Les affrontements ont fait au moins 52 morts à la frontière entre la bande de Gaza et Israël. 1:53
  • Copié
Thibaud Le Meneec avec Gwendoline Debono et AFP , modifié à
Une cinquantaine de Palestiniens, protestant contre l'inauguration de l'ambassade américaine à Jérusalem, ont été tués lundi dans la bande de Gaza lors de tensions à la frontière avec l'armée israélienne.

"Notre colère vaut le risque." Comme Ahmed, des milliers de Palestiniens se sont rassemblés à la frontière entre la bande de Gaza et Israël, lundi, pour protester contre l'inauguration de l'ambassade des États-Unis à Jérusalem. Attendus, les affrontements ont causé la mort d'au moins 55 Palestiniens. Dans l'après-midi, l'ambassade américaine a été inaugurée notamment par Ivanka Trump et Jared Kushner, la fille et le gendre du président américain Donald Trump, pour sa part absent à la cérémonie. 

Les infos à retenir

  • Au moins 55 Palestiniens ont été tués par des soldats israéliens à la frontière entre la bande de Gaza et Israël
  • L'ONU dénonce l'"usage disproportionné de la force" par Israël; Paris "condamne les violences"
  • Donald Trump a salué un "grand jour pour Israël" avec l'inauguration de l'ambassade à Jérusalem

Une cinquantaine de Palestiniens tués par l'armée israélienne

Très tôt, lundi, des milliers de Palestiniens de la bande de Gaza ont convergé vers la frontière avec Israël, causant des heurts avec l'armée israélienne. Le dernier bilan connu dans la soirée lundi était de 55 morts, dont au moins huit enfants, et plus de 2.000 blessés, selon le ministère de la Santé gazaoui. Il s'agit de la journée la plus meurtrière du conflit israélo-palestinien depuis 2014. Ces morts portent à 97 le nombre de Palestiniens tués dans la bande de Gaza par des tirs israéliens depuis fin mars et le début d'une protestation massive contre la politique territoriale d'Israël.

gaza

Les Gazaouis réunis près de la frontière avec l'Etat hébreu ont été repoussés par l'armée israélienne. ©MOHAMMED ABED / AFP

L'ONU dénonce "l'usage disproportionné de la force" par Israël

La communauté internationale a largement réagi et condamné les violences dans la bande de Gaza lundi. L'ONU a rapidement dénoncé "l'usage disproportionné de la force" par l'État hébreu, l'exhortant "à s'abstenir de tout acte qui pourrait faire de nouvelles victimes et à garantir que les blessés palestiniens aient un accès rapide et sans entrave aux soins médicaux". Le Koweit a demandé une réunion en urgence du Conseil de sécurité des Nations unies, mardi. De son côté, Benjamin Netanyahou a défendu l'usage de la force par le droit de son pays à protéger ses frontières. "Tout pays a l'obligation de défendre son territoire", a-t-il affirmé sur Twitter. "L'organisation terroriste du Hamas proclame son intention de détruire Israël, et envoie à cette fin des milliers de personnes pour forcer la frontière", a expliqué le Premier ministre israélien, assurant qu'Israël continuerait à agir "avec détermination" pour l'en empêcher. La Maison-Blanche a également imputé au Hamas la "responsabilité" des 52 Palestiniens tués par l'armée israélienne dans la bande de Gaza. 

De son côté, le président de l'Autorité palestinienne Mahmoud Abbas a refusé la médiation de paix américaine et dénoncé un "massacre" israélien. Massacre dont "l'administration américaine est autant responsable qu'Israël", selon la Turquie. Les dirigeants de la Ligue arabe se réuniront en urgence mercredi, "à la demande de l'État de Palestine". "La France appelle l'ensemble des acteurs à faire preuve de responsabilité afin de prévenir un nouvel embrasement", a déclaré pour sa part le ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian. Peu après, l'Élysée a tenu à "condamner les violences des forces armées israéliennes contre les manifestants", et a rappelé la "désapprobation" de la France concernant le transfert de l'ambassade américaine à Jérusalem. En outre, l'Afrique du Sud, comme la Turquie, ont décidé de rappeler leur ambassadeur en Israël après cette journée de violences à Gaza. 

L'inauguration de l'ambassade controversée

Ce lundi est un jour particulier : cinq mois après l'annonce par Donald Trump du transfert de l'ambassade américaine en Israël de Tel Aviv à Jérusalem, c'est l'inauguration de ce bâtiment, symbole de la reconnaissance de la ville sainte comme capitale de l'État hébreu, qui déchaîne la colère des Gazaouis. Un "grand jour pour Israël" selon le président américain, absent de ce moment historique mais représenté par Ivanka Trump et Jared Kushner, la fille et le gendre du locataire de la Maison-Blanche, qui sont aussi ses conseillers. Des centaines de dignitaires des deux pays étaient présents lors de cette cérémonie, dont Benjamin Netanyahu, Premier ministre israélien.

ambassade 1280

Ivanka Trump a inauguré lundi à Jérusalem la nouvelle ambassade américaine. ©AFP

Benjamin Netanyahu a félicité le président américain lors de cette cérémonie : "Président Trump, en reconnaissant ce qui appartient à l'Histoire, vous avez écrit l'Histoire." Dans un message vidéo, le milliardaire américain a rappelé que les États-Unis restaient "pleinement" engagés dans la recherche d'un "accord de paix durable". Le secrétaire d'État américain Mike Pompeo a lui aussi réaffirmé l'engagement des Etats-Unis pour la paix, mais son court communiqué ne fait aucune référence aux dizaines de Palestiniens tués lundi dans la bande de Gaza par des soldats israéliens.

De nouveaux affrontements mardi ?

Autre symbole de taille, qui irrite encore plus les Palestiniens : il y a 70 ans, jour pour jour, l'État d'Israël était officiellement créé. C'est d'ailleurs pour demander le "droit au retour" sur les terres cédées en 1948 que les Palestiniens devraient de nouveau affluer à la frontière avec Israël mardi, pour commémorer la "Nakba", synonyme d'exode, à l'époque, pour des centaines de milliers de personnes. "Aujourd’hui ce n’était 'que' l’inauguration de l’ambassade américaine à Jérusalem, demain ce sera la Nakba et mercredi ce sera le ramadan", commente dans Europe Nuit l’historien spécialiste de Jérusalem Vincent Lemire, redoutant une flambée des violences dans les jours à venir. "Le ramadan, c’est toujours un mois compliqué en Palestine car les soirs, les jeunes palestiniens sont dehors, de 21h à minuit, donc s’il y a une mobilisation en cours, c’est extrêmement inflammable."