Qu'attendre du premier vaccin contre la dengue, vendu au Mexique par Sanofi ?

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avec AFP , modifié à
Le laboratoire français a obtenu la première autorisation de mise sur le marché d'un vaccin contre la dengue.

"Dans le domaine des vaccins, c'est l'innovation de la décennie", vante Olivier Charmeil, PDG de Sanofi Pasteur. Le laboratoire pharmaceutique français a décroché au Mexique la première autorisation de mise sur le marché de son vaccin pour la prévention de la dengue, le Dengvaxia. Jusque-là, aucun traitement n'offrait une immunité face à cette maladie douloureuse, voire mortelle.

En quoi ce vaccin est-il historique ?La dengue était jusqu'à présent un défi pour la recherche pharmaceutique. Causée par quatre virus distincts, il fallait trouver une réponse immunitaire protectrice contre chacun d'eux. Après 20 ans de recherche et un investissement d'1,5 milliard d'euros, Sanofi Pasteur a fini par aboutir à un vaccin commercialisable. Pour donner son autorisation, les autorités sanitaires mexicaines se sont basées sur les résultats d’essais cliniques menés dans 15 pays différents, auprès de 40.000 personnes, et auxquels a participé activement le Mexique. Résultat de ces études : Dengvaxia protège à 66% les individus vaccinés âgés de 9 ans et plus (93% pour la dengue hémorragique), et évite à 80% le risque d'hospitalisation pour la dengue.

D'ici la fin du mois, Sanofi Pasteur compte d'ailleurs déposer des demandes d'autorisation du Dengvaxia dans vingt pays, notamment en Asie et en Amérique du Sud, où la maladie sévit le plus. Une demande pour l'Union européenne est prévue début 2016, une autre aux Etats-Unis en 2017.

La dengue, un fléau à vitesse grand V. Selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), la dengue est la maladie transmise par les moustiques dont l'expansion mondiale est actuellement la plus rapide : près de 400 millions de nouvelles infections sont recensées chaque année. Susceptible d'entraîner une forte fièvre incapacitante, la dengue engendre aussi des douleurs osseuses et articulaires. La forme sévère de la maladie, la dengue hémorragique, tue 22.000 personnes par an, selon l'OMS.

En l'espace de 50 ans, la dengue est devenue endémique dans plus d'une centaine de pays des régions tropicales et subtropicales, à la faveur du développement urbain, de la mobilité des populations et du changement climatique. Environ 4 milliards de personnes y sont potentiellement exposées en Amérique latine et centrale, Afrique et Asie-Pacifique.

Il reste encore des doutes à lever. Mais ce vaccin pose encore quelques questions. Le vaccin semble en effet contre-productif chez les enfants de moins de neuf ans. Et les chercheurs ne savent toujours pas pourquoi. Son efficacité semble également s'estomper chez les personnes vaccinées après plus de 16 ans. Il y a donc encore, beaucoup à apprendre de ce traitement.

Chiffre d'affaires attendu : 3 milliards d'euros. Une chose est certaine : Sanofi n'a pas le droit à l'erreur. Le laboratoire, confronté à une baisse des ventes de la division diabète, l'un de ses fleurons, mise beaucoup sur ce qu'il considère comme un potentiel "blockbuster". "Il y a un besoin thérapeutique important, mais aussi une réelle raison économique", confirme Sébastien Malafosse, analyste chez Oddo Securities. Et pour cause : les "cibles" se trouvent dans les pays émergents, où Sanofi est peu présent. En outre, il n'est confronté, pour l'heure, à aucune concurrence.

Le prix du vaccin, lui, n'a pas été communiqué. "L'objectif est qu'il soit abordable", indique simplement le laboratoire.  Quelques millions de doses sont déjà prêtes pour des livraisons rapides et Sanofi Pasteur vise une capacité annuelle de production de 100 millions de doses à partir de 2017. Chiffre d'affaire attendu : 3 milliards d'euros à long terme.