois de février.

Acte 4 - Une large mobilisation des étudiants. Les principaux syndicats étudiants voient dans ces nouvelles dispositions une sélection cachée à l'entrée des universités. Car jusque là, tout bachelier avait une place dans la filière de son choix à l'université, quelles que soient ses compétences. Etudiants et professeurs demandent le retrait de cette loi.

L'expédition punitive de Montpellier a mis le feu aux poudres

Depuis une semaine, les revendications contre l'accès à l'université se sont doublé de contestations contre la violence dont ont été victimes certains étudiants militants à l'université de Montpellier. Dans la nuit du jeudi 22 au vendredi 23 mars, une douzaine d'hommes cagoulés ont surgi, armés de tasers et de planches de bois, dans l'amphithéâtre de la fac de droit qui était occupée par des étudiants.

Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux témoignent de la violence de ces attaques. "Plusieurs étudiants ont été blessés, des insultes à caractères raciste et homophobe ont été proférées", a indiqué un communiqué d'organisations syndicales. L'université a fermé ses portes. Sous pression, le doyen de la fac de droit, Philippe Petel a remis sa démission, vingt-quatre heures après l'expédition punitive. Au moins huit des étudiants molestés ont porté plainte contre X.

Deux jours plus tard et alors que les cours sont toujours suspendus, l'enquête s'accélère. Mis en cause par plusieurs témoignages, le doyen et un enseignant ont été mis en examen, jeudi. Plusieurs autres doctorants, chargés de travaux dirigés, sont notamment accusés d'avoir fait partie du commando cagoulé. L'établissement est fermé jusqu'au 3 avril.

Quelle est la situation des universités ?

Université de Montpellier. En parallèle de la fermeture décidée par la direction de l'université, 1.500 à 3.000 étudiants et membres du personnel ont voté mardi pour un "blocus illimité".

Jean-Jaurès à Toulouse. Des sites de l'université Jean-Jaurès (sciences humaines) sont bloqués depuis mars pour protester contre le projet de fusion avec d'autres établissements de la ville et contre la loi sur les modifications d'accès à l'université (loi ORE, Orientation et réussite des étudiants). Les étudiants ont voté la reconduction de l'occupation de l'université jusqu'au 3 avril, jour de participation à une manifestation commune avec les cheminots.

Campus de la Victoire à Bordeaux. Le campus de la Victoire, en plein centre de Bordeaux, est bloqué depuis la mi-mars. Sur Facebook, le collectif "Bordeaux Victoire contre la sélection" a déploré "l'aggravation des conditions de sécurité du blocage", rapporte LCI

Faculté de lettres de Nancy. La faculté de lettres de Nancy est également bloquée "jusqu'à ce que Macron retire la loi" ORE, a indiqué Romane Mayer, porte-parole de l'Unef, 2ème syndicat étudiant et opposé à la réforme.

Tolbiac à Paris. À Paris, le site de Tolbiac (université Panthéon-Sorbonne) est fermé depuis lundi. Après l'assemblée générale de jeudi, les étudiants ont décidé d'occuper l'université jusqu'au mardi 3 avril.

Université de Nantes. Le blocus a été levé vendredi, a indiqué l'université. Deux amphis restent occupés à la fac de lettres et les cours ont été transférés sur un autre site. Rassemblés en assemblée générale, 700 étudiants ont voté pour la poursuite du blocus et la participation à plusieurs journées d'action : les 3, 7, 12, 14 et 19 avril prochains.

Les universités de Lille, Dijon, Rouen, Rennes et Caen sont également concernées par des blocages.