Valls candidat à Barcelone : critiqué en France, désiré en Catalogne ?

Manuel Valls fait un selfie dans les rues de Barcelone, en mars dernier.
Manuel Valls fait un selfie dans les rues de Barcelone, en mars dernier. © Pau Barrena / AFP
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Henry de Laguérie et Hadrien Bect, édité par Thibaud Le Meneec
Mardi soir, l'ancien Premier ministre français devrait donner le coup d'envoi de sa campagne électorale pour la mairie de Barcelone. Un choix aussi apprécié en Catalogne que critiqué en France.
ON DÉCRYPTE

C'est le grand jour pour Manuel Valls. Après plusieurs mois de réflexion, l'ancien Premier ministre va définitivement franchir les Pyrénées et annoncer mardi soir, lors d'une soirée très attendue et très médiatisée, sa candidature à la mairie de Barcelone

 

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Opération séduction. Un an et trois mois après son élection comme député de l'Essonne, le parlementaire français s'apprête à changer de vie et s'installer à Barcelone, comme il l'a confié à Europe 1. Depuis plusieurs mois, il mène un lobbying actif auprès de plusieurs grands patrons catalans, à la recherche de soutien et de financement. Aujourd'hui, l'opération séduction commence à fonctionner. "Manuel Valls a une expérience politique extraordinaire en France, il connaît très bien l'Europe et parle catalan et espagnol", s'enthousiasme le riche publicitaire Lluís Bassat.

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S'il est capable de s'entourer de personnes qui connaissent très bien la ville, il pourrait être un très bon maire

 

"Son défaut, ce serait peut-être de mal connaître Barcelone", poursuit le principal artisan des Jeux olympiques de 1992. "Mais s'il est capable de s'entourer de personnes qui connaissent très bien la ville, il pourrait être un très bon maire." L'ancien Premier ministre a justement recruté des professionnels chevronnés, qui ont travaillé pendant longtemps à la mairie. Il s'est aussi entouré des meilleurs communicants et a sondé l'opinion publique : le tourisme de masse, la hausse des loyers, l'insécurité et les vendeurs à la sauvette exaspèrent l'électorat conservateur. Il mettra l'accent sur ces sujets lors de la campagne électorale jusqu'au scrutin, prévu en mai 2019. Mais il a aussi des propositions-chocs : Manuel Valls devenu candidat aux municipales espagnoles aimerait que Barcelone devienne la co-capitale du pays, avec Madrid.

"Pas la clé de voûte de la majorité". De l'autre côté des Pyrénées, l'ambiance est aux antipodes de ce parfum de conquête. Sans parler d'une certaine forme d'amertume dans sa ville d'Évry, à l'Assemblée nationale, ses opposants les plus durs n'hésitent pas à parler de "fantôme". Et c'est vrai que depuis quelques mois, Manuel Valls n'y fait que de rares apparitions, présents sept fois au Palais-Bourbon depuis le mois de mai. "Il vient aux réunions de groupe", le défend un poids lourd de La République en marche, avant d'ajouter avec pudeur "qu'il n'est pas la clé de voûte de la majorité".

Entendu sur europe1 :
Par le passé, ses interventions étaient charpentées. C'est tout le contraire de ce à quoi nous avons assisté dans les six derniers mois

"C'est difficile d'être actif quand on n'est pas là", constate Sébastien Huyghe, député Les Républicains du Nord qui l'a côtoyé en commission des lois. "Par le passé, lorsqu'il intervenait, c'étaient des interventions charpentées qui avaient du sens. C'est tout le contraire de ce à quoi nous avons assisté dans les six derniers mois. On ne peut pas être à la fois à Barcelone pour préparer une candidature et sur les bancs de l'Assemblée nationale pour légiférer. Il faut faire un choix."

Appels à la démission. "Un mandat de député et l'indemnité qui va avec, ce n'est pas un salaire pour faire autre chose", dit encore plus franchement Alexis Corbière, élu La France insoumise de Seine-Saint-Denis. "Chacun le comprendra : il n'y a pas 'je suis candidat à la mairie de Barcelone, mais je reste élu de l'Essonne'. Sur ce point, on doit rester clairs et conformes à une certaine éthique républicaine." Démissionner, c'est ce à quoi appelle aussi le Parti socialiste, son ancienne écurie. Même des députés LREM se sont prononcés pour son départ, lui que "nouveau monde" macroniste n'a jamais véritablement intégré.