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Chaque samedis et dimanches, Nicolas Beytout, directeur du journal "L'Opinion", donne son avis sur l'actualité de la semaine. Ce 10 septembre, il explique pourquoi le déficit commercial de 6 milliards d'euros enregistré en juillet est un très mauvais signe pour la France.

Samedi, vous nous avez dit que vous aviez apprécié la politique de privatisation du gouvernement. Aujourd’hui, c’est une mauvaise note que vous mettez...

En effet, et je vais vous parler d’un chiffre rendu public il y a trois jours, un chiffre très inquiétant et qui, pourtant, n’a pas provoqué la moindre réaction. Ce chiffre, c’est un six : 6 milliards d’euros, c’est le montant du déficit commercial enregistré par l’économie française en juillet dernier. C’est une très mauvaise performance, un brutal dérapage par rapport aux années antérieures qui, elles-mêmes, n’étaient déjà pas brillantes. Jugez vous-mêmes : en sept mois, la France a accumulé 41 milliards d'euros de déficit commercial. C’était 27 milliards à la même période l’an dernier.

Mais vous venez de le dire, ce n’est pas nouveau... Donc pourquoi cette inquiétude ?

Parce que ce chiffre, qu’on appelle la balance commerciale, est l’indicateur avancé de la compétitivité de la France. Je crois que tout le monde ou presque a maintenant compris que, dans une économie ouverte comme l’est celle de la France, il est impératif d’être compétitif, c’est-à-dire de pouvoir affronter la concurrence à l’étranger. Le déficit de notre balance commerciale traduit le fait qu’on achète beaucoup plus de produits à l’étranger que nous ne parvenons à leur en vendre. Et bien sûr, plus on achète à l’étranger, moins on fabrique en France ; moins on fabrique en France, plus on met en danger notre tissu industriel, notre irrigation du territoire, nos usines, notre capacité de production, et bien entendu l’emploi. Le déficit aggravé de la balance commerciale est un signe inquiétant du décrochage de la maison France.

Songez que l’on dérive tranquillement vers les 60 milliards d'euros de déficit commercial pour 2017, là où l’Allemagne a dégagé près de 300 milliards d’excédents l’an dernier, et 20 milliards pour le seul mois de juillet. Quel fossé, quel décalage !

Et la solution, c’est quoi ?

Produire mieux et moins cher. Ce qui est en réalité un défi pour plusieurs années. Produire moins cher, le gouvernement est conscient de cette nécessité : c’est le but de la baisse des charges et des impôts qui pèsent sur l’entreprise. On est encore loin de la moyenne européenne, mais on progresse. Mais produire moins cher, c’est aussi produire plus technologique, avec plus de robots, plus d’intelligence artificielle, ce qu’on appelle l’industrie 4.0. Il faut donc investir, pour produire moins cher et pour produire mieux, aussi. Et pour cela, il faut que les entreprises continuent à améliorer leurs bénéfices pour les réinvestir toujours plus dans la compétitivité de notre outil de production.

Je vous le disais, le gouvernement a engagé cette démarche. Mais il ne le fait qu’à moitié : la France reste un des pays développés les plus lourdement taxés. C’est indispensable de réformer le Code du Travail. Mais on devrait s’habituer à penser que chaque euro qui est prélevé par l’État, recyclé, redistribué, est un euro qui aurait pu être mieux utilisé à l’amélioration de nos capacités de production. Et, in fine, utilisé à l’amélioration de notre balance commerciale, c’est-à-dire de notre compétitivité.