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Le cargo géant qui bloque le canal de Suez menace de désorganiser le commerce entre l’Europe et l’Asie. Nicolas Barré fait le point sur une question d'actualité économique.

Il faudra des jours, peut-être des semaines, pour dégager le cargo géant qui bloque le canal de Suez et qui menace de désorganiser le commerce entre l’Europe et l’Asie.

Peut-être avez-vous vu ces cartes maritimes en temps réel où l’on voit se former un formidable embouteillage de centaines de navires qui s’agglutinent aux entrées nord et sud du canal. Le blocage du canal de Suez, on le visualise en direct, c’est un très gros grain de sable dans la mondialisation. Chaque jour qui passe augmente le coût économique de cet événement improbable. Imaginez : le blocage du canal coûte 400 millions de dollars par heure, selon Lloyd’s List, publication maritime spécialisée. Et, accessoirement, prive l’Egypte de l’une de ses principales sources de devises : le canal lui rapporte cinq milliards de dollars, trois fois plus que l’aide militaire américaine.

Il n’est pas exagéré de dire que ce blocage a des conséquences planétaires.

Tous les jours, près de 10 milliards de dollars de marchandise transite par le canal, environ cinq milliards dans chaque sens. C’est l’artère principale du commerce entre l’Europe et l’Asie. La couper, c’est perturber toute l’irrigation des flux commerciaux entre les deux plus grandes zones économiques et commerçantes de la planète. Il faut réorienter les flux, faire une énorme dérivation de plusieurs milliers de kilomètres autour de l’Afrique. Chaque jour, deux millions de barils de pétrole, russe principalement, emprunte le canal pour fournir du carburant aux économies asiatiques. Un lien vital pour ces pays.

Cet événement montre aussi qu’il suffit de pas grand-chose pour perturber toute l’économie.

On l’a vu avec le virus qui, en quelques mois, a mis parterre toutes les économies de la planète et coûté des milliers de milliards de dollars. Là, c’est un simple coup de vent qui a fait tanguer cet énorme cargo. Un coup de vent qui coûte chaque jour des milliards. Ironie de l’histoire : pour s’en sortir, on compte sur un autre événement naturel, la marée, car il y aura de grandes marées dimanche et lundi, en espérant qu’elle permettra de dégager le cargo du sable dans lequel il est retenu. Ça rend modeste vous le voyez : il suffit de peu de chose pour faire dérailler cette extraordinaire mécanique de précision qu’est devenue l’économie mondiale. Une perturbation à un point de la chaîne, des composants qui manquent, un retard dans des flux tendus de pièces et de matières premières, et c’est tout le système qui s’enraye. Plus celui-ci est complexe, plus les risques sont multiples et imprévisibles. Comme un coup de vent…