Cinq techniques pour chahuter à l'Assemblée

Brandir une affiche, comme ce député communiste en 2010, est l'un des moyens de se faire entendre à l'Assemblée.
Brandir une affiche, comme ce député communiste en 2010, est l'un des moyens de se faire entendre à l'Assemblée. © MAXPPP
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Dixit Claude Bartolone, son président, l'Hémicycle ressemble parfois à une cour de récréation. Best of.

La phrase. "Je veux d'abord que nous améliorions l'image que nous donnons collectivement aux Français. On n'imagine pas le nombre de lettres de nos concitoyens se plaignant de comportements de 'cour de récréation' sur les bancs de l'Assemblée." Claude Bartolone n’est pas content, et il l’a fait savoir. Jeudi dernier, lors de ses vœux à la presse, le président de l’Assemblée nationale a prévenu qu’il se montrerait "intraitable" avec les députés qui, estime-t-il "ne grandissent pas l'image de la politique".

Force est de constater que le chantier s’annonce difficile. Claude Bartolone n’a ainsi pas pu empêcher un incident mardi lors des questions au gouvernement, au sujet du mariage gay.

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>>> Europe1.fr a listé les comportements dignes d'une "cour de récréation" dont nos élus peuvent parfois se rendre coupable. Pour le meilleur et pour le pire.

Faire claquer les pupitres. On ne le sait pas assez mais chaque député dispose devant lui d’un pupitre dans l’Hémicycle. Or, un pupitre, ça claque. L’objet est devenu le plus sûr moyen de perturber une réponse ou une question venue de l’autre camp. Rares sont les séances qui échappent à la tradition. Exemple en octobre 2010, quand Georges Tron, alors secrétaire d’Etat à la Fonction publique, met en cause le travail d’une députée d’opposition :

Le problème de cette méthode, c’est qu’elle n’est pas très télégénique. Si dans l’Hémicycle le bruit est assourdissant, le téléspectateur, faute de micros suffisants, est privé du joyeux brouhaha. Et l’image d’un député ouvrant et rabattant son pupitre n’est pas forcément glorieuse.

Hurler, crier, vociférer. C’est l’autre pratique fort répandue parmi les députés. Si l’ambiance est un tant soit peu houleuse, si le sujet abordé est un tant soit peu polémique, et si en plus les caméras sont de la partie, difficile pour le député souhaitant poser une question ou pour le ministre tentant d’y répondre de se faire entendre. Parmi les très nombreux exemples à disposition, l’un des plus récents, quand Christiane Taubira, l’une des cibles préférées de la droite, répondait en octobre 2012 à une question sur la dépénalisation du cannabis. A noter la quasi-impuissance de Claude Bartolone à faire revenir le calme.

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Cette pratique a également une limite en termes d’image. Les députés qui hurlent ne se montrent en effet pas forcément sous leur meilleur jour.

 

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Brandir des pancartes. Là encore, la présence des caméras est obligatoire. Ce type d’opération très visuelle est donc réservé aux séances télévisées et demande une certaine organisation. Mais l’effet est garanti. Le hic, c’est que la pratique est interdite. Ce que les députés socialistes semblaient ignorer ou ont feint d’ignorer en juin 2011 :

Attention aussi à s’assurer d’être accompagné dans l’initiative. Un député isolé, tel Nicolas Dupont-Aignan en février 2012, aura plus de mal à se faire remarquer. Et pourrait manquer son effet.

Chanter. C’est sans doute la pratique la plus originale, mais elle a le mérite de rester dans les mémoires. Le cas d’école, c’est Jean Lassalle, qui, en juin 2003, entonne l’hymne des Pyrénées en basque pour protester contre la fermeture d’une gendarmerie. Même le regard (très) noir de Nicolas Sarkozy ne l’arrêtera pas, et gageons que le président de l’époque de l’Assemblée, Jean-Louis Debré ("Comment il s’appelle lui ?") se rappelle désormais du nom du député MoDem.

L’action peut être aussi collective. Dans l’exemple suivant, c’est la Marseillaise, forcément, qui a été choisie par les députés socialistes en 20 janvier 2009. En pleine réforme du Parlement, l’opposition de l’époque se rassemble au pied du Perchoir et entonne l’hymne nationale.

(A partir de 4’, vidéo postée par le groupe socialiste) :

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Claquer la porte. C’est l’ultime affront, celui qui débouche immanquablement sur une suspension de séance. Et il n’est pas si rare. Depuis l’arrivée de la gauche au pouvoir et les premiers travaux parlementaires, en juillet, la droite a dû quitter avec fracas l’Hémicycle une bonne demi-douzaine de fois. Ainsi quand, le 23 octobre, Jean-Marc Ayrault l’a accusée de "vouloir l’échec de la France".

Là encore, il vaut mieux s’assurer d’être suivi. Un départ solitaire, comme celui de Christine Boutin, "outragée" par Lionel Jospin en 1998 en plein débat sur le Pacs, a singulièrement moins de panache.