Lagarde, un dossier piégeux pour le gouvernement

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et Alexandre Kara , modifié à
DÉCRYPTAGE - L’Elysée marche sur des œufs: comment sauver Lagarde sans donner le sentiment de protéger Tapie?

Contexte. L’heure des explications. Jeudi, l’actuelle directrice du Fonds monétaire international (FMI) est convoquée devant les magistrats de la Cour de justice de la République (CJR). Christine Lagarde va y défendre sa décision de recourir en 2007 à un arbitrage privé et coûteux pour régler le contentieux avec Bernard Tapie sur la vente d'Adidas. L’homme d’affaires avait empoché plus de 400 millions d’euros. A l’issue de son audition, elle pourrait être mise en examen, à moins qu’elle ne soit placée sous le statut de témoin assisté. Un dossier en tout cas bien délicat à gérer pour l’Elysée, confronté à deux problèmes.

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Sauvegarder l’image de la France. L’affaire DSK est encore dans toutes les têtes. La France ne peut donc s’offrir le luxe de voir un second directeur du FMI français obligé de démissionner pour cause d’affaire judiciaire. Il en va de la crédibilité de la France sur la scène internationale. Le député UMP, Pierre Lellouche (photo) dit ainsi ressentir "de l’inquiétude. On a eu une mauvaise affaire avec DSK à la tête du FMI donc si on devait avoir une autre polémique autour de la nouvelle directrice, ce ne serait pas bon pour la France."

A l’Elysée comme à Bercy, on est donc très prudent et on se garde bien de désigner l’ex-ministre de Nicolas Sarkozy comme la responsable. François Hollande comme Pierre Moscovici auraient au contraire affirmé leur confiance à l’égard de Christine Lagarde. Ce qui n’a pas empêché le ministre de l’Economie, mercredi, de faire savoir dans Le Monde qu’il envisageait plusieurs actions judiciaires. "S'il s'avérait que les intérêts de l'Etat ont été lésés, alors Bercy utilisera les voies de droit qui sont à sa disposition, parmi lesquelles la constitution de partie civile dans le volet non ministériel du dossier", assurait-il dans le quotidien du soir. 

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Ne pas apparaître comme complaisant avec Bernard Tapie. Après l’affaire Cahuzac, pas question de laisser transparaître une quelconque proximité avec le sulfureux ancien ministre de François Mitterrand. Une prise de distance d’autant plus nécessaire que depuis le début de l’affaire, le PS s’est toujours montré très critique sur la procédure d’arbitrage initié par le précédent gouvernement. A tel point que ce sont les socialistes qui sont à l’origine de la saisine de la CJR. Le gouvernement s’offre donc une nouvelle version du "ni ni" : ni donner le sentiment de lâcher la vitrine française du FMI, ni laisser penser qu’il voudrait étouffer l’affaire Tapie. Pas simple.